S'il était connu que le plastique impactait fortement la faune marine, une nouvelle étude menée par des chercheurs australiens enfonce le clou. Relayée par l'association Globice à La Réunion, elle alerte sur les risques liés à la pollution des océans sur les espèces marines après avoir analysé plus de 655 études sur le sujet. Les débris plastiques, notamment de type film comme les sacs plastiques, sont mortels pour les cétacés et les tortues. (Photo : Kelonia)
Le problème des déchets plastiques ne date pas d'aujourd'hui, et depuis plusieurs années les chercheurs tentent d'alerter la population sur les risques liés à la présence du plastique dans l'environnement. Aujourd'hui les chercheurs tirent - une nouvelle fois - la sonnette d'alarme face à cette problématique qui touche plus particulièrement la faune marine. En cause, une nouvelle étude australienne qui a décortiqué plus de 655 études sur le sujet et analyse précisément l'impact qu'a le plastique sur les espèces des océans, à commencer par les baleines, les dauphines et les tortues. La Réunion est donc plus que jamais concernée.
"En analysant les résultats de 655 études sur les débris marins, les chercheurs australiens se sont attachés à...
Publiée par Globice Réunion sur Mercredi 13 janvier 2021
- Le plastique ce n'est pas fantastique -
Le plastique est utilisé partout, chaque jour et ne finit pas toujours dans les bacs dédiés au recyclage. La mauvaise gestion des déchets et les limites du recyclage conduisent le plastique à terminer dans nos océans.
D'après une étude allemande publiée en 2018, relayée par le site Mr Mondialisation, 100 millions de tonnes de déchets plastiques ont fini dans la nature, soit plus d'un tiers des déchets plastiques produits. Parmi ces déchets plastiques, la majorité sont du plastique à usage unique. Selon un rapport du WWF, si nous ne trouvons pas des solutions avec des effets bénéfiques à long terme, l'océan contiendra 1 tonne de plastique pour 3 tonnes de poissons d'ici 2025.
- Ennemi mortel des espèces marines -
Selon l'association The Sea Cleaners (Nettoyeurs de la Mer), 100.000 mammifères marins sont tués chaque année par la présence de déchets plastiques. La nouvelle étude menée par l’agence de recherche australienne CSIRO Oceans and Atmosphere, et publiée dans la revue Conservation Letters, s'est basée pour sa part suur les résultats de 655 études sur les débris marins. L'ennemi numéro 1 : les sacs en plastique, en effet ce type de déchet plastique est le plus mortel pour les cétacés et les tortues de mer.
Les espèces marines meurent suite à des blocages gastro-intestinaux, des perforations et de malnutrition. Dans les cas où le plastique ne termine pas dans l'estomac de ces animaux, ces derniers sont pris au piège par les déchets, les filets. Les animaux marins ont ensuite du mal à respirer et s'infligent des blessures en essayant de se libérer.
Jean-Marc Gancille, responsable sensibilisation à Globice, détaille ces risques, à commencer par l'ingestion. "Outre l’obstruction directe, la dégradation des macro-plastiques par la digestion libère des nanoparticules pouvant entraîner des modifications métaboliques majeures néfastes pour la santé de l’individu et, à terme, constituer une menace à l’échelle de la population."
Deuxième impact, l'enchevêtrement dans des macro-déchets, qui peut être fatal pour l'animal. Celui-ci risque de mourir "par noyade, traumatisme aigu avec hémorragie sévère, amputation, etc. Les lésions varient selon la localisation du déchet sur le corps de l’animal, le temps d’enchevêtrement… Dans certains cas d’enchevêtrements, l’animal va éprouver des difficultés à se mouvoir, entrainant une dépense énergétique accrue pour nager, se nourrir, interagir avec ses congénères, fuir ses prédateurs… S’en suit une sous-alimentation pouvant dans certains cas provoquer la mort."
Depuis 2018, chaque année, plusieurs espèces marines échouent sur notre île avec des problèmes de santé lié au plastique. En 2020, Kélonia a examiné le corps d'une tortue morte échouée à l'entrée du port de Saint-Gilles, elle avait ingurgité 60 grammes de plastique, l'intoxication lui a été fatale. La même année, le centre de soins a pris en charge 35 tortues, 28 d'entre elles étaient atteintes de pathologie liée à la pollution plastique.
Mathieu Barret, responsable du centre de soin chez Kélonia, souligne la menace qui pèse sur une espèce particulière de tortue marine : "90 % des tortues impactées sont des tortues caouannes, cette espèce de tortues se développe au large des côtes réunionnaises. Elles sont en voie d'extinction et cette menace plastique ajoute un problème à leur survie..."
- La menace des débris de pêche -
Mais il n'y a pas que le plastique qui menace la faune marine, la pêche aussi laisse des débris mortels en mer. Ce sont particulièrement les tortues qui sont touchées par ce type de déchets, elles s'emprisonnent dans les filets de pêche et les hélices des bateaux infligent aussi des blessures mortelles à leur carapace.
Vendredi 15 janvier Kélonia a d'ailleurs pris en charge une tortue prise au piège comme nous le raconte le responsable du centre de soin. "Une tortue verte a été récupérée grâce à un club de plongée, cette tortue avait avalé du fil et celui-ci avait aussi entouré sa nageoire. Le problème quand cela arrive, c'est que le fil cisaille la nageoire, cisaille l'os. Donc pour que la tortue puisse vivre, on lui a amputé la nageoire".
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Du côté de Globice aussi on recense quelques mauvaises souvenirs. "13 cas ont été recensés entre 2007 et 2019, principalement dans des lignes de pêche. Outre trois baleines à bosse, un dauphin long bec et un dauphin d’espèce indéterminée, la majorité des cas concerne le grand dauphin de l’Indo-Pacifique (8 cas dont 2 juvéniles), une espèce particulièrement vulnérable qui occupe un habitat largement emprunté par les activités de pêche côtière" indique Jean-Marc Gancille.
- Le rôle des autorités -
Certains pays commencent à réglementer l'utilisation du plastique à usage unique mais ils ne sont pas assez nombreux. La France fait partie de ces rares pays qui ont franchi le pas. Le 20 décembre 2020, la loi anti-gaspillage est adoptée par le Parlement. Objectifs de cette loi : "changer le modèle de production et de consommation afin de limiter les déchets et préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat". L'un des axes phare de cette loi est la sortie du plastique jetable d'ici 2040.
Pour Kélonia le rôle des autorités est une solution clé. "Un bon plastique est un plastique qui n'existe pas ! Il faut des décisions fortes de la part des pouvoirs publics, la loi sur le plastique est bien mais malheureusement des industriels la contournent, en précisant que c'est du plastique réutilisable".
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- L'importance de la sensibilisation -
De nombreux acteurs se mobilisent déjà à La Réunion pour limiter les déchets plastiques et sensibiliser. "Tous rappellent l'importance des gestes de tri, l'enjeu du recyclage et du réemploi et surtout celui d'une baisse de nos niveaux de consommation de produits utilisant du plastique puisque cette matière se trouve être très peu recyclée au final" remarque Jean-Marc Gancille.
Pour Kélonia la prévention face à ce fléau passe par les choix de chacun de nous. "Lorsque l'on fait nos courses par exemple, on peut réduire notre consommation de plastique. On a tous ce pouvoir : privilégir les gourdes réutilisables, les barquettes en verre...". Il ajoute aussi : "au final, la meilleure solution serait de produire moins de plastique, ou de la réduire drastiquement".
A La Réunion, des journées "ramassage de déchets" sont menées par certaines associations. Ces opérations sont bénéfiques pour réduire le risque de retrouver des déchets plastiques dans l'estomac des espèces marines. Kélonia souligne aussi l'importance de la communication dans la protection de ces espèces : "plus on communique autour de ce problème sur divers supports, plus ont touchera une cible grande" estime Mathieu Barret.
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