[VIDEO] Décédée à l'âge de 96 ans

La reine Elizabeth II est morte, Charles III accède au trône

  • Publié le 9 septembre 2022 à 11:21
  • Actualisé le 9 septembre 2022 à 15:19

Monarque la plus célèbre de la planète, la reine Elizabeth II est morte jeudi à 96 ans dans sa résidence écossaise de Balmoral, ouvrant une ère incertaine pour la couronne britannique à laquelle elle avait dédié sa vie.

La disparition de la souveraine, dont l'état de santé s'était dégradé depuis un an, est assurée de susciter une immense émotion au Royaume-Uni et dans le monde. Son fils et héritier accède au trône à 73 ans avec le nom de Charles III.

"La reine est morte paisiblement à Balmoral cet après-midi. Le Roi et la Reine consort resteront à Balmoral ce soir et retourneront à Londres demain", a indiqué le palais de Buckingham dans un bref communiqué.

 

Symbole de stabilité ayant traversé imperturbable les époques et les crises, elle avait côtoyé, depuis la mort de son père George VI en 1952, quand elle n'avait que 25 ans, Nehru, Charles de Gaulle ou Mandela qui l'appelait "mon amie".

Pendant son règne, elle a traversé la Seconde Guerre mondiale, vu la dissolution de l'Empire britannique et connu 15 Premiers ministres, tout en incarnant la stabilité de l'Etat au cours de ses sept décennies de règne.elle a assisté à la construction puis la chute du mur de Berlin, et a rencontré 12 présidents américains. Elle venait de nommer mardi son 15e Premier ministre, Liz Truss, occasion d'une dernière photo, frêle et appuyée sur une canne.

Doyenne des têtes couronnées d'Europe, la souveraine était auréolée d'une immense popularité. La dernière photo d'Elizabeth II la montrait mardi en gilet gris et jupe tartan dans sa résidence écossaise de Balmoral. Elle y a reçu Boris Johnson venu présenter sa démission, puis Liz Truss qu'elle a nommée officiellement Première ministre. Elle est alors apparue souriante, mais très fragile, appuyée sur sa canne.

 

Des anciennes colonies britanniques à la Russie ou la Chine, où elle fut le premier monarque britannique à avoir mis les pieds, Elizabeth II a parcouru un monde soumis aux soubresauts de l'Histoire, toujours vêtue de tenues colorées, chapeau assorti et sac à main au coude, un uniforme qui lui permettait d'être vue par tous malgré sa taille (1m63). Elle était cheffe de 15 Etats à sa mort.

Si elle a cessé de voyager à l'étranger à la fin de son règne, elle a inlassablement exercé ses fonctions protocolaires dans son royaume, y compris dans les jours suivant les obsèques de son époux Philip en avril 2021. Sans rechigner à la tâche, laissant très rarement percer ses émotions, et jamais ses opinions.

- "Aimée dans le monde entier" -

Les drapeaux ont été mis en berne au dessus du palais de Buckingham à Londres, où certaines personnes présentes ont éclaté en sanglots. "God Save the Queen" a été joué sur la BBC.

"Le décès de ma mère bien-aimée, Sa Majesté la Reine, est un moment de très grande tristesse pour moi et tous les membres de ma famille", a déclaré Charles III dans son premier communiqué comme souverain. "Nous pleurons profondément la disparition d'une souveraine chérie et d'une mère bien aimée. Je sais que sa perte sera profondément ressentie dans tout le pays, les royaumes et le Commonwealth, ainsi que par d'innombrables personnes dans le monde entier".

Sur le perron du 10, Downing Street, la Première ministre a rendu hommage à une souveraine "aimée et admirée dans le monde entier". "La mort de Sa Majesté constitue un choc énorme pour la nation et le monde", a-t-elle souligné, appelant les Britanniques à "s'unir pour soutenir" le nouveau roi.

A l'étranger, les hommages ont afflué. Emmanuel Macron a salué "une amie de la France, une reine de cœur" ayant "marqué à jamais son pays et son siècle". Joe Biden, reçu par Elizabeth II l'an dernier, a rendu hommage à "une femme d'Etat d'une dignité et d'une constance incomparables", assurant vouloir "poursuivre une étroite relation d'amitié avec le roi et la reine consort".

- Reine par accident -

Née Elizabeth Alexandra Mary le 21 avril 1926 à Londres, la princesse "Lilibet", boucles blondes et visage d'angelot, n'était pas destinée au trône.Mais fin 1936, son oncle Edouard VIII abdique, préférant épouser Wallis Simpson, une Américaine deux fois divorcée. Le père d'Elizabeth, un homme timide et bègue, devient alors George VI.

C'en est fini de l'innocence. La fillette emménage dans l'austère palais de Buckingham. Elle est instruite à domicile avec sa soeur Margaret et va ingurgiter un programme accéléré en histoire et en droit constitutionnel. Elle apprend aussi le français, une langue qu'elle parlera couramment. Puis, vers la fin de la Seconde guerre mondiale, elle rejoint l'armée de réserve, à 19 ans, comme conductrice.

Elle épouse à 21 ans le fringant officier Philip Mountbatten, fils du prince André de Grèce, au cours d'une cérémonie qui fera rêver la Grande-Bretagne d'après-guerre encore marquée par les privations.

Le 6 février 1952, alors qu'elle effectue un voyage au Kenya, elle apprend la mort de son père. Sa vie de jeune mariée prend une tout autre tournure. Elle retourne immédiatement au Royaume-Uni puis est couronnée le 2 juin 1953, 40e monarque depuis Guillaume le Conquérant en 1066.

- Infatigable -

Devenue à l'âge de 25 ans souveraine du Royaume-Uni, du Canada, d'Australie, de Nouvelle-Zélande, d'Afrique du Sud, du Pakistan et de Ceylan (l'actuel Sri Lanka), elle promet à ses sujets "d'être digne de leur confiance tout au long de (sa) vie".

Infatigable, Elizabeth II honorait à 90 ans passés des centaines d'engagements chaque année: inaugurations en tous genres, réceptions à Buckingham, remises de décorations ou de récompenses, montrant à chaque fois un intérêt poli. Mais depuis octobre 2021, elle avait fortement réduit ses activités après une très brève hospitalisation.

Avec ses quatre enfants, Charles, né en 1948, Anne, en 1950, Andrew, en 1960 et Edward né en 1964, elle se montre distante, en public au moins. Cette femme très croyante et économe malgré son immense fortune, incarne la stabilité au sein d'une famille régulièrement brocardée par la presse.Elle a dû affronter de nombreuses crises familiales, comme en 1992, qu'elle a surnommée "Annus Horribilis", lorsque Charles, Anne et Andrew voient leurs couples respectifs exploser et que son château de Windsor est la proie des flammes.

Mais son flegme est aussi à l'origine du grief qu'on lui fit, quand en 1997, à la mort de Diana, elle reste silencieuse dans son château de Balmoral alors que le pays entier pleure.

- Neutre politiquement -

Cette incompréhension entre le public et la reine, pour qui Diana ne fait plus partie de la famille royale depuis son divorce, constitua l'une des crises les plus importantes pour la monarchie.

La reine a su faire quelques concessions, en prononçant finalement une allocution télévisée en mémoire de la princesse de Galles et acceptant le remariage de son fils Charles avec Camilla, même si elle n'a pas assisté à la cérémonie.

En 2019, Andrew, souvent considéré comme son fils préféré, met la famille royale dans l'embarras en raison de son amitié passée avec le financier américain Jeffrey Epstein qui lui vaut des accusations particulièrement graves depuis que ce dernier, soupçonné d'avoir exploité sexuellement des mineures, s'est suicidé en prison. Andrew est contraint de se retirer de la vie publique et évite un procès aux Etats-Unis pour agressions sexuelles grâce à un accord à l'amiable.

Elizabeth II montre plus d'affection pour ses huit petits-enfants, notamment les fils de Charles et Diana, William et Harry. Mais en 2020, Harry prend des distances avec la famille royale, partant vivre en Californie et accusant "la Firme", surnom de la royauté, d'avoir manqué de soutien et fait preuve de racisme envers sa femme Meghan, métisse.

En 2021, la mort de Philip, son "roc" et époux depuis sept décennies constitue une épreuve de plus pour la reine, isolée dans son château de Windsor où elle vit de longs mois confinée, en pleine pandémie de coronavirus.

En octobre de la même année, elle passe une nuit à l'hôpital et ses médecins lui conseillent de lever le pied. Sur leur avis, la souveraine de 95 ans accepte enfin d'alléger son agenda. Elle reprend ses engagements début 2022 mais teste positive au Covid-19 le 20 février.

Début juin, les Britanniques avaient célébré pendant quatre jours les 70 ans de règne d'Elizabeth II. Elle est restée quasi absente de ce jubilé de platine, ne se montrant qu'à deux brèves reprises au balcon du palais de Buckingham devant des dizaines de milliers de personnes.

- Figure familière -

Toutes ces années, elle garde ses opinions pour elle, n'accordant jamais aucune interview. Nul ne sait par exemple ce qu'elle a pensé du choix des Britanniques de voter pour le Brexit, en 2016.

Recevant chaque semaine en audience le chef du gouvernement, la reine observe comme il se doit une stricte neutralité politique. Sa Majesté - ou "Ma'am" - règne mais ne gouverne pas.

Ses seules passions affichées sont les chevaux et les chiens, notamment ses chers corgis. Nonagénaire, elle montait encore à cheval, sans bombe mais avec un foulard protégeant sa chevelure grise.

Son image est omniprésente au Royaume-Uni, des pièces de monnaie affichant son profil aux figurines à son effigie agitant une main gantée.

Non sans humour, la reine a su jouer de cette image comme lorsqu'elle participe à une vidéo avec James Bond - interprété par Daniel Craig -, à l'occasion des jeux Olympiques d'été de 2012 à Londres

Il y a eu aussi cette vidéo mettant en scène la reine en train de boire un thé avec l'ours Paddington en juin 2022  lors du Jubilé

Beaucoup de Britanniques l'ont connue toute leur vie et appréciaient cette figure familière et rassurante. Au crépuscule de son règne, Elizabeth II figurait toujours en tête des sondages de popularité des membres de la famille royale, dépassant nettement son fils aîné et successeur Charles.

Le roi Charles aura fort à faire pour préserver l'attachement des Britanniques à la monarchie, institution que certains jugent dépassée mais dont Elizabeth II avait su maintenir le prestige.

Il accède au trône à un moment où l'unité du Royaume-Uni se fissure, sous l'effet du Brexit, qui a réveillé les velléités d'indépendance de l'Écosse et les tensions communautaires en Irlande du Nord. Dans les ex-colonies britanniques restées des royaumes, les critiques se font aussi vives sur le passé colonialiste et les velléités républicaines se renforcent.

www.ipreunion.com avec l'AFP

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