La Fabrik

Des jeunes réunionnais en stage pour intégrer une prépa de théâtre dans l'Hexagone

  • Publié le 16 mai 2024 à 09:34

Le CDNOI (centre dramatique national de l'océan Indien) poursuit son partenariat avec l’Ecole supérieure du théâtre de L’Union (Limoges) afin de permettre à de jeunes réunionnais d’intégrer la classe préparatoire théâtre dédiée aux Outre-mer. Les auditions ont lieu ce samedi 18 mai à La Fabrik. Le ou les lauréats auront la possibilité de se préparer durant un an aux différents concours d’entrée des écoles supérieures d’art dramatique (Photos Samuel Malka)

Donner l’opportunité à des jeunes ultramarins de sauter la mer pour intégrer la classe prépa de l’Ecole supérieure du théâtre de L’Union (ESTU) basée à Limoges…

Le rêve est réel depuis 2018, grâce à un projet unique et pilote en France porté à La Réunion par l’ESTU en partenariat avec par le CDNOI. C’est aussi et surtout une très belle opportunité pour la jeunesse ultramarine de se former durant un an, en vue de se préparer aux différents concours d’entrée aux écoles supérieures d’art dramatique.

Le projet se décline en deux temps et deux espaces géographiques différents : une année à parcourir la Guyane, la Guadeloupe, La Réunion, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie (Tahiti) de l’automne au printemps pour recruter des jeunes sur concours, et l’autre année sur site, à l’ESTU qui accueille ces jeunes gens en classe prépa.

"Dès l’automne, nous parcourons tous ces territoires pour mener deux volets d’actions essentiels auprès des jeunes et de leurs parents. D’abord la partie information pour présenter ce qu’est une école supérieure d’art dramatique, notre classe préparatoire et son objectif. Vient ensuite le volet formation où on leur donne des clés pour préparer notre concours et tous les autres", indique Héloïse Belloir, responsable outre-mer de l’ESTU.

Au printemps, place aux concours à l’issue d’un stage d’interprétation gratuit, à l’image de celui organisé depuis lundi à La Fabrik et dispensé à une dizaine de jeunes sous la houlette du new-yorkais Paul Golub (ancien comédien du Théâtre du Soleil d'Ariane Mnouchkine, metteur en scène et par ailleurs directeur des études de l'École supérieure de théâtre de l'Union).

Les auditions ont lieu ce samedi 18 mai devant un jury de 4 personnes.

Au programme : une scène dialoguée de trois minutes, un parcours libre de trois minutes également et enfin un entretien individuel d’une dizaine de minutes permettant de mieux cerner la personnalité des candidats.

La Réunion conclut donc ce grand tour des outremers après la Nouvelle-Calédonie, Tahiti, Mayotte, la Guadeloupe et la Guyane.

Le ou les lauréats auront la possibilité de se préparer de septembre 2024 à juin-juillet 2025 à la trentaine de concours (extrêmement sélectifs) d’entrée aux écoles supérieures d’art dramatique qui proposent généralement un cursus sur trois ans afin de devenir des comédiens professionnels (formation accréditée par le ministère de la Culture ou le ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, délivrant le Diplôme national supérieur professionnel de comédien-ne).

"Sur chaque territoire, on choisit un ou une lauréate puisqu’il y a une dizaine de places à l’ESTU. On met donc des personnes sur liste d’attente et à l’issue de tous les concours on fait remonter les personnes sur liste principale", poursuit Héloïse Belloir. Et d’insister sur les conditions sine qua non pour bénéficier de cette année préparatoire, à savoir l’obtention du baccalauréat pour tous les candidats sans conditions de nationalité, et qui doivent être âgés de moins de 24 ans au 1er septembre.

À noter que l’ESTU affiche un taux de réussite aux concours des écoles supérieures d’art dramatique de 90% (groupe 1 2018/2019) et de 60% (groupe 2 2022/2023). Des chiffres plus qu’encourageants pour le seul programme du genre en France.

• Trois questions à Héloïse Belloir, responsable outre-mer de l’ESTU

- L’outre-mer terre de talents, mais existe-t-il des freins comme la crainte de l’éloignement familial par exemple ?

En effet, il y a des obstacles comme celui de la famille en premier lieu. J’ai souvenir d’une jeune Tahitienne retenue sur liste d’attente et qui nous a dit lors de l’entretien individuel qu’il nous fallait davantage convaincre ses grands-parents de la laisser partir, que ses parents.

Bien souvent c’est lié à une méconnaissance du métier d’artiste, d’où l’importance du volet Information. Outre l’éloignement, on doit aussi gérer la partie administrative très lourde pour les élèves venant du Pacifique notamment, la partie financière notamment pour les concours qui sont généralement payants, l’hébergement au sein de notre école, l’accompagnement pédagogique sans toutefois être « maternants » sans oublier la partie tutorat…

- Ces jeunes ont-ils toutes leurs chance, sachant que les concours d’entrée aux écoles supérieures d’art dramatique sont connus pour être extrêmement sélectifs ?

A l’image du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris qui enregistre chaque année plus de 1600 postulants pour une trentaines de candidats retenus au final. En revanche, La Réunion fait office d’exception grâce à son CRR contrairement à la Polynésie par exemple qui ne bénéficie aucunement de structure analogue.

Or l’un des pré-requis pour préparer ces concours c’est d’avoir fait le conservatoire. Sachant que tous les territoires d’outre-mer n’en bénéficient pas, on a donc quatre mois pour former nos élèves dès septembre avec des formateurs issus des outremers, de métropole et de l’international, les premiers concours ayant lieu en janvier.

- Donner davantage de visibilité aux outremers fait également partie de vos missions, puisque vous parlez d’égalité des chances…

Nous sommes partis du constat de la trop grande absence d’Ultramarins sur les scènes théâtrales, et la volonté de valoriser l’ensemble de nos territoires d’outremer. On sensibilise, on vulgarise des réalités souvent méconnues, et on devient une sorte de lieu-ressource. À ce titre, je suis régulièrement contactée par des établissements, des fondations ou encore le Conservatoire National Supérieur de Danse et de Musique de Paris qui souhaiterait mettre en place quelque chose de similaire aux Antilles.

• La Réunion an lèr

Cinq jeunes Réunionnais sont déjà passés par cette formation de l’ESTU et ont tous intégré des écoles supérieures d’art dramatique à l’issue de leur année en classe préparatoire.

- Olenka Ilunga, originaire de Saint-Pierre, a intégré le Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris en 2019. Elle a bénéficié, en 2020, d'un beau coup de projecteur au Festival de Cannes (Talents Adami). Elle a joué dans plusieurs projets ultramarins / réunionnais (séries : Ultra loin, Réunions ; cinéma : Zorey de Swann Arlaud). Elle poursuit une carrière dans le théâtre, la danse et le cinéma.

- Anthony Leichnig, originaire de Saint-Joseph, a intégré le Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris en 2019. Fraîchement diplômé, il poursuit sa carrière en métropole : il a récemment été mis en scène Julien Romelard (Festival 2023 du Nouveau Théâtre Populaire), Keti Irubetagoyena (2024, MAIF Social Club), etc.

- Steven Injiraky et Paul Rivière, originaires de Saint-Denis, ont intégré l'École Supérieure d'Art Dramatique (ESAD) de Paris en septembre 2023. Ils seront diplômés en juin 2025.

- Marina Mouniapin, originaire de Saint-Benoît, a intégré le Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris en septembre 2023. Elle sera également diplômée en juin 2025.

vw/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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