Non, la France n'accueille pas sur son territoire "l'équivalent de la ville de Lyon" chaque année

  • Publié le 28 septembre 2021 à 16:08

Le président par intérim du RN Jordan Bardella assure que le nombre d'immigrés accueillis chaque année légalement en France équivaut à la population de la ville de Lyon. Cette affirmation est de très loin contredite par les chiffres officiels et occulte par ailleurs le fait que des dizaines de milliers d'étrangers quittent en parallèle le pays chaque année.

Menacés par l'ascension dans les sondages d'Eric Zemmour, le Rassemblement national (RN) et sa candidate Marine Le Pen reviennent à leurs fondamentaux en ciblant l'immigration, quitte à prendre parfois quelques libertés avec les chiffres.

Défendant la proposition d'un référendum sur l'immigration portée par Marine le Pen, le président par intérim du parti Jordan Bardella a ainsi assuré, le 28 septembre, que le nombre d'immigrés accueillis légalement en France chaque année équivalait à la population de la ville de Lyon, qui s'élevait à 518.635 en 2018 selon le dernier recensement de l'Insee.

"Nous voulons redonner au peuple français la maîtrise de son destin et la possibilité de dire qu'on ne peut plus accueillir l'équivalent de la ville de Lyon chaque année, de manière légale sans les clandestins, dans notre pays", a affirmé M. Bardella dans la matinale de France Inter.

Le responsable a utilisé la même image choc une deuxième fois pendant l'interview, en réponse à la question d'un auditeur. "Si les Français veulent continuer d’accueillir des centaines de milliers de personnes chaque année, alors à ce moment-là, si Marine Le Pen est élue présidente de la République, ils voteront non à ce référendum et nous continuerons d'accueillir l'équivalent de la ville de Lyon chaque année", a-t-il affirmé.

Cette comparaison se heurte toutefois aux chiffres officiels sur l'immigration.

Selon les données de l'Insee, la France a en réalité accueilli 272.000 immigrés en 2019, soit près de deux fois moins que l'estimation avancée par M. Bardella. Dans le détail, 41% de ces étrangers venaient d'Afrique --notamment du Maroc (9,5%)-- et 31% d'Europe.

Depuis 2006, le nombre global des arrivées sur le territoire a fluctué au-dessus de la barre des 200.000 mais n'a jamais approché le seuil évoqué par le responsable du RN.

Ce chiffre occulte par ailleurs le fait que chaque année, des dizaines de milliers d'immigrés quittent en parallèle le territoire: selon les dernières données disponibles de l'Insee, 63.000 d'entre eux ont ainsi quitté la France en 2017 pendant que 261.000 y étaient accueillis, aboutissant à un solde migratoire de 198.000 personnes.

Donnant des gages à la droite et l'extrême droite, le gouvernement a annoncé mardi 28 septembre une réduction "drastique" du nombre de visas accordés aux ressortissants du Maghreb, affirmant protester contre le refus du Maroc, de l'Algérie et de la Tunisie de délivrer les laissez-passer nécessaires au retour des étrangers expulsés de France.

Capture d'écran du site de l'Insee.

Au cours de l'interview, Jordan Bardella a également déploré que les étrangers arrivant en France seraient tous peu qualifiés tandis que les Français diplômés quitteraient le territoire.

Les données de l'Insee conduisent à nuancer les affirmations du président du RN.

Selon les chiffres datant de 2020, 37,8% des immigrés présents en France n'avaient certes aucun diplôme mais 42,7% d'entre eux étaient au moins titulaires du bac ou d'un brevet professionnel, 20,1% d'entre eux possédant même un diplôme supérieur à bac+2.

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Jérémy Tordjman, AFP France
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