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21 ans et futur directeur des greffes : Mathys Phibel veut inspirer les jeunes réunionnais

  • Publié le 20 mai 2024 à 02:58
  • Actualisé le 20 mai 2024 à 09:21

À seulement 21 ans, Mathys Phibel vient de réussir de concours de directeur des greffes à Dijon. Originaire de Saint-André, ce jeune Réunionnais ne se voyait pourtant pas réussir aussi loin. Issu d'une famille modeste, élevé par une maman célibataire, c'est avec des a priori qu'il a tenté ce concours. Fort de la motivation de ses proches pour ne pas abandonner – laissant tomber les barrières –, c'est avec brio qu'il a obtenu le graal. Reste désormais une dernière étape importante à franchir avant d'être officiellement directeur des greffes, la prestation de serment. Un événement qui aura lieu à Dijon en octobre prochain (Photo D.R.)

Tout a débuté pour lui au Tampon. Après avoir passé sa vie dans l'est de l'île, Mathys Phibel a souhaité faire ses études de droit dans le sud.

Par la suite, il a enchaîné avec un Master à Poitiers en justice et procédure.

- La prépa talents pour préparer les concours des écoles de la fonction publique -

C'est alors que Mathys Phibel s'inscrit à la "classe Prépa Talent". Un dispositif de l'État permettant aux ultramarins et personnes issues de la classe moyenne d'effectuer une prépa pour un concours de la fonction publique, sans se soucier du loyer ou du matériel.

"Initialement, je rêvais de passer le concours de l'école nationale de magistrature", nous dit-il. "Mais je me suis vite rendu compte que sans prépa privée ce concours était extrêmement compliqué."

"Je devais donc trouver une voie me permettant à la fois de toucher la bourse et de me préparer dans des conditions optimales pour le concours, n'ayant pas forcément les moyens."

Intégrant la "classe prépa Talent", Mathys Phibel s'envole pour l'école nationale des greffes de Dijon.

"J'ai reçu un enseignement riche avec des directeurs déjà en poste. Un plus pour un métier que ne connaissait absolument pas", confie Mathys Phibel.

Poursuivant ses études, Mathys décide donc de passer le concours de directeur des greffes. Un concours de catégorie A.

- Un concours et de nombreuses questions -

"Avec ce dispositif, ce que j'ai aimé c'est ce côté très républicain. La volonté que la fonction publique se généralise et ressemble davantage à la société qu'elle sert."

Selon lui, "il y a une crise de la représentation". Pour Mathys Phibel, les personnes ultramarines ne s'identifient pas dans la fonction publique territoriale et la classe prépa talent a changé ma vision des choses".

"J'avais beaucoup d'a priori à quitter mon île."

Il l'avoue, avant de passer ce concours, Mathys Phibel s'est posé mille questions : "est-ce ma couleur de peau va être un frein à la réussite du concours, est-ce qu'ils vont aimer ma personnalité, moi qui suis une personne exubérante ?". "Ne vont-ils pas me prendre pour répondre à des quotas", s'est-il également demandé.

Des questions qui lui trottaient dans la tête alors que, arrivé dans l'Hexagone, il a "vécu un vrai choc des cultures". "D'autant que l'on m'a souvent dit que j'arrivais là avec la promotion cocotier. C'était d'une extrême violence et ça remet en cause votre enseignement."

Mais grâce au soutien de sa famille et de son ancien professeur de droit en licence, "je me suis dit j'y vais et je vais porter avec fierté ce métissage qui fait mon identité".

Face au jury, "alors que l'on était que deux métissés je me suis dit, il faut que je réussisse". Et ce fut chose faite. "Je suis 35ème sur 96. Ma place est légitime", confie-t-il fièrement, après avoir obtenu un 18,5 au grand oral.

Prochaine étape pour Mathys – et pas des moindree – sa prestation de serment en octobre prochain à l'école nationale des greffes de Dijon avant une dernière formation de 18 mois.

Pour ce moment très important pour lui et sa famille, le jeune directeur des greffes doit revêtir sa "robe". Une robe noire – similaire à celle des avocats – mais habillés d'une ceinture bleue, d'un chapeau et de gants blancs.

Une tenue faite sur-mesure par un couturier parisien. "C'est la représentation physique de notre réussite."

Mais une tenue qui a un coût. Cela peut varier de 500 à plusieurs milliers d'euros. Raison pour laquelle Mathys Phibel et sa mère ont lancé une cagnotte.

- Un message d'espoir pour les jeunes Réunionnais -

Outre ce concours auquel il a réussi, pour Mathys Phibel, le plus important est de montrer aux jeunes Réunionnais que l'on peut y arriver.

"Je sais d'où je viens. J'ai été élevé par une mère célibataire et je le dis franchement, parfois on a eu du mal à joindre les deux bouts." "C'est ça qui m'a forgé", ajoute-t-il.

"La victoire à ce concours ce n'est pas seulement la mienne, c'est aussi celle des Réunionnais."

En ayant réussi ce concours, "j'espère inspirer les jeunes réunionnais et ultramarins". "Montrer qu'il faut faire preuve d'audace et ne pas se laisser enfermer par des pensées limitantes."

Pour Mathys Phibel, la "classe prépa talent c'est permettre l'égalité des chances". "Même si elle n'est pas toujours là, à nous de montrer que ça marche."

"L'égalité des chances n'est pas qu'une simple illusion."

- Un futur "homme de l'ombre" -

Le directeur de greffe "est un peu l'homme de l'ombre de la juridiction".

Mais qu'est-ce qu'un directeur des services de greffe ? Si l'on se réfère à l'arrêté de 2016 qui décline la fonction, "on a une fonction d'animation, de coordination, de direction, de projet au sein d'une juridiction", explique Mathys Phibel.

"Concrètement, on a un volet RH où l'on est le supérieur hiérarchique des greffiers : on accepte les congés, valide la paie, le management…"

"Ensuite on a des taches spécifiques. On peut s'occuper des scellés (preuves lors des audiences), l'aide juridictionnelle, s'occuper du pôle social, du conseil des prud'hommes. Des missions diverses et variées."

Des directeurs des services de greffe que l'on retrouve autant au tribunal judiciaire, que dans les Cour d'appel, de Cassation ou même au ministère.

La Guyane, Paris, La Réunion… quelle juridiction ouvrira ses portes à Mathys Phibel ? Cela, il le saura dans quelques mois.

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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4 Commentaires
Mikl
Mikl
1 an

Bravo Mathys. Les reunionnais n'ont pas à rougir et ont toutes les qualités pour réussir. Nos jeunes doivent prendre confiance en eux. Très bel exemple de persévérance.

Abolet
Abolet
1 an

Super continu comme ça... Reuonnais pas besoin zot la peur i faut foncer...

Fleetstreet
Fleetstreet
1 an

Félicitations!

Marius
Marius
1 an

il n'y a qu'à dire : Mes RESPECTS