Les ordonnances seront rapidement applicables

Loi Travail - 36 mesures qui divisent les syndicats en Métropole et à La Réunion

  • Publié le 1 septembre 2017 à 02:59

Le gouvernement d'Édouard Philippe levait enfin le secret ce jeudi 31 août 2017 autour des cinq ordonnances censées réformer le Code du Travail. Le projet prévoit 36 mesures. Les leaders de la CFDT et de FO, Laurent Berger et Jean-Claude Mailly ne participeront pas à la manifestation du 12 septembre à l'appel de la CGT. Le même jour, dans l'île, la CGTR invite à descendre dans la rue à Saint-Denis afin de s'opposer à cette réforme. Les syndicalistes locaux commentent, eux, ces annonces version XXL. (Photo d'archives de la manifestation contre la loi El Khomri en septembre 2016)

 

La conférence de presse du Premier ministre, Édouard Philippe, et de sa ministre du Travail, Muriel Pénicaud, se tenait  à l’Hôtel de Matignon. Première mesure dévoilée : le plafonnement des indemnités prud’homales à 20 mois de salaire au bout de 30 ans d’ancienneté pour un salarié licencié sans cause réelle ni sérieuse. Le plancher passe de six à trois mois de traitement pour un employé avec deux ans passés dans une entreprise et à un mois en dessous de deux ans.

Le délai pour saisir la juridiction passe de 24 mois à 12 mois. Les indemnités légales de licenciement augmentent de 25 %. Il sera possible pour un chef d'entreprise de discuter ce tout ce qui ne relève pas de la branche avec ses salariés. Et ce sans la présence d’un délégué syndical. Le vote à la majorité servira à conclure un accord. Une disposition valable pour les sociétés de onze à vingt salariés. Celles employant de 20 à 50 personnes négocieront, elles, avec le délégué du personnel non mandaté.

Les instances représentatives du personnel vont fusionner via un accord d’entreprise. Ces structures seront désormais au nombre de deux avec, d’une part, les délégués syndicaux et, d’autre part, les délégués du personnel, le comité d’entreprise, d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Ce conseil d’entreprise aura la possibilité de négocier des accords sans les délégués syndicaux. Il disposera d’un droit de veto sur les sujets touchants à la formation professionnelle et à l’égalité hommes-femmes.

À propos du licenciement économique, seule la situation financière d’une entreprise ayant une activité en France sera désormais prise en compte. Sa situation au niveau international s’il s’agit d’une multinationale ne le sera plus. Un licenciement lié au refus d’un accord collectif par le salarié ne s’effectuera plus sous un régime apparenté à celui du licenciement économique. Enfin, le gouvernement donne plus de latitude aux sociétés mais les prérogatives exclusives des branches sont conservées.

- La mobilisation XXL -

Elles gardent la possibilité de négocier certaines modalités de contrats cours et l’extension du recours au contrat de chantier. Ces ordonnances font la part belle aux PME. Elles laissent aux entreprises le pouvoir de négocier le niveau des primes. Cela relevait jusque-là des branches professionnelles. Les caractéristiques des CDD (durée, nombre de renouvellement, carence...) pourront, elles, être négociées dans la branche, alors qu'elles étaient fixées uniquement par la loi auparavant. La grogne vis-à-vis de ces mesures risquent donc de gagner le pays et les rues.

La mobilisation s'annonce donc XXL. Y compris à La Réunion où la CGTR souhaite mobiliser un maximum contre ces annonces. Le secrétaire général de la CGTR-BTP, Jacky Balmine, réagit à ces différentes mesures. Premier élément dans son viseur : les changements liés aux prud'hommes. "Ce conseil de prud’hommes limité, c'est une injustice. Un patron truand va maintenant savoir que même s’il vole son salarié sur plusieurs années, ce dernier ne recevra que six mois de salaires s’il est condamné pour licenciement sans cause réelle", lance-t-il.

Le syndicaliste ne voit pas l’utilité de changement qu’il juge "excessif". Le référendum d'entreprise ne lui convient pas. "C’est comme couper l’organisation syndicale de son représentant. On élimine les syndicats. Quel salarié osera affronter son patron", complète-t-il. La fusion des instances représentatives ne lui plaisent pas non plus. Selon lui, la précarité risque de s’aggraver à cause des nouvelles caractéristiques du CDD. "En tant que salarié, ces ordonnances sont une motivation pour que notre mobilisation soit réussie le 12 septembre. On s’attendait à cette loi XXL", glisse le leader syndical.

Le secrétaire général de Force ouvrière, Éric Marguerite, commente la décision de sa confédération nationale de ne pas défiler le 12 septembre. Alors que FO participait activement à une quinzaine de manifestations contre la loi Travail portée par l’ex-ministre Myriam El-Khomri en 2016. "Le 12, nous n'appellerons pas à la manifestation. Nous n’avons pas mandat à La Réunion pour appeler à la mobilisation.  Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas d'autres manifestations. Ce n’est pas en manifestant ici que l’on changera les annonces du gouvernement. Il faut une étude fine pour voir quels impacts il y aura sur les salariés", précise-t-il.

- Occasion ratée -

Le syndicaliste juge la position prise par Jean-Claude Mailly. "Il y a eu une vraie concertation avec plus de 48 réunions avec le gouvernement. Contrairement à la précédente loi Travail. Nous allons regarder dans le détail ces mesures et essayerons de faire mieux. Il y aura encore des négociations à mener", ajoute-il. Lui aussi analyse cette réforme à venir du Code de travail. Le raccourcissement des délais de saisine du tribunal prud’homal ne le dérange pas. Il qualifie de "bonne chose" l’augmentation de l’indemnité légale de licenciement.

Cependant, le plafonnement l’interpelle. "C’est une régression. On ne peut pas dire que c’est une bonne mesure. On donne d’un côté mais on enlève de l’autre." La réglementation envisagée autour du CDD le heurte également. "La négociation des primes se fera à la tête des salariés. Cela n’appartient pas aux entreprises. J’aurai préféré que cela relève de la branche." La fusion des instances représentatives constituent selon lui une occasion ratée de renforcer le dialogue social. Car le référendum d’entreprise présente un risque pour l’île en raison d’un secteur économique composé à 95 % de très petites entreprises.

Jean-Pierre Rivière, secrétaire général de la CFDT, aurait également pu donner son avis en évoquent ces différents sujets. Mais impossible de le joindre malgré nos (multiples) sollicitations. On aurait pourtant bien aimé avoir son sentiment sur la décision de Laurent Berger de ne pas manifester le 12 septembre.

ts/www.ipreunion.com

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