Tribune libre de Frédéric Maillot

Vann pa nou la fimé par pint

  • Publié le 19 juillet 2023 à 16:39
  • Actualisé le 19 juillet 2023 à 16:58

Le Comité interministériel des Outre-Mer (CIOM) est la réponse par le Gouvernement Borne de l'appel de Fort de France, formulé et porté par les collectivités territoriales des divers territoires ultramarins. Ces derniers ont appelé à changer de modèle de gouvernance et notamment à changer la politique des aides versées aux péyi d'Outremer. Ce qui me donne l’occasion de saluer cette initiative inédite de voir les Péyi d’Outre-mer faire corps et parler d’une seule et même voix à un gouvernement. (Photo photo RB imazpress)

Pour être précis, ce Comité ne concerne que les ministres et non les députés qui n’ont assisté qu’à des réunions d’informations et non de travail ou de contribution.

La vie chère, l’attractivité économique, l’adaptation des normes aux réalités locales, l’éducation ou encore la transition écologique sont des axes sur lesquels le gouvernement affiche une posture volontariste mais il nous reste maintenant à savoir comment les promesses vont se décliner de manière très concrète. De manière concrète, il faut désormais veiller au respect de cette feuille de route gouvernementale et surtout veiller à ce que les moyens humains et financiers soient à la hauteur des ambitions affichées. En outre, nous devons être associés à chacune de ces mesures pour s’assurer de leur efficacité.

Je m’attarderai sur les points que je trouve les plus importants et sur lesquels je travaille depuis le début de ma mandature.

Vie chère

On le sait tous, la vie chère est le problème n°1 pour tous les ultramarins que nous sommes. Mais en ciblant l’octroi de mer comme cause principale de la vie chère, le Gouvernement prend une posture dangereuse car il demande désormais aux collectivités de gérer cette taxe mais il faut être vigilant. L’octroi de mer est une taxe qui reste aujourd’hui le principal financement des collectivités territoriales. Sa réforme doit se faire en bonne intelligence et surtout éviter le système d’une taxe envoyée à Paris et redistribuée arbitrairement aux collectivités territoriales qui en auront la charge et la responsabilité.

Encore une fois, lier octroi de mer et vie chère est un raccourci facile et dangereux. Il existe d’autres causes, relevées par les experts auditionnés en commission d’enquête parlementaire, qu’il faut savoir regarder pleinement, avec courage et persévérance politique. Notre constat à la suite de l’enquête parlementaire sur la vie chère en Outre-mer : les Outremer ont été laissés à la solde d’acteurs privés qui n’ont que faire de la concurrence. Les contrôles sont parcellaires et de toute évidence insuffisants.

Il faut veiller à une réelle politique de protection de la concurrence dédiée aux départements ultramarins qui doit se traduire par un département / une mission / Task Force dédiée au sein de l’Autorité de la concurrence avec le financement et les moyens humains nécessaires.

Se loger

Sur le plan du logement, les mesures restent insuffisantes : le Gouvernement reconnaît que 80 % de la population ultramarine est éligible au logement social et 70 % au très social mais les besoins restent criants. À La Réunion, ce n’est pas moins de 40 850 demandes de logements qui ont été faites pour une population de 868 000 habitants. Face à cela, seuls 1784 logements sociaux ont été mis en service (entre janvier 2020 et janvier 2021) soit le deuxième volume le plus faible constaté sur les cinq dernières années.

Le Gouvernement se félicite de son Plan Logement Outre-mer 2019-2023 mais la délégation sénatoriale outre-mer a d’ores et déjà fait état de l’échec de la politique menée de 2015 à 2019. Reste à voir si le crédit d’impôt de rénovation des logements sociaux hors des Quartiers Prioritaires de la politique de la ville ainsi que les augmentations d’aide d’État de 35 à 50% pour les rénovations de logement destinés aux propriétaires modestes seront des mesures suffisantes et correctement fléchées pour les populations concernées.

Pour nos étudiants, le Gouvernement a annoncé un plan de rénovation de 600 logements Outremer d’ici 2027. Or à La Réunion, nous avons près de 5 000 demandes de logement pour 1 300 chambres disponibles. Si la volonté est là, les moyens restent en-deçà des besoins auxquels font face nos étudiants qui ont tant de difficulté à trouver des logements abordables et de qualité.

Coopération régionale

Le Gouvernement arrive enfin à entendre nos interpellations et annonce vouloir faciliter le recours à l’importation régionale. On doit commercer avec les pays de notre bassin océan océanique. Il est aberrant d’importer des matériaux d’Europe quand ceux fabriqués à proximité (le cas du fer pour l’Afrique du Sud…) sont moins chers et ont un plus faible impact carbone. Je le répète sans cesse depuis le début de l’enquête parlementaire sur la vie chère en Outremer, il était temps que le Gouvernement écoute nos réalités.

Travailler sur les normes pour s'adapter à l'insularité

L’adoption d’un marquage « RUP » à la place d’un marquage « CE » pour permettre le commerce dans la zone régionale est une première étape vers un commerce responsable des matériaux. Il faudra toutefois veiller au maintien des standards de qualités de ces matières, pour la santé et la sécurité des ultramarins.

Les occasions manquée du gouvernement

Le rapport sénatorial n°728 déposé le 1 juillet 2021 par les sénateurs Jacques, Gontard et Lurel souligne l’envergure du coût de la norme en Outremer.

Les sénateurs ont démontré que des normes inadaptées et bien trop nombreuses en Outremer conduisent à l’augmentation des prix de ces logements sur le marché, au détriment du pouvoir d’achat déjà fragile des populations ultramarines.

Cette problématique qui sous-tend tout le phénomène de la vie chère n’est pourtant pas abordée pleinement par le CIOM, à mon grand regret. Une rationalisation normative aurait été un chantier cohérent et bienvenu.

Aussi, je regrette avec amertume que la problématique des violences intra-familiales n’ait été abordée qu’à la marge de la question de la mobilité alors même qu’elle est un fléau qui touche durement nos Outremer. J’avais déjà interpellé les services de la Première ministre pour la Réunion intègre l’expérimentation légale du Comité Départemental de la Protection de l’Enfance, en lui rappelant la nécessité d’une prise en charge spécifique des violences intra familiales endémiques aux Outremer.

On aurait voulu, mes collègues députés et moi, que cela fasse l’objet d’un programme spécial du Gouvernement.

Par ailleurs, alors que le Gouvernement a annoncé investir 100 milliards dans le ferroviaires en Hexagone, la thématique de la mobilité interne aux Outremer n’est pas abordée par le CIOM. Rappelons que les ultramarins participeront par l’impôt au financement du ferroviaire sans en bénéficier, et que les transports en commun dans les Outremer ne fait pas partie des considérations du Gouvernement.

En conclusion, les députés ultramarins ont su se montrer unis et combatifs pour plus de justice envers les péyi d’Outremer. J’en veux pour preuve le travail commun mené lors de la Commission d’enquête parlementaire sur la vie chère, le vote de la loi SERVA sur la continuité territoriale ou encore au sein de la délégation des Outremer.

Nous savons que nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes pour faire avancer nos Outremer et nous continuerons à y travailler.

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1 Commentaires
Thomas
Thomas
2 mois

Je ne comprends rien à ce texte ,et vous?