Plus que dans le passé

À La Réunion, près de la moitié des 55-64 ans avaient un emploi en 2022

  • Publié le 12 juillet 2024 à 16:17

En 2022, à La Réunion, 44% des habitants de 55-64 ans ont un emploi, soit 53 000 personnes. Les seniors sont davantage en emploi que dans le passé mais peinent toujours à s’y maintenir : après 55 ans, le taux d’emploi chute. Les femmes seniors sont bien moins souvent en emploi que les hommes : quatre sur dix contre cinq sur dix. De plus, elles occupent majoritairement des emplois non qualifiés d’employées, tandis que les hommes de cet âge occupent plus souvent des postes qualifiés de cadres et mieux rémunérés. Les deux tiers des seniors travaillent dans le secteur privé. Ils sont surreprésentés dans les services aux ménages et le médico-social, secteurs très féminisés. Ils le sont également dans l’agriculture et les activités immobilières, où les hommes sont largement majoritaires. Dans la fonction publique, les seniors sont très présents au sein des collectivités territoriales ; la majorité d’entre eux ne sont pas titulaires. Nous publions l'étude complète de l'Insee ci-dessous (Photo d'illustration rb/www.imazpress.com)

En 2022, 117.000 personnes âgées de 55 à 64 ans vivent à La Réunion, soit 13 % de la population. Avec le vieillissement de la population, cette part a doublé en 20 ans. Parmi ces seniors, 53 000 ont un emploi, soit 44 % d’entre eux. Ce taux d’emploi, nettement moindre que dans l’Hexagone (57 %), se réduit avec l’avancée en âge. Ainsi, à La Réunion, 50 % des 55-59 ans ont un emploi et 36 % des 60-64 ans. Cependant, le taux d’emploi des seniors augmente sensiblement depuis 2014 (+4 points).

En effet, comme ailleurs en France, les salariés âgés sont amenés à rester plus longtemps en emploi, conséquence notamment des réformes des retraites visant depuis 2010 à augmenter l’âge de départ à la retraite et la durée de cotisation nécessaire à l’obtention d’une pension à taux plein. C’est encore plus le cas à La Réunion où les seniors sont moins nombreux à bénéficier d’une retraite à taux plein.

Ainsi, le maintien en emploi des travailleurs vieillissants constitue un des enjeux majeurs qui fait l’objet de négociations pour un "nouveau pacte de la vie au travail".

- Seules quatre femmes seniors sur dix en emploi, en majorité sur des emplois peu qualifiés -

Les femmes seniors sont nettement moins souvent en emploi que leurs homologues masculins : seules quatre sur dix ont un emploi contre cinq hommes seniors sur dix.

Le taux d’emploi moindre des femmes seniors tient en particulier à la hausse récente de l’activité féminine : jusque dans les années 1990, les Réunionnaises étaient peu présentes sur le marché du travail en lien notamment avec un niveau de formation plus faible que les hommes.

Cependant, même à niveau de formation équivalent, les femmes seniors occupent moins souvent un emploi. Par exemple, parmi les seniors diplômés du supérieur, sept femmes sur dix ont un emploi contre huit hommes sur dix.

Les femmes de 55 ans ou plus en emploi occupent majoritairement des emplois peu qualifiés, d’employés ou d’ouvriers : c’est le cas de 6 femmes seniors sur 10 en emploi, contre 4 hommes sur 10 du même âge figure 1. Elles occupent aussi des emplois moins qualifiés que leurs cadettes de 30 à 54 ans, qui bénéficient d’un niveau de formation initiale plus élevé en moyenne.

Les femmes seniors sont ainsi plus souvent employées et exercent moins souvent des fonctions de professions intermédiaires ou de cadres.

Par exemple, seules 20 % des femmes de 55 ans ou plus en emploi exercent une profession intermédiaire comme professeure des écoles, infirmière ou kinésithérapeute, contre 31 % des femmes de 30 à 54 ans.

Dans l’Hexagone également, les femmes seniors occupent des emplois moins qualifiés que les plus jeunes, mais l’écart entre générations est moins marqué qu’à La Réunion.

Au contraire, les hommes seniors occupent plus souvent des postes qualifiés et mieux rémunérés que les plus jeunes : 17 % des seniors sont cadres ou exercent une profession intellectuelle contre 14 % des hommes entre 30 et 54 ans.

De plus, les hommes de 55 ans ou plus sont plus souvent chefs d’entreprises, artisans ou commerçants. Ainsi, parmi ceux qui ont un emploi, 26 % sont non-salariés, contre 18 % pour leurs cadets.

La différence dans la qualification des emplois entre les seniors femmes et hommes se reflète notamment dans le niveau de rémunération. Dans le secteur privé, les femmes perçoivent en moyenne 2.320 euros nets en équivalent temps plein (EQTP) en 2021, soit 13 % de moins que les hommes. L’écart entre femmes et hommes est deux fois plus élevé que pour les salariés de 30 à 54 ans. 

- Dans les services aux ménages et le médico-social, une main-d’œuvre plus âgée et féminine -

Environ 65 % des seniors, soit 33.000 personnes, travaillent dans le secteur privé. Ils y occupent 16 % des emplois, contre 24 % dans la fonction publique.

Dans le privé, les seniors sont surreprésentés dans quatre secteurs d’activité, dont trois qui offrent des métiers plutôt peu qualifiés : les services aux ménages, l’hébergement médico-social et l’action sociale, et l’agriculture. Le secteur de l’immobilier fait exception en offrant des emplois en moyenne plus qualifiés.

C’est dans le secteur des services aux ménages que la part des seniors est la plus élevée : 35 %, soit deux fois plus qu’en moyenne dans les autres secteurs du privé.

Les 800 seniors qui travaillent dans les services aux ménages sont quasi- exclusivement des femmes, employées directement auprès des ménages : elles sont aides à domicile, aides ménagères ou encore assistantes maternelles. Huit fois sur dix, elles sont non diplômées. Dans ce secteur, les conditions d’emploi sont peu favorables.

- Un niveau de formation plus faible pour les seniors -

Pour les seniors, en 2020, l’absence de diplôme est plus fréquente pour les femmes que pour les hommes en âge de travailler : 59 % des femmes seniors de 55 à 64 ans n’ont pas de diplôme, contre 53 % des hommes de cet âge.

Cet écart ne concerne plus les jeunes générations : les jeunes femmes sont désormais plus diplômées que les hommes. Ainsi, parmi les Réunionnaises et Réunionnais âgés de 20 à 29 ans et sortis du système scolaire, seules 18 % des femmes n’ont pas de diplôme contre 23 % des hommes.

À l’autre extrémité de l’échelle des diplômes, 30 % des jeunes femmes sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur contre 19 % des jeunes hommes.

En outre, à La Réunion, le niveau de formation initiale des seniors est plus faible que dans l’Hexagone. Ainsi, sur l’île, 56 % d’entre eux n’ont pas de diplôme et seulement 15 % sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur.

Dans l’Hexagone, les non-diplômés forment une part deux fois moindre des seniors en âge de travailler (27 %), et les diplômés du supérieur une part presque deux fois plus élevée (26 %).

 Ainsi, le recours aux contrats à durée limitée est beaucoup plus courant qu’ailleurs (27 % contre 10 % en moyenne pour les seniors) et le travail à temps partiel est la norme : il concerne 8 salariées sur 10.

Par ailleurs, 4 150 seniors, essentiellement des femmes, exercent souvent ces mêmes types de métiers en tant que salariés dans une structure d’hébergement médico-social et de l’action sociale.

Dans ce secteur, les seniors sont également surreprésentés : ils occupent 20 % des emplois. Les conditions d’emploi sont proches de celles du secteur des services aux ménages, avec une part élevée de contrats à durée limitée et de salariés à temps partiel.

Dans le contexte global de la hausse du niveau de qualification de la population, notamment des jeunes femmes, se pose la question du remplacement à terme de ces salariées seniors peu qualifiées dans ces secteurs aux conditions d’emploi peu attractives.

- Des seniors hommes plus présents dans l’agriculture et les activités immobilières -

Dans l’agriculture, les seniors sont surreprésentés avec 30 % des emplois. C’est encore plus le cas parmi les indépendants (36 % de seniors) que les salariés (19 %). Parmi les 2.200 agriculteurs de 55 ans ou plus, 8 sur 10 sont des hommes.

La grande majorité de ces agriculteurs gèrent une exploitation de petite taille : ils sont producteurs de fruits et légumes, de céréales ou encore éleveurs indépendants. Ainsi, seulement 23 % des seniors travaillant dans ce secteur sont salariés contre 38 % de ceux âgés entre 30 et 54 ans.

Le niveau de formation scolaire de ces agriculteurs plus âgés est faible : 69 % n’ont pas de diplôme contre 56 % parmi l’ensemble des seniors.

Ils ont sans doute commencé à travailler jeunes et ont appris leur métier sur le terrain. Parmi les agriculteurs plus jeunes, la part de non-diplômés est bien plus faible : 40% parmi ceux âgés de 30 à 54 ans et 20% parmi ceux de moins de 30 ans.

Les nouvelles générations d’agriculteurs ont un niveau de formation initiale plus élevé et se spécialisent aussi davantage.

Les seniors sont également surreprésentés dans le secteur de l’immobilier : 700 seniors y travaillent, soit 22 % des effectifs totaux du secteur. Les hommes y sont aussi largement majoritaires (66 %).

Dans ce secteur, les emplois offerts sont en moyenne plus qualifiés que dans les autres secteurs du privé. Ainsi, 16 % des seniors en emploi sont cadres et 19 % exercent une profession intermédiaire. Ces seniors ont un niveau de formation en moyenne plus élevé.

Seuls 21 % n’ont pas de diplôme et à l’inverse, 25 % d’entre eux sont détenteurs d’un diplôme du supérieur. Toutefois, avec l’élévation du niveau de diplôme de la population, cette part est deux fois plus faible que pour les 30-54 ans. Les seniors accèdent à ces emplois grâce à l’expérience professionnelle accumulée au cours de leur carrière.

- Des seniors moins présents dans la construction, le commerce et les services aux entreprises -

Dans le commerce, la construction et les services aux entreprises, les seniors sont sous- représentés (au maximum 15 % des effectifs).

Pour autant, ces secteurs étant parmi les plus employeurs de l’île, le nombre de seniors y travaillant est élevé : 4 800 seniors exercent un emploi dans le commerce et la réparation automobile, 3 200 dans les services aux entreprises et 2 700 dans la construction. Dans ces secteurs, l’emploi non salarié est encore plus répandu pour les seniors.

Dans le commerce, 35 % des seniors sont non- salariés. Ils sont ainsi 1 700 à tenir un petit commerce alimentaire ou d’habillement, ou une pharmacie, ou sont encore réparateurs automobiles.

Dans la construction, 31 % des seniors sont non-salariés. Ils sont 800 artisans maçons, menuisiers, plombiers ou encore électriciens à leur compte, quasi exclusivement des hommes.

Dans les activités scientifiques ou techniques, les non-salariés représentent jusqu’à 42 % des emplois des seniors de 55 ans ou plus. Ils proposent alors des services spécialisés, externalisés aux entreprises. Ils sont avocats, comptables juridiques, comptables, conseillers économiques ou encore architectes. La question de la pérennité de ces activités ou entreprises et de leur transmission éventuelle se posera au départ à la retraite de leur dirigeant.

Dans le secteur des services scientifiques ou techniques, qui regroupent notamment l’ensemble des services de prestations intellectuelles à haute valeur ajoutée, les seniors exercent plus souvent des métiers très qualifiés, qu’ils soient salariés ou non : 38 % d’entre eux sont cadres ou exercent une profession intellectuelle.

Les hommes sont bien plus souvent dans ce cas (46 % contre 25 % des femmes). Ils mettent à profit leur expérience professionnelle pour accéder plus souvent à ce niveau de responsabilités : malgré leur niveau de formation plus élevé en moyenne, les hommes de 30 à 54 ans exercent moins souvent ces fonctions (39 %).

Si les hommes sont majoritaires parmi les seniors en emploi dans ce secteur (62 % des emplois), ce n’est pas le cas parmi les plus jeunes. Entre 30 et 54 ans, femmes et hommes sont aussi nombreux et parmi les moins de 30 ans, les femmes sont plus nombreuses.

A contrario, dans les secteurs de la construction et des services de soutien aux entreprises, les seniors continuent souvent d’occuper des postes d’ouvriers non qualifiés. Dans les services administratifs et de soutien, quasiment la moitié des seniors y travaillant sont ouvriers non qualifiés : ils sont 600 agents d’entretien, de sécurité, et de services administratifs.

Dans la construction, 600 seniors sont ouvriers salariés non qualifiés, soit un senior sur cinq en emploi dans le secteur. Cette proportion est la même que parmi les travailleurs plus jeunes. Ainsi, les seniors continuent à exercer des métiers à la pénibilité physique avérée, aux risques d’accidents du travail à la fois plus fréquents et plus graves.

- Dans la fonction publique, des seniors plus nombreux dans les collectivités territoriales -

Au 31 décembre 2021, 20 000 Réunionnaises et Réunionnais âgés de 55 ans ou plus travaillent dans un des trois versants de la fonction publique. Parmi ces seniors, 52 % sont des femmes, une part plus faible que parmi les personnes de 30 à 54 ans (59 %).

Les seniors sont fortement surreprésentés dans la fonction publique territoriale, occupant 32 % des postes, soit 12 700 emplois. À l’inverse, ils sont sous- représentés dans la fonction publique d’État (17 %) et dans la fonction publique hospitalière (14 %).

En outre, le profil des seniors est très différent selon le versant de la fonction publique. Parmi les agents de 55 ans ou plus travaillant dans la fonction publique d’État, 68 % occupent un poste de catégorie A, contre 39 % dans la fonction hospitalière et seulement 6 % dans les collectivités territoriales.

Dans la fonction publique territoriale, la majorité des agents seniors ne sont pas titulaires et n’ont pas le statut de fonctionnaire.

En effet, à La Réunion, comme dans les autres Drom, les collectivités territoriales ont un recours plus fréquent aux contrats aidés afin de lutter contre le chômage structurel et stimuler l’insertion des personnes les plus dévalorisées face à l’emploi, en premier lieu les jeunes et les personnes peu qualifiées, incluant donc les personnes plus âgées. Elles jouent ainsi un rôle d’amortisseur social.

Ainsi, 6 900 agents seniors sont contractuels, vacataires ou encore sous contrat aidé (1 600 seniors en contrats aidés, soit 23 % des non-titulaires).

Ils occupent quasiment tous des postes de catégorie C, et sont en majorité des femmes (58 %). Par ailleurs, 5 900 autres agents de 55 ans ou plus sont fonctionnaires dans une collectivité territoriale. Les femmes seniors y sont moins nombreuses (43 % des titulaires de la fonction publique territoriale) et occupent moins souvent un poste de catégorie C que les hommes (72 % contre 80 %).

- Un retour difficile à l’emploi -

Dans un marché du travail marqué par un fort chômage, les seniors ont des difficultés particulières à retrouver un emploi lorsqu’ils l’ont perdu.

En concurrence avec les plus jeunes, ils ont pour la plupart un faible niveau de qualification (56 % de non-diplômés parmi les 55-64 ans contre 30 % parmi les 30-54 ans) et leurs compétences peuvent ne pas correspondre à celles recherchées par les entreprises au vu de l’évolution des métiers.

De surcroît, ils font état plus souvent de problèmes de santé : 14 % des Réunionnaises et Réunionnais âgés entre 50 et 64 ans s’estiment en mauvais ou très mauvais état de santé en 2019. Ils peuvent également éprouver plus de difficultés à se déplacer.

La majorité des demandeurs d’emplois âgés en fin de mois (DEFM) entre 55 et 70 ans inscrits à France Travail recherchent un emploi depuis au moins trois ans : c’est le cas de 51 % d’entre eux. Cette part est bien plus faible parmi les demandeurs d’emploi plus jeunes : 32 % parmi les 30-54 ans et 8 % parmi les moins de 30 ans.

De même, 85 % des DEFM âgés de 55 à 70 ans ou plus n’ont exercé aucune activité professionnelle au cours du mois (demandeurs d’emploi de catégorie A), contre 79 % de ceux âgés de 50 à 54 ans et 75 % des 30-49 ans. Les seniors éprouvent donc plus de difficultés à sortir du chômage.

Par ailleurs, les seniors en emploi sont très peu mobiles : ils ne changent quasiment pas de secteur d’activité d’une année à l’autre. Entre 2019 et 2020, seuls 3 % des salariés âgés de 55 à 70 ans ont changé de secteur d’activité, contre 9 % des 15-49 ans.

-Les travailleurs de + 50 ans plus souvent touchés par des accidents du travail graves et des maladies professionnelles -

En 2019, 1 400 accidents du travail ont concerné les Réunionnais de 50 ans ou plus, soit un quart de l’ensemble des accidents du travail recensés sur l’île. La fréquence de ces accidents est comparable à celle des travailleurs plus jeunes (18 accidents par million d’heures travaillées) figure 4.

Cependant, les seniors sont deux fois plus souvent touchés par les accidents graves, qui occasionnent des arrêts de travail plus longs : 94 jours en moyenne contre 54 jours pour les travailleurs de moins de 50 ans.

Les travailleurs de 50 ans ou plus sont 3,5 fois plus souvent sujets aux maladies professionnelles que les plus jeunes : 2,1 maladies pour chaque million d’heures rémunérées contre 0,6. Ils sont aussi plus souvent atteints de maladies graves : 8 fois plus souvent que les travailleurs plus jeunes (1,6 maladie pour chaque million d’heures rémunérées contre 0,2).

Cette fréquence plus élevée de maladies graves chez les seniors entraîne une durée moyenne d’arrêt de travail pour motif de maladie professionnelle plus longue que pour les moins de 50 ans (281 jours contre 250 jours).

Quel qu’en soit leur niveau de gravité, les accidents du travail et les maladies professionnelles touchent plus souvent les seniors travaillant dans le secteur de l’agriculture ou en tant qu’ouvriers.

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