La filière fleurs mise à mal par les intempéries

Une Saint-Valentin (presque) compromise pour les horticulteurs péi

  • Publié le 12 février 2024 à 15:35

Le 14 février est la date phare pour les professionnels de l'agriculture et les fleuristes. Une rentrée d'argent importante qui risque d'être mise à mal par les récentes intempéries. Les agriculteurs pensent à l'import pour répondre à la demande (Photo rb/www.imazpress.com)

"Sur 100% il y aura peut-être un 20% voire 30% des fleurs péi sur les étalages pour la Saint-Valentin", confie Jean-Luc Thiburce horticulteur.

Les dégâts du cyclone Belal et de la tempête Candice ont provoqués de pertes énormes de marchandises. Le vendeur de fleurs avoue : "il ne reste plus rien, il faut remettre la main à la terre et tout recommencer".

Malheureusement pour le maraîcher, il est déjà trop tard pour repartir de zéro pour avoir une récolte à la Saint-Valentin.

Sa seule solution : "on va importer un peu de roses pour le 14 février mais vraiment pas beaucoup". Lui qui a l'habitude d'importer des fleurs, ne compte pas changer les quantités malgré la fête.

"Il y a beaucoup de risque à prendre une grosse quantité de fleurs, parfois ça n'arrive pas à temps ou alors si le stock n'est pas liquidé", affirme-t-il. Regardez

La même inquiétude se retrouve chez Danylo Taïlamé président du mouvement producteur fleur péi. "C'est vrai, il n'y a aura aucune rose pour la Saint-Valentin", se désole-t-il.

Avec le cyclone ayant déclenché une alerte violette, il a fallu procéder au débâchage des serres. Résultats des courses : "les roses qui ont tenues ont de trop petites tiges, elles sont invendables en l'état", explique le producteur.

Concernant le reste de ses fleurs c'est le même constat : il ne reste plus rien. Les fleurs plein champs ont-elles aussi été cassées. "Peu importe le type de fleur, j'ai tout perdu", répète-t-il. Pour le moment tout a été laissé sur place : les fleurs sont couchées, les fleurs exotiques sont cassées et certaines roses sont décimées.

"Un de nos clients nous a demandé environ 7.000 roses pour la Saint-Valentin", dit Danylo Taïlamé. Une commande qu'il ne peuvent malheureusement pas honorer. "On peut éventuellement attendre une récolte pour la fête de mères", suppose le vendeur de fleurs. Pour le moment, le producteur a demandé un délai supplémentaire jusqu'aux prochaines fêtes, le temps de "remettre la production en place".

"La production de roses de Saint-Valentin va être décalée en avril", annonce Eric Lucas responsable de la diversification végétale à la chambre d'agriculture. Ce qui n'est pas pour arranger certains horticulteurs de l'île.

"La Saint-Valentin et la fête des mères sont les deux fêtes les plus attendues pour ces planteurs", rappelle-t-il.

"Ils vont faire pitié et c'est problématique pour eux dans la mesure où ils ont tout perdu", s'inquiète le responsable. Il ajoute : "les gens ont déjà oublié le cyclone et attendent leurs roses".

En ratant cette fête, les horticulteurs vont perdre leur plus gros chiffre d'affaires, mais aussi une certaine crédibilité. Le responsable le confirme : "beaucoup de clients avaient eu confirmation avec le producteur de la livraison de roses péi. Mais en jouant la carte du local ils vont se retrouver sans rien à proposer".

- "Environ six millions de tiges de roses importées -

Malheureusement pour les vendeurs de roses, il est trop tard pour se tourner vers les importateurs. "Il faut compter un mois pour passer une commande et les importateurs sont débordés", soutient le membre de la chambre d'agriculture. Il renchérit : "les roses viennent du Kenya et les importateurs sont déjà en plein rush".

On peut compter quatre à cinq grosses sociétés qui importent les roses sur l'île car l'acheminement est long. "Les roses doivent remonter pour redescendre par avion-cargo", explique Éric Lucas.

Un premier avion emmène les roses fraîchement coupées vers les Pays-Bas pour qu'une partie de la marchandise soit vendue. Ensuite elle redescend vers la France pour acheminer la marchandise par camion ou par avion-cargo du côté de Rungis. Finalement elle sera placée dans la soute de l'avion avant de venir à La Réunion.

"Selon la douane, environ six millions de tiges de roses sont attendues sur le territoire pour les prochains jours", précise le responsable de la diversification végétale. La marchandise attendue est composée de bottes de 5 ou de 20 roses, majoritairement rouges, en sachets.

"Elles seront mises en chambre froide pour la Saint-Valentin et peuvent être conservées pendant quinze jours à un ou deux degrés", indique ce dernier. Il fait la nuance : "la rose péi a l'avantage d'être coupée la veille et vendu le lendemain".

En somme elle tient plus longtemps dans les foyers réunionnais contrairement à celle du Kenya. "Ce n'est pas terrible si on veut prouver qu'on aime longtemps", s'en amuse le membre de la chambre d'agriculture.

- Les fleuristes cherchent des solutions -

Du côté des fleuristes il y a deux écoles : les sereins et les incertains. "J'ai effectivement un petit fournisseur dans les hauts de Saint-Denis qui a subi pas mal de dégâts et il m'a confié qu'il n'aura pas du tout de roses", se désole la fleuriste de Fleurs de jade pour le planteur.

Elle ajoute : "c'est vraiment dommage parce qu'il a de magnifiques roses avalanches qui sont bien ouvertes. Mais la grandeur des tiges et le feuillage ne suivent pas". 

Mais la fleuriste est préparée : "pas de stress pour nous, on a l'habitude". Elle a décidé de faire confiance aux roses du Kenya par "choix stratégique".

"Si les roses ne sont pas calibrées, c'est-à-dire que la grosseur du bouton de la fleur n'est pas règlementaire et la longueur de la tige n'attend pas les 50 cm, ce ne sont pas de bonnes tiges", explique-t-elle. Pour Fleurs de jade, la rose est un tout. Le feuillage est tout aussi important que la rose.

Elle affirme : "si la rose est belle mais que les feuillages sont abîmés ça ne fait pas joli. Pareil si vous avez un joli feuillage mais une tout petite rose qui n'a pas d'allure les gens ne vont pas être satisfaits".

Mais le doute règne toujours chez Evelyne fleurs. "C'est ultra compliqué pour la Saint-Valentin de cette année et c'est encore trop tôt pour se prononcer quant au stock", dit la fleuriste. "On doit en recevoir mais on ne sait pas du tout quelle quantité", précise-t-elle.

Une incertitude qui touche autant les fleurs que les orchidées. Les intempéries ayant fait de graves dégâts dans les récoltes, l'enseigne ne peut que patienter pour le moment. 

cn/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

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