Tribune libre de Karine Lebon

Loi d’urgence pour Mayotte : discours de Karine Lebon à l’Assemblée nationale

  • Publié le 21 janvier 2025 à 06:23
  • Actualisé le 21 janvier 2025 à 06:25

Notre nation est endeuillée. Le 14 décembre 2024, la tragédie a frappé de plein fouet et dévasté le 101e département français. Le vent, la pluie et l’océan se sont déchaînés sur ce bout de terre, arrachant tout sur leur passage, y compris la vie de trop nombreuses personnes n’ayant nulle part où se réfugier, et dont le réel recensement doit être une priorité. (Photo : www.imazpress.com)

Je tiens à présenter, au nom du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, mes plus sincères condoléances à toutes les familles meurtries, dont la vie a soudainement basculé au passage du cyclone Chido.

J’exprime également tout mon soutien aux personnes sinistrées et aux équipes de secours qui, encore aujourd’hui, font face à l’une des plus grandes crises humanitaires qu’ait connue notre pays.

C’est avec une profonde tristesse et une indignation sincère que nous évoquons cette tragédie humaine et cet abandon déchirant. Trois heures auront suffi pour mettre à terre des décennies de simulacre de développement.

Mayotte est le théâtre d'une crise humanitaire, sociale et écologique. Des vies innocentes, des enfants, s’éteignent chaque jour faute de soins, faute d’espoir. Les maladies liées à l'insalubrité et au manque d'eau potable prolifèrent. Concomitamment à la crise sociale, la crise sanitaire prend de l’ampleur.

Les gouvernements successifs n’ont laissé que la détresse en héritage. Mayotte est souvent traitée comme une entité à part, une île lointaine et secondaire dans les priorités nationales, y compris lorsque l’on parle des Outre-mer.

Les Mahoraises et Mahorais, héritiers de Zéna M’Déré et des Chatouilleuses, ont droit à toute la reconnaissance, à tout le respect de l’Etat français. Si le président de la République a rendu hommage à Zéna M’Déré par les mots, il l’a salie par son inaction.

Des décennies de combat pour ancrer l’île au sein de la République française ne peuvent avoir comme seul effet l’ignorance et l’abandon des pouvoirs publics.

La fausse promesse de la départementalisation doit laisser place à la réalité de la prise en compte sérieuse de ce territoire et de ses habitants. Il est temps de mettre fin à l’injustice et à la marginalisation. Les appels à l’aide ne doivent plus rester sans réponse.

Le devoir républicain nous oblige. Il est temps d’agir. L’île de La Réunion a été à l’avant-poste de la solidarité, l’Etat français doit désormais prendre toute sa part. Il doit reconnaître sa responsabilité envers Mayotte et ses habitants.

Cela passe par des mesures concrètes et ambitieuses : investir massivement dans les infrastructures et l’habitat, renforcer les dispositifs sociaux, déployer un plan éducatif ambitieux, assurer une gestion humanitaire digne, et surtout impliquer les Mahorais dans les décisions.

Toutes les forces vives de Mayotte souhaitent participer à la reconstruction de leur territoire. Les acteurs économiques certes, mais également les ONG, les associations et tous les habitants de l’île.

L’Etat a le devoir de coopérer et de se coordonner avec les collectivités territoriales, plus à même de connaître les besoins et les mesures à mettre en œuvre pour leur territoire.

Comme tous les territoires ultramarins, Mayotte connaît des spécificités qui justifient une part d’adaptabilité des normes et de la réglementation. Les taux de pauvreté et de chômage, le nombre d’enfants non-scolarisés, la faiblesse du système de santé : tout exige une grande vitesse d’exécution.

Mais ce besoin d’adaptation ne doit pas laisser la porte ouverte à un éternel régime dérogatoire. Les Français de Mayotte doivent avoir les mêmes droits que l’ensemble des citoyens français.

Sans nous opposer aux dispositions d’accélération proposées dans ce projet de loi d’urgence, nous nous devons d’alerter le gouvernement sur les risques d’une mauvaise application de cette simplification.

Le travail de reconstruction ne peut être bâclé. Reconstruire à l'identique et mettre une fois de plus en danger la population ne peut être une option. Le nouvel aménagement doit assurer une garantie de qualité et doit s’éloigner de toute velléité de reconstruction au rabais.

Dès aujourd’hui, nous nous devons de substituer un réel travail de réflexion aux explications réductrices qui n’apportent rien sauf à créer du ressentiment à l’égard de l’Autre. Nous ne voulons pas vivre dans une France où une chroniqueuse explique refuser une minute de silence sous prétexte que les victimes du cyclone Chido ne sont pas françaises.

La mort de centaines d’êtres humains ne doit pas laisser place à la surenchère xénophobe. Chers collègues, nous ne devons jamais sortir du cadre de l’Humanité. Le monde nous regarde. Par responsabilité face à l’urgence humaine et sociale, nous voterons pour ce texte.

Un survol des défis ne sera toutefois pas suffisant pour répondre à cette crise dont l’ampleur est sans précédent. La future loi programme annoncée par le ministre des Outre-mer devra veiller à répondre aux problèmes structurels auxquels fait face ce département et assurer l’égalité et un avenir à la jeunesse mahoraise.

De Petite Terre à N'Gouja, aidons ce joyau à retrouver tout son éclat.

Karine Lebon, députée de La Réunion

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6 Commentaires
Info
Info
1 mois

Il y a une députée de Mayotte qui nous critique souvent yousouffaffa.

Faudrait qu'elle respecte les Reunionnais

didier
didier
1 mois

Karine Lebon, députée de La Réunion ou de Mayotte ?
A ma connaissance, quand les réunionnais sont dans la détresse, aucun députés de Mayotte bougent le petit doigt (ou peut être l'autre doigt)

C mwin i dit
C mwin i dit
1 mois

Elu de la 2ème circonscription, quel est ton bilan ?

Fort pour blablater chez un voisin sinistré, mais à tes pieds rien de concret

Largue mon ourlet avec ton courrier des lecteurs

HULK
HULK
1 mois

Rien sur le fait que MAYOOTE est un scandale d'état et sur l'immigration clandestine? Encore une illuminée qui parle pour ne rien dire, sans s'attaquer aux vrais problèmes.

Zébulon
Zébulon
1 mois

Rien sur l'immigration clandestine, qui gangrène le département de Mayotte et petit à petit la Réunion. Sur les violences à la Réunion conséquences.....Silence !

Phil
Phil
1 mois

Bravo , merci Mme Lebon , enfin un beau discours , sans concession , pour nos compatriotes mahorais !