Tribune libre de la FAFPHR

Emmanuel Macron est-il au courant de la réalité de la situation au CHU de La Réunion ?

  • Publié le 20 avril 2025 à 16:30
  • Actualisé le 20 avril 2025 à 16:31

A la veille du sommet des Chefs d’Etat de la Commission de l’Océan Indien à Madagascar, où seront abordés tous les aspects de la coopération régionale francophone, y compris sanitaire, sommet auquel participera le Président de La République Française, qui a parmi ses missions celle de nommer par décret les directeurs généraux des CHU de notre pays, la FAFPHR se demande si notre Président de La République, connait la réalité de la situation financière et managériale du CHU de La Réunion ? (Photo: rb/www.imazpress.com)

Notre syndicat hospitalier, la FAFPHR, défend depuis sa création en 2017 les valeurs de Respect des professionnels et des usagers, d’intégrité, de transparence, de bonne gestion des fonds publics hospitaliers et des soins de qualité par le service public hospitalier à La Réunion.

Alors que seuls 115 lits et places ont été créés entre 2012 -date de création du CHR- et fin 2021 (cf.rapport Igas avril 2017 p.11 et rapport d’activité CHU 2022), entre 2015 et 2024, ce sont 2 100 agents de plus qui travaillent au CHU de La Réunion ; notre CHU est passé de 6900 à 9 000 salariés(cf. interview du DG magazine L’Eco Austral n°390). 

L’activité serait au rendez-vous selon le directeur général, qui en 2024 présentait la situation du CHU comme très bien gérée.

Mais au vu des informations parvenant en Off à notre syndicat démontrant une dégradation de la situation financière et managériale du CHU, nous avons saisi le 7 novembre 2023 le ministre de la santé pour demander une mission d’audit et de contrôle du CHU par l’Igas (inspection générale des affaires sociales) afin d’établir
un diagnostic complet et objectif, sur les aspects financiers et managériaux notamment. 

Cette mission Igas a ainsi été diligentée en 2024 et nous attendons ce rapport, après les phases du contradictoire.

Nous avons ainsi réclamé une investigation approfondie du CHU, sur les mêmes indicateurs que ceux du 1er rapport Igas d’avril 2017 et rappelé l’importance que ce rapport soit rendu public dès que possible, pour que tous les publics et acteurs, professionnels hospitaliers, citoyens-patients-usagers-contribuables, syndicats et élus de La Réunion connaissent la vérité et disposent du même niveau d’informations.

Il s’agit d’un service public de santé ! et d’un établissement de recours pour les populations de la zone océan Indien.

Lorsque ce rapport sera rendu public, les tentatives actuelles de manipulation de l’opinion publique sur la base d’informations non vérifiables seront déjouées.

Toute la lumière doit être faite au plus vite ! sur :

-le montant réel des déficits du CHU 2022, 2023 et 2024 et non ceux qui sont affichés

-les niveaux de trésorerie à fin 2022, et exercices suivants ; la DGFIP a alerté le CHU fin 2022 dans un mail intitulé « URGENCE SIGNALÉE CHU - Situation de trésorerie au 26/12/2022 » sur un état de trésorerie de 11,6 millions € mais des dépenses et charges à régler de plus de 51 millions€ et seulement 11,5 millions€ à recevoir fin 2022.

-les pratiques financières de la direction du CHU : Sincères ou douteuses? La permanence des méthodes comptables est-elle respectée ou pas ? Le principe de sincérité budgétaire est-il respecté ou violé ? La réalité financière a-t-elle été travestie ? comme par exemple lors de la clôture de l’exercice 2022 où le DG du CHU demande de rectifier le résultat afin d’afficher un déficit à 49,5millions€ au lieu des 63 millions€ ?! 

Tous ces éléments tenant à ce lifting d’ordre financier ont-ils été, en toute transparence, présentés aux instances ou y-a-t-il eu un pilotage en amont des éléments et des résultats?, Ont-ils été portés à la connaissance du commissaire aux comptes ? Quels impacts pour les fournisseurs, notamment les PME ?

-les causes réelles du déficit abyssal du CHU : Dérive financière ? Déni ? Le coefficient géographique ne peut pas être responsable de tous les maux alors que l’activité serait au rendez-vous. Il faut une analyse fine des postes de dépenses de fonctionnement.

-les pratiques managériales : la question de l’existence d’une politique généreuse de recrutement avec ou sans clientélisme se pose. Sur quels métiers ont été faits les recrutements pour qu’il semble manquer encore de soignants avec 9 000 professionnels ? Motifs et surcoût du recours à l’intérim dans plusieurs secteurs (brancardage, informatique, sécurité) ? Le taux d’absentéisme et ses causes dont le mal-être des agents, les harcèlements ?

Le 1er rapport Igas 2017 était cinglant de vérité ! mais hélas, on a eu l’impression qu’il a été sans vergogne mis dans un tiroir par la (même) direction du CHU, dans l’indifférence ou complicité, d’autorités, d’élus, de membres d’instances, dont le conseil de surveillance qui a pour mission légale d’entendre le DG sur sa gestion ... cette direction semble avoir pu continuer à agir à sa guise, voire en toute puissance et impunité, malgré les tentatives de certains de tirer les sonnettes d’alarme, dont notre syndicat FAFPHR.

Avec la même direction, les mêmes méthodes, la situation a donc tout naturellement continué à se dégrader jusqu’à atteindre des proportions catastrophiques ! Une communication, édulcorée puis offensive, pour ne pas dire agressive, a aussi été déployée avec l’appui de membres des instances du CHU.

Déjà en 2017, l’Igas, dans son rapport, écrivait, qu’au CHU il y avait une sorte de « déni », le « CHU n’a cessé de revendiquer des aides financières », « que tout est mis en œuvre ...pour accréditer l’idée selon laquelle la solution des problèmes du CHU ne réside que dans des aides extérieures », ou encore que certains « ... jouent sur la crainte du risque social pour obtenir de l’Etat le maximum d’aides ».

A la lecture de ces extraits 2017, on a l’impression qu’il s’agit d’une analyse de la situation actuelle au CHU et du lobbying déployé en faveur de l’immobilisme tout en continuant à réclamer des crédits de l’Etat !

La FAFPHR a eu la preuve que le directeur général du CHU a piloté le résultat de l’exercice 2022 en modifiant le montant du déficit de plus de 14 millions€ ! Ce déficit aurait dû être affiché à 63 millions€ et non en dessous. C’est édifiant ! On est donc tous en droit de s’interroger :

-Pourquoi le DG, qui a comme mission de gérer en toute sincérité les comptes du CHU, a -t-il décidé de travestir le déficit 2022 de la sorte en prétendant qu’il était moindre, que tout allait bien au CHU? Quels étaient alors ses intérêts à agir de la sorte ?

-Le DG a-t-il caché à la présidente du conseil de surveillance et aux autres membres, sa volonté de diminuer le montant affiché du déficit 2022 ? ou cette décision a-t-elle prise avec un accord préalable ?

-Le DG du CHU a -t-il agi de la sorte à plusieurs reprises ? de sa propre intiative ou avec l’accord du conseil de surveillance ? Le déficit 2023 a été affiché à - 31 594 989 €, après avoir intégré environ 50 millions€ d’aides de l’Etat...

Ces questions ont leur importance et les réponses à ces dernières doivent être connues de tous !

Ce qui ressemble beaucoup à une instrumentalisation par certains de la situation financière du CHU en brandissant le risque épidémique, le surcoût des missions de recours du CHU pour la zone océan Indien pourtant financées par l’Etat, sans vouloir savoir ce qu’il en est réellement des autres dépenses, est malsaine et n’a que trop duré.

Il faut savoir raison garder.

Toute la vérité, argumentée de preuves, doit être dite et rendue publique, tant par respect des professionnels hospitaliers que des usagers-citoyens-contribuables, et de notre coopération sanitaire océan Indien.

Syndicalement vôtre,

Isaline Tronc, secrétaire générale de la Fédération Autonome de la Fonction Publique à La Réunion (FAFPHR)

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