Ce 25 novembre, c'est la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Au Tampon, l'adjudante-cheffe Myriam Barreau, est depuis 2021 cheffe du groupe Violences intrafamiliales (VIF), qui prend en charge les victimes. (Photo photo Sly/www.imazpress.com)
Avec 26 ans de métier au sein de la gendarmerie, Myriam Barreau est aujourd'hui "la garante du respect des droits des victimes" au sein de sa caserne.
Alors que la prise en charge des victimes de violences sexistes et sexuelles est réguliÚrement critiquée, la gendarmerie nationale a créé ces groupes VIF. "Il y a eu des loupés, la gendarmerie a mis le paquet pour éviter que des situations soient mal prises en compte. Il faut qu'on soit vigilants", souligne Myriam Barreau.
"Il a fallu que la gendarmerie se réorganise, et spécialise certains personnels, pour avoir certains réflexes sur la prise en charge" particuliÚre que demandent les victimes. Ces gendarmes spécialisés se concentrent d'ailleurs uniquement sur cette cause. "Il ne faut pas ajouter un traumatisme au traumatisme", affirme l'adjudante-cheffe.
13 agents sont formĂ©s au sein de la caserne du Tampon, sur les trois brigades de proximitĂ© prĂ©sentes dans la commune.Â
- Un meilleur accueil des victimes de violences intrafamiliales -
"DÚs lors qu'un chargé d'accueil détermine que la victime est la dans un cas de VIF, on les prend à part pour surtout pas qu'elle ait à expliquer la raison de sa venue. C'est plus intime, ça aide à libérer la parole", note Myriam Barreau.
"L'objectif est ensuite d'évaluer le danger de la situation qu'on nous présente, en faisant un questionnaire. On pose des questions simples, pour savoir si la victime est isolée, si elle a déjà été victime de violences auparavant, s'il y a des antécédents concernant son agresseur...Tout ça vient déterminer la vulnérabilité", détaille-t-elle.
C'est ensuite l'heure de la déposition. "Pour ne pas se rater, on a un questionnaire qui va reprendre toutes les questions précédentes, en approfondissant. On va demander s'il y a eu des violences psychologiques, économiques, sexuelles...", liste-t-elle.
"On a un devoir de renseigner les victimes sur les associations qui peuvent prendre le relais, mais aussi sur les dispositifs de protection qui existent, comme le bracelet anti-rapprochement, le téléphone grave danger...On montre aux victimes les possibilités qui existent pour les protéger."
- L'emprise, un phénomÚne de plus en plus connu -
"C'est un phénomÚne terrible, ça caractérise les violences psychologiques et morales", déplore Myriam Barreau. "C'est des verrous pour sortir du couple."
Il n'est pas rare que des femmes victimes de violences ne retournent auprÚs de leur bourreau. "Il y a plusieurs départs avant que la victime ne quitte définitivement son partenaire violent", rappelle la gendarme.
Elle rappelle par ailleurs que c'est dans ce cadre que le "pack nouveau dĂ©part" a Ă©tĂ© mis en place dans le sud de l'Ăźle, permettant aux victimes d'obtenir une aide financiĂšre pour se mettre Ă lâabri. "C'est un accompagnement sur-mesure, pour s'adapter aux besoins de la victime. Ce projet est pilotĂ© par la CAF, et nous on a un rĂŽle de dĂ©tecteur pour faire le lien", explique l'adjudante-cheffe.
Certaines personnes refusent d'ailleurs de porter plainte. "La femme peut ĂȘtre entendue, mais sans ĂȘtre prĂȘte Ă porter plainte. On va diligenter une enquĂȘte, et le procureur va dĂ©cider des suites pĂ©nales. Mais certaines, aprĂšs plusieurs heures de dĂ©position, ne veulent pas porter plainte", souligne-t-elle.
"Il faut qu'on arrive tout de mĂȘme Ă rĂ©cupĂ©rer leur parole. On se rend compte parfois qu'avant d'arriver chez nous, il y en a eu des Ă©pisodes de violences...", souffle-t-elle. "Elles ont parfois tendance Ă banaliser, une claque, des insultes...C'est comme ça que l'emprise s'installe, et je leur rappelle que rien de tout ça n'est normal."
- Les enfants, victimes collatérales -
Les enfants sont par ailleurs de plus en plus pris en compte dans ces cas de violences conjugales. "Ils sont de plus en plus entendus dans le cadre de ces procĂ©dures, et il y a une prise en charge psychologiques de ces mineurs", assure Myriam Barreau.Â
Une prise en charge essentielle, alors que chaque année, les féminicides font des dizaines d'orphelins traumatisés d'avoir vu leur pÚre tuer leur mÚre ou découvert son corps. Des protocoles féminicide organisent leur prise en charge en urgence mais ne sont pas encore étendus sur le territoire.
En 2023, 124 enfants ont ainsi perdu leur mÚre dans un féminicide. Parmi eux, 22 étaient présents et deux ont découvert le corps. En 2022, ils étaient 148, dont 38 témoins, a recensé le collectif féminicides par compagnon ou ex.
"Je pense qu'il y a une prise de conscience sur ce problÚme, qui concerne aussi des hommes, qui représentent 15% des victimes de violences conjugales", estime Myriam Barreau. "Il ne faut plus qu'il y ait de loupés, à n'importe quelle heure de la nuit, la victime sera accueillie ici", insiste-t-elle.
La Réunion est le quatriÚme département de France le plus violent envers les femmes aprÚs la Seine-Saint-Denis, la Guyane et le Pas-de-Calais.
Selon les chiffres des forces de l'ordre, en moyenne 12 femmes victimes de violences se sont présentées chaque jour en 2023 dans un commissariat ou une brigade de gendarmerie de La Réuion pour porter plainte.
âą Si vous ĂȘtes victimes de violences conjugales, vous pouvez contacter le 3919, le numĂ©ro national de rĂ©fĂ©rence dâĂ©coute tĂ©lĂ©phonique et dâorientation Ă destination des femmes victimes de violences. Des conseillers sont disponibles 24h/24. La RĂ©union est le quatriĂšme dĂ©partement français en matiĂšre de violences intrafamiliales.
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On a beaucoup progressé dans le domaine de la prise en charge des victimes ces derniÚres années. Il était temps !
Bravo pour votre investissement Ă©clairĂ© sur ce flĂ©au adjudante-cheffe đ