Courrier des lecteurs de Daniel Pouny

Covid-19 : mais où est donc passé notre Plan Orsec Départemental ''pandémie grippale'' ?

  • Publié le 11 mai 2020 à 06:56
  • Actualisé le 11 mai 2020 à 06:58

''Ile de La Réunion zone verte''. Non, ceci n'est pas encore le nouveau slogan publicitaire vantant les qualités écologiques de notre département dans une revue touristique. Mais, elle signifie tout simplement, - selon le code couleur (vert ou rouge), arrêté par le gouvernement pour différencier les régions réunissant favorablement les critères sanitaires en vue d'un déconfinement plus complet - que La réunion réunit tous les conditions pour être dans le vert et connaitre son premier jour de déconfinement le 11 mai prochain.

Donc, à l’instar du personnel soignant, nous pensons que nous devons dire un grand bravo à toute la population Réunionnaise qui, pour cette période de confinement, a su faire preuve de sérieux, de beaucoup de patience et abnégation pour l’obtention de ce résultat, de cette bonne note.

Cependant, aujourd’hui, après plus cinquante jours de confinement et un horizon fixé par le président de la république au 11 mai pour le début du déconfinement, à la lumière des nombreux points critiques et remarques de la presse locale, si nous voulons un peu comprendre la gestion de cette crise sanitaire sur notre île, alors il nous faut nous poser la question de savoir si, oui ou non, le ‘’plan ORSEC départemental pandémie grippale’’ de La Réunion a bien été arrêté par le préfet du département.

Pour s’en rendre compte, voyons si les consignes nationales ont bien été respectées.

En France, depuis 2004, l’organisation de la réponse face aux risques sanitaires de type pandémique est consignée dans un document d’aide à la préparation et à la décision intitulé, Plan National de Prévention et lutte ‘’Pandémie Grippale’’.

Ce plan est à la fois un document de référence pour la préparation et un guide d’aide à la décision en situation pandémique. Notamment pour faire face aux quatre principaux stades de l’épidémie : Stade 1, freiner l’introduction du virus sur le territoire. Stade 2, freiner la propagation du virus sur le territoire. Stade 3, atténuer les effets de la vague épidémique. Stade 4, revenir à une situation antérieure et se préparer à une vague suivante éventuellement. Ces 4 stades sont précédés d’une alerte initiale pour les premières mesures.

Pour sa 4eme édition en 2011, après avoir fait l’objet de travaux d’actualisation afin de tenir compte de l’expérience acquise et des recommandations parlementaires consécutives à l’épisode pandémique de 2009-2010, les autorités politiques et sanitaires ont décidé de lui associé un guide de  déclinaison territoriale. 

Le guide de déclinaison territoriale vise à aider les préfets, les services et établissements publics de l’Etat, et les collectivités locales à identifier leurs missions essentielles en période pandémique et à mettre en œuvre des mesures spécifiques.

Ainsi, par l’intermédiaire d’une circulaire interministérielle datée du 17 décembre 2012 signées par les ministres des affaires sociales et de la santé et celui de l’intérieur, il est demandé au préfet de La Réunion et au directeur générale l’agence régional de santé (ARS) de ‘’rédiger un plan pandémie grippale, ainsi que tous documents utile à la déclinaison opérationnelle des mesures contenues dans le plan national’’.

En résumé, il a été demandé au préfet de La Réunion, aidé du directeur général de l’ARS, d’arrêter pour notre île un plan ORSEC départemental ‘’pandémie grippale’’ avant la date du premier janvier 2014.

Mais, à l’heure où nous décidons d’écrire ce courrier, ce document préfectoral de référence reste introuvable sur tous les sites des services de l’Etat territorial de La Réunion, pas de trace dans le recueil des actes administratifs de la préfecture non plus, ni même dans les vus et considérants des arrêtés préfectoraux. Peut-être qu’il s’agit d’un document ultra confidentiel ? Alors, dans ce cas, de deux chose l’une : Soit le plan ORSEC départemental ‘’pandémie grippale’’ de La Réunion existe. A ce moment-là, il serait intéressant que le grand public sache :

Pourquoi, la préfecture et l’ARS préalablement au déclenchement des stades de l’épidémie n’ont pas contrôlé, si Santé Public France Réunion avait bien réalisé sa mission reçu en 2015, à savoir, constitué le stock territorial de masques chirurgicaux et en quantité suffisante exclusivement à destination des malades et des personnes contacts.

Pourquoi la préfecture et l’ARS n’ont pas vérifié préalablement au déclenchement des stades de l’épidémie, si les professionnels de santé -bien sûr nous ne parlons pas ici des employés(es) et des agents publics- mais  des administratifs, des financiers, des responsables de structures de soins et de santé, publiques comme privées ; les médecins et les soignants libéraux ; des chefs d’entreprises dont l’activité participe à la vie de la Nation…, ont bien fait les acquisitions, les stockages et les distributions de masque auprès de leur personnel, pour les protéger en plus d’eux même, puisque cette obligation est à leur charge depuis 2013.

Pourquoi la préfecture et  l’ARS ne se sont pas préoccupés de la cohérence des Plans De Continuation d’Activité (PCA) et son volet ‘’pandémie grippale’’, pourtant obligatoires pour tous les services extérieurs de l’Etat, fortement recommandés pour les collectivités territoriales et très encouragés pour les employeurs privés. Pourtant, chacun connait que c’est ce document consensuel établi en amont avec les partenaires sociaux, qui assure la protection des travailleurs et la continuité du service public par un redéploiement volontaire du personnel si le besoin se fait sentir. Reprise scolaire par exemple. 

Pourquoi la préfecture et l’ARS n’ont pas vérifié préalablement au déclenchement des stades de l’épidémie, si les maires de La Réunion ont bien adossés à leur Plan Communal de Sauvegarde(PCS)- document obligatoire- le volet ‘’pandémie grippale’’. Chacun connait que le volet opérationnel du PCS doit comprendre : l'alerte, la mise en sécurité, l'accueil, l'information, la communication, l'hébergement, le soutien aux autorités et services de secours spécialisés, la continuité d'activités de la commune en situation dégradée, etc... On a envie de dire que font les maires ? Ont-ils fait l’acquisition en quantité suffisante de ces matériels nécessaires, gel hydro-alcoolique, masques de protections et autres gants à l’attention du personnel communal pour la réalisation de ces missions ?

Pourquoi la préfecture et l’ARS n’ont pas agi plus rapidement au niveau du port et de l’aéroport, pendant que tout le monde demandait un contrôle plus poussé de ces structures  et une semi-fermeture de Gillot ? Alors que le pouvoir d’agir localement leur est donné justement par le plan de déclinaison territorial. Sur ce sujet, heureusement que les décisions nationales (confinement précoce, fermeture des frontières pour protéger les DOM) sont venus nous mettre rapidement à l’abri de grands dangers sanitaires.

Deuxième possibilité, soit le Département de La Réunion ne dispose pas de son plan ‘’pandémie grippale’’, alors, dans ce cas, la préfecture et l’ARS devront éclairer le grand public, en quoi l’élaboration de ce document de référence ‘’ORSEC spécifique’’, n’était pas utile à leur yeux pour la sécurité de la population réunionnaises, surtout quand on sait que l’île de la Réunion est a plus de 48 heures de tous renforts significatif de la métropole. 


Nous ne voulons pas qu’après l’accalmie on continue comme avant, c’est-à-dire que nos autorités, qu’ils soient administratifs, politiques ou sanitaires, se congratulent, s’auto-congratulent, s’accordent des promotions, des grades, des médailles…, alors que la population  réunionnaise a peut-être frôlé une catastrophe sanitaire majeure à cause d’un manque d’organisation et d’anticipation.  

C’est pourquoi, en guise de premier bilan, dès les premiers jours du déconfinement nous proposons que le Conseil Consultatif Citoyen (CCC) de la Réunion, s’auto saisisse de cette question, " Le plan ORSEC départemental ‘’pandémie grippale’’ de La Réunion existe- t-il oui ou non ? ". Objectivement, chaque citoyen résidant sur l’île est en droit de s’interroger de s’avoir si sa sécurité sanitaire a bien été assuré face à ce virus mortel. 

La réponse à cette interrogation tout à fait importante et légitime,  nous permettrait de connaître, si pour notre protection sanitaire, nos dirigeants (l’ARS, la préfecture et ses services, les collectivités locales, les professionnels et les structures de santé, les chefs d’entreprises...) ont navigué à vue et improvisé en permanence, ou si au contraire, ils avaient à leur disposition un cadre règlementaire prédéfini et élaboré selon les consignes  du guide de déclinaison territorial et des fiches missions adaptées à la situation locale  pour chaque acteur.

Par ailleurs, dans la mesure où le préfet de La Réunion est en même temps préfet de région et préfet de la zone de défense et de sécurité, et que le directeur général de l’ARS de la Réunion est aussi directeur général de l’agence régionale de santé de zone (ARSZ) et, compte tenu que c’est la même circulaire citée plus haut qui demandait à ces deux hauts fonctionnaires de décliner un plan pandémie Zonal pour le 30 juin 2013, peut-être que ces deux autorités administratif et sanitaire pourraient informer  les Réunionnais qui ont de la famille sur Mayotte et sur les terres australes et antarctiques sur les dispositions contenues dans ce document pour ces territoires faisant partie intégrante de la zone de sécurité et de défense de l’Océan indien.

Nous souhaitons que le Conseil Consultatif Citoyen  réalise ce rapport officiellement, puisque qu’il est né d’une création légale du conseil régional et qu’il a été officiellement présenté aux plus hautes autorités de l’Etat. Pour le moment, il nous semble que seule cette structure  citoyenne est en mesure d’établir, objectivement et sans  concession un tel document, car pas encore contaminé par l’entre soi, par le système, ou par le réseau.

En réalité, la réussite d’un tel ouvrage apporterait une vérité sur les difficultés de gestion locale de cette crise sanitaire, mais elle démontrerait également la capacité de la jeunesse réunionnaise diplômée à intégrer pleinement le monde d’après annoncé par le Président de la République.

Daniel Pouny
Animateur local du comité ‘’La Bretagne En Marche’’

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