Braconnage

Mayotte : des centaines de tortues massacrées pour leur chair

  • Publié le 20 mai 2023 à 12:07
  • Actualisé le 20 mai 2023 à 12:15

Le samedi 13 mai 2023, l'emblématique tortue marine de Mayotte était mise à l'honneur lors d'un événement festif. L'occasion aussi de souligner que cet animal marin est encore trop victime de braconnage dans l'île notamment pour sa viande, très appréciée de la population. Face à ce triste constat, difficilement chiffrable, plusieurs associations se mobilisent (Photo : Sea Sheperd)

Le braconnage des tortues est un phénomène tristement connu à Mayotte. Cette chasse illégale est impossible à chiffrer. "On ne peut pas surveiller tous les jours toutes les plages", déclare, désabusée, Émeline Regnault pour le Réseau échouage mahorais de mammifères marins et de tortues marines (REMMAT). De plus, "il existe des techniques de braconnage alternatives où les preuves ne seront jamais retrouvées", indique-t-elle.

"Les chiffres sont toutefois soumis à validation par un comité de pilotage", précise le REMMAT. Un comité qui, pour l'année 2022, n'a pas encore rendu son bilan. "Mais pour avoir un ordre d'idées, chaque année, le nombre de tortues mortes dû au braconnage représente 80% des recensements des tortues retrouvées mortes", précise Émeline Regnault.

Malheureusement, "les chiffres ce ne sont que les braconnages observés mais souvent il y a les carapaces pas vues, et le braconnage en mer", indique Jeanne Wagner, directrice de l'association Oulanga na Nyamba qui lutte pour la préservation des tortues.

Mais pourquoi les tortues marines attirent les braconniers ? "C'est pour leur chair", indique Jeanne Wagner. "Une viande revendue à Mayotte "car c'est très lucratif", ajoute la présidente de l'association Oulanga na Nyamba. "Les gens aiment manger de la viande de tortue."

C'est d'ailleurs lors des périodes de fêtes, de mariages ou encore pendant les vacances que cet animal est victime de chasse.

- Les plages de sous haute surveillance -

Le braconnage, un phénomène contre lequel l'association Oulanga na Nyamba lutte depuis sa création en 1998. Face à la surveillance, "la stratégie des braconniers change, ils trouvent plus de moyens pour faire disparaître les cadavres mais on sait comment ils cachent, c'est un peu le jeu du chat et de la souris", ajoute Jeanne Wagner.

Une association qui ne lutte pas seule. L'ONG Sea Sheperd France est également présente dans l'île aux parfums pour lutter contre cette chasse à la tortue. "On assure une présence sur les plages plusieurs mois de l'année et constitue des équipes de bénévoles, qui souvent se déplacent depuis la métropole".

L'ONG, comme l'association Oulanga na Nyamba, réalisent des patrouilles du crépuscule à l'aube "afin de s'assurer que les tortues venues pondre sur les plages repartent saines et sauves à la mer".

"Sur les plages que l'on surveille, on recense moins de braconnages", indique Jeanne Wagner, présidente de l'association Oulanga na Nyamba.

Des surveillances qui se font également en collaboration avec les forces de l'ordre. "Lorsqu'il y a une présence suspecte on signale et les forces de l'ordre interviennent immédiatement", déclare Jeanne Wagner.

Un dispositif rendu possible grâce à la mobilisation des différents acteurs et à la mise en place d'un pacte de sauvegarde des tortues marines signé en 2020. L'objectif de ce pacte, "la coordination et la lutte contre le braconnage, mais également la sensibilisation".

"Nos interventions permettent de braquer les projections et d'interpeller les médias sur cette problématique", note Lamya Essemlali, présidente de Sea Sheperd France. "Un dialogue avec le ministère chargé des Outre-mer s'est même récemment ouvert suite à nos actions", ajoute-t-elle.

- Des actions insuffisantes de la part de l'État -

Toutefois, même si des patrouilles sont mises en place, pour les associations, l'action de l'État pour les épauler reste insuffisante. Ce que déplore Sea Sheperd France, "c'est l'inefficacité des pouvoirs publics en matière de protection des tortues". "Nous demandons au gouvernement de mettre en place une brigade dédiée à leur protection effective sur les plages. C'est aujourd'hui la seule solution qui permettrait de sauver les tortues du braconnage."

Selon l'ONF, "durant les centaines de patrouilles réalisées sur les plages de Mayotte, nos équipes ont pu constater que les gardes du Département, censés assurer une présence et protéger les tortues des braconniers étaient absents".

"Les tortues marines sont menacées et protégées (au moins sur le papier) et font l'objet d'un Plan national d'action (PNA)", ajoute Lamya Essemlali. "Des milliers d'euros d'argent public ont été investis pour leur protection et pourtant, elles restent, dans les faits, livrées aux braconniers sur la plupart des plages", s'indigne la présidente de Sea Sheperd France.

Par ailleurs, Sea Sheperd France a lancé un recours contre le Conseil départemental et l'État français pour "carence dans la protection des tortues, du fait du mauvais usage de fonds publics qui devraient être en priorité investis à la protection effective des plages", précise Lamya Essemlali, la présidente de l'ONG.

- La lutte contre le braconnage, un enjeu public -

Seule solution pour l'heure donc, pour protéger ces tortues, sensibiliser la population. C'est en ce sens que l'association Oulangana Nyamba a organisé une fête villageoise à Mtsamboro dans le cadre du projet Nia Moja (objectif commun), visant à former des ambassadeurs de la protection des tortues.

Une association qui compte également sur l'implication directe et la responsabilisation de la population.

Autre projet, en cours actuellement, sous l'égide et les précieux conseils du Centre de soins de La Réunion Kélonia, la création d'un centre de soins à Mayotte.

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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4 Commentaires
henry
henry
1 an

Il n'y a pas très longtemps à la réunion on en mangeait d'élevage bien sûr.

Antipode
Antipode
1 an

"Crèvent la faim" à Mayotte, vraiment !? https://www.mayotte.ars.sante.fr/alimentation-0

Dom
Dom
1 an

Sur la photo: encore des tee-shirts pour un événement....
Faut arrêter avec cette pollution !

Ded
Ded
1 an

eh oui, quand des gens crèvent de faim, ils se servent dans la nature , comme ça c'est toujours fait , et pas qu'à Mayotte et pas qu'avec des tortues!