Jusqu'à 10 euros le kilo

Le prix des bananes flambe, mais les agriculteurs ne s'en mettent pas plein les poches

  • Publié le 12 juin 2025 à 10:08

Conséquence des cyclones, production en berne, pénurie sur les étals... le prix des bananes flambe. Et encore faut-il en trouver. Contrairement aux idées reçues, cette flambée des prix ne ne profite pas aux agriculteurs. Ils sont même plutôt contre cette pratique de hausse fulgurante des tarifs (Photo sly/www.imazpress.com)

Non, les producteurs de bananes ne s'en mettent pas plein les poches. Sur les marchés et dans les rayons, les consommateurs s'étonnent de voir la banane s'afficher parfois à plus de 8 ou 10 euros le kilo.

Une aberration pour Jean-Michel Moutama, président de la CGPER : "À la sortie de l’exploitation, on vend le kilo entre 3 et 3,50 euros. Ce sont les revendeurs qui gonflent les prix".

- "On est désolés pour les consommateurs" -

Même constat pour Stéphane Sarnon, président de la FDSEA : "Ce sont les marges intermédiaires qui posent problème. En vente directe, on ne pratique pas de tels prix. Les gens pensent que l’agriculteur en profite, mais c’est faux. Nous aussi on est désolés pour les consommateurs".

Gilbert Bafinal, producteur de bananes à la Ravine des Cabris, a perdu 40 % de sa production lors du passage du cyclone Garance. Malgré cela, il continue de vendre ses bananes à un prix raisonnable : "Il y a deux semaines, je les vendais à 3,60 euros le kilo, sur le marché de gros. Hier, mercredi, je suis monté à 4 euros, pas plus", explique-t-il.

Selon les prix relevés par la Direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DAAF) de la Réunion au marché de gros, le mercredi 4 juin 2025, le kilo de banane était vendu à 1,50 euros en moyenne et 2,35 euros au maximum, soit 1,15 euros de moins qu'au relevé précédent.

Selon Gilbert Bafinal, certains revendeurs profitent de la pénurie pour pratiquer des tarifs beaucoup plus élevés. Pour limiter les abus, il préfère répartir ses ventes entre plusieurs acheteurs : "Si je ne vends qu'à une ou deux personnes, et qu'elles se retrouvent seules à proposer des bananes sur un marché, elles deviennent les rois du pétrole".

- La banane, un fruit qui se fait rare -

Il faut dire que depuis le passage du cyclone Garance en février dernier, les bananiers réunionnais ont été quasiment anéantis. Déjà fragilisées par Belal, l'année dernière, les plantations n'ont pas eu le temps de se relever.

"Tous les pieds porteurs ont été déracinés, entraînant des pertes de récolte dépassant les 100 %", écrivait la Chambre de l'Agriculture de La Réunion dans une note officielle dressant le bilan après post-Garance. "Les régimes tombés au sol ne sont pas récupérables".

Selon Olivier Fontaine, président de la Chambre, la filière banane est l’une des plus sensibles aux intempéries : "Les bananiers sont toujours les premiers touchés. Et avec l’arrivée de l’hiver, la production baisse naturellement. Il ne faut pas s’attendre à un retour à la normale avant la fin de l’année".

Résultat : une pénurie, aggravée par un cycle de production long (8 à 10 mois pour retrouver des fruits), qui entraîne mécaniquement une hausse des prix.

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- L'importation comme solution ? -

Face à la pénurie, les importations deviennent une solution tentante, mais dangereuse selon les professionnels. "Ça pose problème lorsque les normes ne sont pas respectées. On a vu les conséquences avec les tomates du Maroc. Résultat : un virus a été introduit à La Réunion", s'indigne Jean-Michel Moutama. 

En mai dernier, le Tomato Brown Rugose Fruit Virus (To.B.R.F.V) avait été introduit à La Réunion, suite à l'importation de tomates cerises provenant du Maroc. Ce virus, extrêmement dangereux pour les tomates, est contagieux et très résistant. Si la nouvelle avait inquiété de nombreux agriculteurs, aucun champ n'avait été contaminé.

Pour le président de la CGPER, "ce qui semble être un bon moyen de compenser la pénurie risque finalement de mettre à mal la production locale. Si dans les prochaines semaines il y a de l'importation de bananes, je monterai au créneau". Une position partagée par les autres syndicats, qui alertent aussi sur les risques sanitaires que pose l'importation de produits aussi fragiles que la banane.

- Les agriculteurs en difficulté - 

Au-delà des conditions météorologiques, les agriculteurs doivent faire face à des difficultés au quotidien. Ils attirent l'attention notamment sur le manque de moyens pour relancer rapidement la production. "On n’a pas encore touché les indemnisations promises après le cyclone. On nous avait parlé d’avril-mai, on est en juin et seulement une cinquantaine de dossiers ont été instruits", déplore Stéphane Sarnon.

À cela s’ajoutent des problèmes de sécurité. Dans le sud de l'île, les producteurs subissent une vague de vols sur leurs exploitations. Gilbert Bafinal témoigne : "Mon voisin a retrouvé, dimanche matin, plusieurs régimes coupés au milieu de sa parcelle", il raconte. 

Les voleurs n’hésitent pas à découper les clôtures pour pénétrer sur les terrains agricoles, causant non seulement la perte de récoltes, mais aussi des frais supplémentaires pour les réparations. "Perdre deux ou trois régimes, c’est déjà 80 à 120 euros de marchandise envolée. Mais le pire, c’est qu’on doit ensuite ressouder la clôture".

Pour se protéger, Gilbert a installé des caméras sur son exploitation. "Ce sont des dépenses qu’on ne devrait pas avoir à faire. Avec les cyclones, la reprise est déjà assez compliquée comme ça. Ces vols, c’est la goutte d’eau de trop". 

- Consommer responsable -

En attendant un retour à la normale, les agriculteurs appellent les consommateurs à faire preuve de compréhension et à s'adapter à la saison : "En ce moment, c’est la période des agrumes. Il faut apprendre à consommer local et de saison", souligne Olivier Fontaine. "S'il y a moins de bananes, mangeons plus d'oranges".

"On a un devoir envers les Réunionnais.e.s. On veut nourrir la population, pas l’arnaquer", résume Stéphane Sarnon. "Aujourd'hui, il faut penser l'agriculture autrement. On a besoin de structures plus solides pour faire face aux cyclones. Sinon, c’est un éternel recommencement".

Alors que plus de 40 % des agriculteurs réunionnais vivent sous le seuil de pauvreté, selon des chiffres de la DAAF de La Réunion, tous appellent à un soutien fort des pouvoirs publics pour éviter de nouvelles crises.

vg / www.imazpress.com / redac@gmail.com

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13 Commentaires
Lal
Lal
2 jours

Longtemps le créole y mangé quand les bananes était mûr.
Aujourd'hui ya des gens venu d'ailleurs y mange bananes verte
Chercher l'erreur pourquoi il n'y a plu de bananes murs.

Achtung
Achtung
2 jours

Difficile de faire plus c... comme commentaire.

Lilie
Lilie
2 jours

C justement ce à quoi je faisais référence

Achtung
Achtung
1 jour

Et vous y arrivez ; les droiteux sont dans la batailles des bananes .

Missouk
Missouk
2 jours

Dans le sud, des bananes il y en a ! Et pourtant elles sont chères aussi... J'ai cueilli trois régimes autour de notre maison en moins de deux semaines. Il faut donc m'expliquer!

Phoénix974
Phoénix974
2 jours

Ah ouais, le Pdt de la FDSEA se sent désolé pour les petits "vaches à lait" que sont les consommateurs? Mdr...Alors dans ce cas qu'attend-il pour faire organiser des ventes directes chez les producteurs? A 3,00€ le kg, je suis preneur.

Gérard LEVENEUR
Gérard LEVENEUR
2 jours

Les agriculteurs de la Réunion ne sont vraiment pas trop intelligents, si ce produit revient trop cher, il faut l'importer car en FRANCE le prix de vente en grande surface au kilo est à moins d'un euro et eux ils sont déjà en sortie de leurs champs à plus de 3 euros du kilo, c'est de la folie l'agriculture à la Réunion, c'est pareille en ce qui concerne le prix de la canne à sucre qui est 4 fois plus cher qu'au BRESIL et est subventionné depuis sa plantation jusqu'à la coupe et aussi même au niveau des engrais, il n'y a pas tout ça ailleurs et le prix du kilo de sucre est tellement élevé que personne ne peut l'acheter.
Il faut penser passer à autre chose comme culture et importer tout ce qui n'est pas rentable à la Réunion, vivement que cela se fasse et arrêter toutes sortes d'aides et de subventions.
Encore heureux que l'UE a stoppé toutes ces aides envers ces planteurs de canne à sucre, qu'ils apprennent à changer leurs plantations ou passer à un autre métier.

joelle roinsolle
joelle roinsolle
2 jours

Menteurs,ils ont vendu leur bananes au prix exubérant après le cyclone,ont touché une indemnité sur des fruits qu'ils ont vendu plien pot et ils continuent à vendre très cher. Ce sont des menteurs et profiteurs

Lilie
Lilie
2 jours

Eh bien si on ne vendait pas tous nos régimes de bananes à 20€ à certaines communautés, on n'en serait pas arrivé à là aujourd'hui

Achtung
Achtung
2 jours

Le racisme n a pas de llmite dans la c....rie...

Alé dit partout
Alé dit partout
2 jours

Lisant votre commentaire pourquoi pas ?

Mais,

Les intermédiaires, les grandes surfaces se mettent plein les " fouilles " quand les consommateurs passent à la caisse.

" Non, les producteurs de bananes ne s'en mettent pas plein les poches "

Templier974
Templier974
2 jours

Bien dit.

Geneviève
Geneviève
2 jours

Lilie ferme la