Lycées

Nouveau bac : 80% de la note finale déjà obtenu, le troisième trimestre a (presque) des allures de vacances

  • Publié le 4 mai 2023 à 07:22
  • Actualisé le 4 mai 2023 à 08:33

Épreuves de spécialités passées et résultats connus, contrôle continu… Les lycéens de terminale générale ont déjà obtenu 80% de leur note finale au baccalauréat. Il ne reste donc que l'épreuve de philosophie et le grand oral. Pourtant, et alors que l'année scolaire n'est pas encore terminée, les salles de classe commencent à se vider de leurs élèves.

"Pourquoi aller encore en cours, alors que je sais déjà que mon bac, je l'aurais", nous confie une adolescente. D'autant plus que les vacances de mai approchent à grands pas.

À côté d'elle, l'une de ses camarades de classe avoue elle aussi aller moins en cours. "J'ai eu des super notes à mes épreuves de spécialités." De notes qui lui assurent une mention au baccalauréat. "Alors à quoi ça sert de continuer d'aller au lycée et faire des devoirs ?", se dit-elle.

Pour ces élèves de lycées généraux, continuer d'être motivés pour ces deux derniers mois de cours est particulièrement difficile. Difficile alors qu'ils savent déjà qu'ils auront le bac en poche.

Depuis la réforme de ce sésame nécessaire pour entamer des études universitaire, le contrôle continu et les épreuves de spécialités comptent chacun pour 40% de la note finale. C'est donc 80% de cette note finale qui est déjà engrangée par les lycéen.ne.s. Le Grand oral et l'éperuve de philosophie qui seront passés en juin compteront pour les 20% restant du résultat final.

A noter que dans les lycées professionnels par contre, l'heure n'est pas encore à la détente, puisque les examens du bac professionnel n'auront lieu qu'en juin.

- Démobilisation totale -

Peu d'élèves ou des lycéens pas très attentifs… c'est ce que craignent les enseignants et syndicats pour les jours et semaines à venir.

"On craint un regain d'absentéisme", confie Willy Legros, professeur au collège Cambuston de Saint-André et responsable de la branche lycées et collèges de Se-Unsa Réunion. "Pour beaucoup, il n'y aura plus de flou sur la question de l'obtention du diplôme et sur leur orientation future. Ayant leurs notes de spécialités et leurs notes de contrôle continu, ils peuvent savoir avec certitude s'ils ont déjà obtenu le diplôme ou non", ajoute-t-il.

Willy Legros avance également l'argument de l'orientation des élèves. "S'ils n'auront leurs premières réponses que le 1er juin, les dossiers sont déjà bouclés. Il n'y a pour ainsi dire plus d'enjeux aux yeux de beaucoup d'élèves."

"Ce sont des adolescents et croire qu'ils vont préférer s'investir dans l'avenir, incertain étant donné qu'ils ne savent pas encore où ils seront, en s'investissant toujours à fond dans les apprentissages est assez naïf et relève d'une communication "hors-sol" de la part du ministère", lance le professeur du collège Cambuston. "Même s'ils sont présents, ils ne vont pas avoir la même énergie et la même motivation pour beaucoup."

Dans certains établissements, l'absence commence à se faire sentir. "Nous avons des collègues qui nous disent qu'ils n'ont même pas 30% de leur effectif", note Jérôme Motet du Snalc.

- Pas de remontée de "situation inquiétante" -

La fédération Sgen-CFDT, "nous constatons qu'à toutes les heures de cours, et pas seulement en spécialité, il y a au moins 10% d'élèves absents, et ce ne sont pas toujours les mêmes. Ce qui est plus inquiétant, c’est de retrouver ce taux également dans les classes de secondes (les élèves ayant eu des "emplois du temps plein de trous" depuis la reprise du 30 mars, le déroulement des épreuves de spécialités leurs ayant octroyé près d’une semaine de vacances supplémentaire). Une hausse de plus de 2,4 points en avril par rapport aux autres mois, indique le syndicat.

De son côté, le Rectorat de La Réunion n'a pas de chiffres sur le taux d'absentéisme. "Les chefs d'établissements n'ont pas remonté de situation inquiétante", précise les services de l'Académie de La Réunion. "Les élèves de terminale continuent à aller en cours pour préparer les épreuves de philosophie et surtout du Grand Oral.

Les lycéens des autres niveaux sont également en cours. Les élèves de première préparent leurs épreuves anticipées qui se dérouleront également en juin."

- Le bac Blanquer pointé du doigt -

Depuis la mise en place de la réforme du baccalauréat instaurée par l'ex-ministre Jean-Michel Blanquer, les syndicats mettent le ministère en alerte sur l'absentéisme des élèves de Terminale après le passage d'épreuves qu'ils estiment arriver trop tôt dans l'année scolaire.

La note du bac repose sur du contrôle continu et sur des épreuves terminales (le français écrit et oral, passé en classe de première, les épreuves de spécialité, la philosophie et le grand oral, tous passés en Terminale). Les élèves connaissent à ce stade 80% de la note finale de l'examen.

François Bayrou, ancien ministre de l'Éducation, s'est lui aussi exprimé sur le sujet, interrogé sur Franceinfo. "La réforme du bac, je l'ai dit à Jean-Michel Blanquer, a apporté beaucoup de complexité dans l'idée que les élèves et leurs familles se font des études secondaires".

Pour les professionnels de l'éducation et syndicats, "le fait que les examens soient si tôt dans l'année est problématique". "C'est le calendrier du baccalauréat qui malheureusement entraîne cette situation", souligne Jérôme Motet du Snalc.

"Il est évident que d'organiser des épreuves de spécialité en mars avec des résultats très tôt en avril entraîne une déperdition des élèves qui savent déjà s'ils ont le bac", souligne Guillaume Lefèvre, président du Snalc Réunion.

Le déroulement des épreuves de spécialités "a entraîné la suppression d'un nombre conséquent d'heures de cours depuis la rentrée du 27 mars dernier, ce qui a engendré une désorganisation des emplois du temps et une "ambiance de fin d’année"", déclare la fédération des Sgen-CFDT.

- Conditions de travail "dégradées" -

"À cela s’ajoute la nouveauté pour les élèves de Terminale d’avoir clôturé leurs dossiers Parcoursup, déjà leurs notes de spécialités avec tous les effets dévastateurs que cela peut entrainer et donc forcément d’être moins motivés pour continuer à suivre les enseignements de spécialités de manière assidue", ajoute le syndicat.

La Fédération des Sgen-CFDT avait déjà alerté le ministère sur ces épreuves "qui risquaient de désorganiser les services des enseignants et impacteraient considérablement l'absentéisme des élèves. Aucune réaction n'a eu lieu au ministère". "Tout est centré sur la passation et l'obtention du baccalauréat. Les conditions de travail des enseignants sont dégradées et l'acquisition des compétences des élèves n'est pas prioritaire."

"Mais surtout cela montre les limites de la tendance qu'il y a actuellement dans notre système éducatif", ajoute Willy Legros de l'Unsa. "Quelle est la valeur et la place du bac maintenant", se questionne Jérôme Motet du Snalc. "Il est dévalorisé et déconsidéré. Ce n'est plus qu'un permis pour aller au-delà et surtout un pass pour Parcoursup."

Mais alors, comment faire pour éviter ce décrochage anticipé ? "Le suivi de l'absentéisme se fait toujours de la même façon", précise Willy Legros. "Un regard particulier est posé sur ces élèves. Mais le problème de l'absentéisme ne relève pas que de l'école mais aussi des familles", souligne-t-il.

"Évidemment, il y a beaucoup de communication sur l’importance des derniers chapitres dans les différentes spécialités pour les futures études supérieures, car l’idée de la réforme était que l’orientation soit faite dans la continuité des enseignements de spécialités", ajoute le syndicaliste.

"Les enseignants doivent redoubler d'efforts pour maintenir les élèves impliqués. Il est d'ailleurs difficile de leur en tenir rigueur quand on voit le rythme infernal qu’on leur impose d'août à mars", indique le Sgen-CFDT.

- Le troisième trimestre compte pour 40%de la note -

Pour autant, "la présence en cours est obligatoire, à tout moment de l'année", tient à rappeler le ministère de l'Éducation nationale.

"Les élèves doivent poursuivre leurs efforts autour des évaluations des disciplines du tronc commun qui comptent dans 40% des résultats finaux", précise le ministère. "Ils doivent maintenir leur investissement en enseignements de spécialité dans l'objectif de préparer leur épreuve du grand oral, la philosophie et ainsi, leur entrée dans le supérieur."

Le ministère rappelle d'ailleurs encore l'importance de la présence des élèves. "Les appréciations du Livret scolaire du lycéen (LSL) rendront compte pour les réunions du jury de délibération de juillet, de l’assiduité, du travail, des progrès et de la capacité à réussir de chacun sur l’ensemble de l’année, troisième trimestre compris." " Ces éléments, qui incluent l’ensemble des notes jusqu’à la fin de l’année scolaire, seront également pris en compte dans la phase complémentaire de Parcoursup", met en garde le ministère de l'Éducation nationale.

Calendrier des épreuves :

- Épreuve de philosophie : 14 juin 2023
- Épreuve anticipée de français (écrit) : 15 juin 2023
- Grand oral : du 19 au 30 juin 2023
- Épreuves écrites d'enseignement général du baccalauréat professionnel : du 13 au 15 juin et les 22 et 23 juin 2023.

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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2 Commentaires
CHABAN
CHABAN
1 an

Et que dire des absences de professeurs ? Et ça depuis février ?

Ded
Ded
1 an

Réforme complètement idiote voulue par le fossoyeur de l'Education national Blanquer ( ancien adjoint de Darcos le prof tricheur , condamné pour ça , ce qui ne l'avait pas empêché d'être ministre de l'EN sous Sarko!) et poursuivie par la marionnette actuelle qui ne fait que relayer ce que veut Macron, sur la même longueur d'ondes!.
L'idée , étant de dévaloriser complètement le bac , de vider les lycées bien plus tôt ( ce qui est en train de se passer) et de pouvoir dire , tranquillement que les profs n'ont plus de boulot tout en étant payés , donc pas besoin de les augmenter ( on parie que ça va être le discours officiel , très rapidement