Presque 15 jours après Garance, les sinistrés se relèvent petit à petit du passage de ce violent cyclone sur La Réunion. Un événement qui a laissé des traces bien au-delà des dégâts matériels. Pour beaucoup de personnes, cette épreuve psychologique a été marquée par la peur, le stress et l'angoisse de la perte. Face à cette détresse, plusieurs institutions ont mis en place des dispositifs d'écoute et d'accompagnement (Photo : www.imazpress.com)
Le vendredi 28 février 2025, dans plusieurs foyers, le cyclone Garance a semé la terreur. À Saint-André, une famille raconte comment elle a dû se réfugier à cinq dans une buanderie, alors que le vent menaçait d'arracher leur toit. "Le cyclone est entré dans la maison. Mon mari tenait la façade pour éviter qu'elle ne s'effondre. On a cru qu'on allait mourir", confie la mère de famille, encore sous le choc. Aujourd'hui, elle et son mari sont en arrêt de travail, incapables de reprendre une vie normale après cet épisode cyclonique.
Erick Fontaine, administrateur de la Confédération nationale du logement (CNL) rapporte des témoignages poignants : "Certains me supplient de leur trouver un logement, ils ont peur de rester chez eux. Un enfant de 7 ans m’a dit : ‘Mon logement est cassé’. Les gens ont frôlé la mort et ils déplorent le manque d'écoute". Selon lui, de nombreuses personnes ne sont même pas informées de l’existence des dispositifs d’accompagnement psychologique.
Pourtant, des dispositifs existent bel et bien. Pour tenter de répondre à cette détresse, plusieurs structures ont renforcé leurs services d'écoute et de prise en charge psychologique.
- Une cellule psychologique mise en place par l'ARS -
L’Agence Régionale de Santé (ARS) et la Cellule d’urgence médico-psychologique (CUMP) ont déployé un dispositif spécifique pour les sinistrés. Arnaud Pouly, directeur de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DEETS), insiste sur l’importance de se tourner vers ces professionnels spécialisés pour ceux qui ressentent un besoin d’accompagnement.
La CUMP Océan Indien a ainsi été déclenchée par le CHU, siège du SAMU, le 28 février dernier. Afin de ne pas saturer le dispositif et pour permettre une réponse efficiente aux besoins de la population, ce numéro est disponible uniquement pour les personnes impactées psychiquement suite au passage du cyclone Garance. "En cas de demande directe d’un patient via un appel au SAMU, la CUMP zonale est mobilisable via le 0262 74 32 75, disponible du lundi au vendredi de 08h30 à 16h00", précise l'ARS.
Une équipe mobile médico-psychologique est également amenée à se déplacer au sein des communes les plus impactées pour organiser des prises en charge en présentiel et faciliter l’accès aux soins pour la population.
- L'éducation nationale à l'écoute des élèves et du personnel -
Du côté du rectorat, un questionnaire a été envoyé aux 22.000 personnels de l’Académie dès le vendredi suivant le cyclone pour recenser leurs besoins. Parmi les 3.250 réponses reçues, 150 personnes ont demandé à être contactées, et 20 ont exprimé un besoin d’accompagnement psychologique. Des assistants sociaux et des cellules d’écoute ont été mobilisés pour les accompagner.
Concernant les élèves, les écoles ont été encouragées à dédier un temps d’échange libre en classe dès la reprise des cours ce lundi, afin d’aider les jeunes à verbaliser leurs émotions et d’identifier les enfants en détresse. "Si certains élèves expriment le besoin d'un suivi plus rapproché, nous conseillerons aux parents de les faire accompagner par un professionnel de santé", explique le rectorat.
- Université : un soutien psychologique renforcé -
Le Service santé étudiante (SSE) de l'Université de La Réunion a également renforcé son dispositif. D’ordinaire accessible sur rendez-vous, il a été assoupli pour accueillir, en urgence, tout étudiant en détresse psychologique.
"Les étudiants peuvent venir en journée, sans rendez-vous, afin de consulter médecins, psychologues, assistantes sociales et infirmières, sans avance de frais, sur les sites du Moufia et du Tampon", précise la responsable du SSE, Marie Manzano. Une permanence est également assurée à Terre-Sainte.
En complément, le Crous propose une plateforme d’écoute gratuite et anonyme, accessible 24h/24 et 7j/7, via le 0800 73 08 15.
- Une souffrance silencieuse, un besoin de mieux communiquer -
Malgré la mise en place de ces nombreux dispositifs, beaucoup de sinistrés ignorent leur existence. "Il n’y a pas eu assez de communication sur la cellule psychologique", déplore Erick Fontaine de la CNL. Dans l’urgence de la gestion post-cyclonique, l’information sur ces aides peine parfois à atteindre ceux qui en ont le plus besoin.
Alors que les dégâts matériels sont encore visibles, les blessures psychologiques, elles, sont plus silencieuses, mais tout aussi profondes.
Face à l’ampleur de la détresse post-Garance, une prise en charge durable et une meilleure diffusion de l’information auprès de la population semble nécessaire.
vg/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com