Le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, a claqué la porte de la Commission européenne lundi, se disant désavoué par la présidente Ursula von der Leyen, en pleines tractations sur la composition de la nouvelle équipe.
Ce départ fracassant de l'ancien ministre français de 69 ans plonge le microcosme bruxellois dans la stupeur alors que les noms et les portefeuilles des nouveaux commissaires étaient potentiellement attendus mardi.
"Je démissionne de mon poste de commissaire européen, avec effet immédiat", a annoncé Thierry Breton dans une lettre à Mme von der Leyen publiée dans la matinée sur le réseau social X.
Officiellement candidat d'Emmanuel Macron, il a expliqué que la cheffe de l'exécutif européen, en train de former son équipe pour un nouveau mandat de cinq ans, avait "demandé à la France de retirer (s)on nom".
"Il y a quelques jours, dans la toute dernière ligne droite des négociations sur la composition du futur Collège, vous avez demandé à la France de retirer mon nom - pour des raisons personnelles qu'en aucun cas vous n'avez discutées directement avec moi - et proposé, en guise de compromis politique, un portefeuille prétendument plus influent pour la France au sein du futur Collège" des commissaires, écrit Thierry Breton. "C'est un autre candidat qui va vous être proposé" par la France, a-t-il ajouté.
Etre commissaire européen, "fut un honneur", souligne l'ancien ministre français, mais "à la lumière des derniers développements - qui témoignent une fois de plus d'une gouvernance douteuse - je dois conclure que je ne peux plus exercer mes fonctions au sein du Collège", conclut-il.
Les relations entre la dirigeante allemande et M. Breton étaient notoirement tendues depuis que ce dernier avait pris la tête au printemps d'une fronde au sein de l'exécutif bruxellois pour contester le style de direction de la présidente, jugé peu collectif.
- Blocage en Slovénie -
Le Français avait publiquement mis en cause l'éthique de Mme von der Leyen après la nomination fin janvier d'un émissaire chargé des petites et moyennes entreprises, un poste hautement rémunéré au sein de la Commission.
Le poste avait été attribué à l'eurodéputé allemand du Parti populaire européen (droite) Markus Pieper, quelques semaines avant un congrès à Bucarest début mars lors duquel le PPE avait apporté son soutien à un second mandat de Mme von der Leyen.
La polémique avait abouti à un vote de défiance du Parlement européen contre Mme von der Leyen, en pleine campagne pour les élections européennes de juin, et finalement au retrait de M. Pieper.
Finalement réélue à la tête de la Commission en juillet, Ursula von der Leyen devait présenter mardi aux chefs de groupe du Parlement européen les noms et les portefeuilles des nouveaux commissaires, en marge d'une plénière à Strasbourg.
La composition de l'exécutif européen relève de l'exercice d'équilibriste, révélateur du poids des Etats membres, des forces politiques et des orientations de l'exécutif européen.
Avant le retrait de M. Breton, la situation était déjà incertaine en raison d'un blocage du côté de la Slovénie, où l'approbation de la nouvelle candidate Marta Kos par le Parlement national se fait attendre.
Le départ de Thierry Breton, qui s'était imposé comme une figure de l'exécutif bruxellois en s'attaquant aux abus de pouvoir des géants du numérique, complique encore l'équation.
Il intervient après une polémique que les dirigeants tentent tant bien que mal de dégonfler sur le manque de femmes dans la nouvelle équipe en train de se constituer.
Après la démission surprise du commissaire sortant français, l'eurodéputée écologiste Marie Toussaint a aussitôt pointé "l'occasion pour Emmanuel Macron de désigner une femme pour œuvrer à la parité au sein de la Commission".
Le départ de Thierry Breton intervient alors que la France a un nouveau Premier ministre, Michel Barnier, issu de la droite LR, mais pas encore d'équipe gouvernementale.
AFP
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