Tribune libre d'Audrey Bélim

Liquidation du JIR : lettre à Emmanuel Macron

  • Publié le 1 août 2024 à 01:59
  • Actualisé le 1 août 2024 à 02:01

Monsieur le Président de la République, je me permets de vous écrire pour vous faire part de notre inquiétude, à la suite de la liquidation judiciaire du Journal de l'île de La Réunion (JIR) que nous avons apprise aujourd’hui. Cet événement suscite une vive émotion au sein de notre île. (Photo photo Sly/www.imazpress.com)

Fondé en 1951, le JIR constituait un pilier de notre espace public d’informations et de débats. Je sais que vous partagez cette conviction : la liberté de la presse et la pluralité des médias sont essentielles pour le bon fonctionnement de notre démocratie. Dans un territoire insulaire comme le nôtre, un journal dispose d’un rôle encore plus vital pour la vie politique, économique, culturelle et sportive. Dans un département d’une taille aussi limitée, la pluralité des médias et des opinions est essentielle.

Publier un quotidien dans un département d’Outre- mer implique par ailleurs des contraintes propres à nos territoires, alors même qu’ils ne disposent pas des mêmes aides que la presse hexagonale. Ce modèle, aujourd’hui à bout de souffle, doit être interrogé par les pouvoirs publics.

Le JIR ne sera plus publié dès demain. Les 75 salariés du journal se trouvent licenciés dès aujourd’hui. Ce sont autant de familles qui sont affectées de manière collatérale par le chômage. Ces salariés sont journalistes, secrétaires, assistantes, manutentionnaires, chargé de communication, conseiller marketing, comptable, chauffeur, agent d’entretien... métiers qu’ils n’exerceront plus à compter de demain.

Comment rebondir en sachant que l’autre grand titre de presse de notre île, le Quotidien de La Réunion, est également en grande difficulté ? Comme de nombreux Réunionnais, je m’inquiète de cette situation qui pourrait le conduire à disparaître lui aussi.

En tant que Président de la République, garant des valeurs de notre République et de la liberté, notamment celle de la presse, nous vous sollicitons à présent pour prévoir des mesures exceptionnelles qui pourraient permettre un avenir à la pluralité de la presse réunionnaise car il nous faudra aussi assurer la continuité du Quotidien de La Réunion.

Dès le mois de janvier, j’ai adressé un courrier de félicitations à Rachida Dati et attirais son attention sur la situation critique de la presse réunionnaise. Malgré les relances comportant des propositions concrètes et le dépôt d’une question écrite à ce sujet (à laquelle le
Gouvernement est normalement obligé de répondre), je n’ai reçu aucune réponse.

Lors des séances de questions au gouvernement dans l’hémicycle, en mai dernier, j’ai transmis un mot manuscrit à la ministre pour lui dire à quel point la situation empirait rapidement, en vain. Je vous écris donc afin de vous alerter sur ce grave recul de la liberté de la presse et du pluralisme à La Réunion. Vous le savez tout comme moi : lorsque la presse recule, ce sont les rumeurs et la désinformation qui avancent.

Dans l'attente de votre réponse, veuillez agréer, Monsieur le Président de la République, l'expression de ma très haute considération.

Audrey BÉLIM Sénatrice de La Réunion
 

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