Importé des Etats-Unis, pratiqué par des millions de personnes dans le monde, le crossfit est en plein essor à La Réunion. Les box se multiplient sur l’île parce que les gens y trouvent les recettes du bonheur : la plénitude physique, le bien-être mental, mais aussi le partage, la solidarité, sans discrimination de classe. Ce qui fait qu’une grande communauté mondiale s’est créée autour de cet engouement. Et la Réunion surfe sur cette lame de fond. Les gens ont plaisir à se rencontrer dans les box et à se retrouver en dehors (Photo rb/www.imazpress.com)
"C’est l’esprit convivial du crossfit !", lance Titouan, le muscle saillant, dans son débardeur blanc. Titou, Hedi, Marie, Joé et Eulalie sortent à peine de leur séance de sport et ils sont venus tous ensemble se sustenter au Métis Food, rue Lorion, à Saint-Pierre.
Pas question de se séparer encore. "On vient débriefer la séance entre nous", explique Joé, qui ne cache pas le plaisir qu’il a à pratiquer une discipline qui rallie de plus en plus d’adeptes à la Réunion.
"Je ne crois pas me tromper en vous disant que c’est à La Réunion, qu’il y a la plus grosse concentration de box (salles en crossfit, NDLR) en France", affirme de son côté Christophe Ramahazofaritra, rencontré chez Tiroule à Saint-Leu, entre deux WOD (workout of the day).
C'esst le le nom donné à l’entraînement en crossfit, que l’on peut scinder en trois parties : le warm-up à savoir l’échauffement, le skill qui consiste à répéter plusieurs mouvements plus ou moins techniques, lesquels seront présents dans le WOD, le dernier versant de ce triptyque, le cœur du réacteur en fait, adapté à tous les niveaux, aussi bien les débutants que les athlètes confirmés, toujours très intense, durant entre 8 et 25 minutes, et qui s’appuiera sur les fondements du crossfit, en l’occurrence, un mix de gymnastique, d’aérobic, d’haltérophilie, de force athlétique.
"Du coup, avec ces milliers de WOD possibles, tu ne t’ennuies jamais d’abord, reprend Christophe. Tu deviens ultra-polyvalent. Car sans être excellent partout, t’as un bon niveau dans chaque domaine. Ensuite, t’es cadré car il y a un coach à nos côtés. Enfin, il y a de l’émulation, car on est toute une bande pendant la séance. D’ailleurs, si l’un de nous flanche ou n’a pas fini l’exercice, les autres qui en ont terminé l’encouragent. En résumé, on souffre ensemble, on se montre mutuellement nos failles et ça resserre les liens entre nous."
- "Le même entraînement pour tous" -
Chez Christophe, comme chez Titouan et ses potes à Saint-Pierre, la dimension collective de ce sport individuel est un pilier de leur passion commune. "Quel que soit son niveau, tout le monde fait le même entraînement du jour, avec évidemment des variations en termes de poids ou d’intensité en fonction du niveau de ses compétences", explique Joé qui n’aime rien tant qu’être avec ses potes, pour rire, se chambrer, souffrir ensemble, partager des émotions autant que des des tractions, des pompes ou des squatts.
Il y a cinq ans, Christophe n’avait pas d’avis tranché quand une copine l’a orienté vers le crossfit.
Aujourd’hui, il est métamorphosé. "Ça m’a apporté de la sérénité et de la confiance en moi, dit-il. J’y vais cinq fois par semaine. Je cherche désormais à travers le crossfit à explorer la meilleure version de moi-même, sans narcissisme. Je n’ai rien à prouver aux autres, juste à moi-même. Je me sens en forme, prêt à répondre physiquement à n’importe quelle situation de la vie courante." Un déménagement pénible, une roue à changer, une voiture à pousser, une bouteille de gaz à déplacer, des courses à porter, énumère-t-il.
Mais surtout, il a rencontré une deuxième famille en rejoignant la communauté du crossfit. "J’ai une vingtaine de potes avec lesquels je m’éclate désormais, dit-il. On ne s’engueule jamais, parce qu’on se retrouve toujours au crossfit dans des situations de plaisir. Je les vois presque plus maintenant que ma propre femme. On organise des pique-niques, des séances de paintball, on se voit en dehors. Ce sont mes amis désormais, des gars que j’aime."
Et pour Titouan and Co, c’est pareil. "C’est très familial au niveau ambiance, intervient Eulalie. C’est un partage permanent." L’idée que le crossfit véhicule un sentiment d’appartenance à une communauté qui a ses rites, ses valeurs (manger sainement, bien dormir, etc...) , sa mentalité, son langage un brin codé, teinté d’anglicismes, son humour même, n’est pas galvaudée.
"Après, on n’appartient pas non plus à une secte, ou à la franc-maçonnerie ou que sais-je encore" se marre Christophe, avant de poursuivre. "Par contre, c’est sûr qu’il y a un lien indéfectible entre nous. D’abord parce qu’on est animé par le même goût de l’effort et du dépassement de soi à la base."
Et cet esprit communautaire s’exprime par-delà les différences sociales. "Il y a autant de CSP+ que d’employés ou d’ouvriers, à la fois des actifs et des retraités", distingue Christophe, avant d’ajouter. "Et ce magma est une richesse incroyable."
- Entre 1.000 et 1.200 euros par an" -
La preuve, prolonge le même. "La diversité des professions au sein d’une box est telle, qu’on peut trouver presque n’importe quel type de service. Tu as besoin d’un plombier de confiance ? Il y en a sûrement un parmi les inscrits. Tu cherches un ostéopathe ? Tu en trouveras un. Et s’il n’y en a pas, on t’en conseillera plusieurs."
L’une des seules réserves qu’émet Christophe, concerne le coût de l’opération. Le crossfit est un peu cher, reconnaît-il. Suivant la box, c’est "entre 1.000 et 1.200 euros par an", nous renseigne-t-il.
Mais le jeu en vaut la chandelle. Christophe a une fille de six ans. Lui a 55 ans. "Certainement que ça a compté inconsciemment dans ma réflexion, quand je m’y suis mis il y a cinq ans, conclut-il. J’avais envie d’être un papa qui reste dans le game."
Un papa qui peut jouer avec son enfant sans avoir à se préoccuper d’être essoufflé.
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