Le père de la Révolution cubaine Fidel Castro est décédé vendredi soir à La Havane à l'âge de 90 ans, a annoncé son frère Raul, qui lui a succédé au pouvoir en 2006. Sa dépouille devrait être incinérée dans les première heures de la journée. Il restera dans l'histoire comme le dernier grand dirigeant communiste du monde occidental.
"Le commandant en chef de la révolution cubaine est décédé à 22H29 ce soir", a annoncé Raul Castro sur l'antenne de la télévision nationale.
La dépouille de Fidel Castro "sera incinérée" samedi. "Conformément à la volonté exprimée par le camarade Fidel, sa dépouille sera incinérée dans les premières heures" de la journée de samedi, a annoncé l'actuel président cubain à la télévision.
Fidel Castro a dirigé Cuba d'une main de fer pendant près d'un demi-siècle, défiant sur son île communiste 11 présidents américains, même s'il avait cédé le pouvoir à son frère cadet Raul à partir de 2006.
Symbolisant les espoirs du Tiers-Monde et des mouvements de libération au début de sa Révolution en 1959, le "Barbudo" en treillis vert olive s'était cependant peu à peu transformé en dirigeant autoritaire et dogmatique, refusant toute libéralisation et mettant au pas toute opposition.
Fils d'un propriétaire terrien d'origine espagnol, Fidel Alejandro Castro Ruz est né le 13 août 1926 à Biran dans la province d'Oriente (est). Élevé chez les jésuites, il est diplômé de la faculté de droit de l'université de La Havane.
Dès le coup d'État du général Fulgencio Batista en 1952, il organise la lutte armée avec son frère Raul. Le 26 juillet 1953, il tente d'attaquer la caserne Moncada à Santiago de Cuba (est), mais échoue. Arrêté et condamné à 15 ans de prison, il est amnistié puis libéré deux ans plus tard.
Exilé au Mexique, il débarque avec 81 hommes - dont l'Argentin Ernesto "Che" Guevara - en décembre 1956 sur la côte sud du pays. L'expédition est décimée. Réfugié avec une poignée de combattants dans les collines de la Sierra Maestra, il réussit à se réorganiser et à prendre le contrôle d'une partie de la province d'Oriente.
Lancée en août 1958, une offensive générale se soldera par l'effondrement du régime de Batista le 1er janvier 1959. Le 8 janvier, entouré de ses "barbudos" - son frère Raul, "Che" Guevara, le charismatique Camilo Cienfuegos -, Fidel Castro fait une entrée triomphale à La Havane.
Premier ministre en février 1959, il concentre rapidement tous les pouvoirs avant de fonder un nouveau Parti communiste de Cuba en 1965, parti unique jusqu'à aujourd'hui. Il en a laissé le poste de premier secrétaire à son frère Raul en avril 2011.
En 1961, il proclame le "caractère socialiste" de la Révolution lors de la tentative d'invasion d'exilés cubains, soutenus par la CIA, de la baie des Cochons.
Les Américains, qui imposent toujours aujourd'hui un embargo à l'île, ne lui ont jamais pardonné d'avoir mis le monde en 1962 au bord du conflit atomique en permettant aux Soviétiques de déployer des missiles nucléaires à Cuba, à moins de 200 km de leurs côtes.
En dépit de l'effondrement de l'Union soviétique en 1991, qui l'a privé d'un bailleur de fonds et allié inégalé, il est parvenu à se maintenir à la tête de son pays, continuant à tenir tête à Washington et refusant tout assouplissement de son régime.
Le 31 juillet 2006, il avait dû, à la suite d'une grave opération, céder le pouvoir à son frère Raul, son indéfectible ministre de la Défense et numéro deux du régime, d'abord de façon provisoire puis définitive en février 2008.
Retrouvez les principales étapes de la vie du dirigeant ici.
- "Le Cubain est rebelle à cause de Fidel" -
A Cuba, "Fidel c'est tout, c'est le sport, la culture... c'est la rébellion. Le Cubain est rebelle à cause de Fidel", s'enflamme Manuel Bravo, vitrier de 48 ans, face à l'un des nombreux bâtiments de La Havane sur lequel on peut lire le slogan: "Fidel, 90 ans et bien plus".
Fidel, c'est l'homme qui a instauré un régime socialiste à parti unique, fortement critiqué sur la scène internationale pour les nombreuses violations des droits de l'homme.
Mais c'est aussi celui qui a apporté santé et éducation gratuites à des millions de Cubains, en grande majorité pauvres.
Elle est loin, l'image de l'impétueux guérillero entré triomphalement à La Havane en 1959: aujourd'hui, c'est un vieil homme à la barbe blanchie, diminué par une sévère crise intestinale il y a quelques années, qui vit retiré dans sa maison de La Havane, où il ne reçoit que de rares visites de personnalités.
Lors de sa précédente apparition publique, le 19 avril à la clôture du Congrès du parti communiste cubain, il avait admis, la voix tremblante: "Bientôt j'en aurai fini comme tous les autres. Notre tour viendra à tous".
Il est ensuite réapparu publiquement pour son 90ème anniversaire, fêté en août dernier.
Par Laurence COUSTAL - © 2016 AFP