Faut-il rendre obligatoires les drapeaux français et européen sur la façade des mairies? La "Journée de l'Europe" devrait être marquée mardi par un vif débat à l'Assemblée nationale autour de cette proposition aussi symbolique que symptomatique des divisions à un an des élections européennes.
La date de l'examen de ce texte, présenté par le groupe du parti présidentiel Renaissance, coïncide avec l'anniversaire de la déclaration de Robert Schuman le 9 mai 1950 sur la mise en commun du charbon et de l'acier, considérée comme le texte fondateur de la construction européenne.
Sur Twitter, Emmanuel Macron a rappelé que l'Union européenne "protège des crises". "Je suis fière d'être à la tête d'une majorité qui est la seule famille politique résolument pro-européenne", a dit de son côté Elisabeth Borne devant les députés.
Un enthousiasme loin de l'accueil froid reçu à l'Assemblée par la proposition de loi sur les drapeaux. Les premiers débats ont tourné court la semaine dernière, avec l'adoption en commission d'amendements de suppression de son article unique, qui avaient été déposés par La France Insoumise (LFI) et le Rassemblement national (RN).
Outre l'hostilité des oppositions, le texte s'était heurté aux réticences des députés Modem, qui se sont abstenus au moment du vote, au grand dam de leurs alliés de la majorité présidentielle.
- "Texte politicien" -
Renaissance espère que ce revers ne se reproduira pas dans l'hémicycle pour ce texte à la "portée éminemment symbolique", qui vise à "conforter un usage républicain" et à "consacrer une pratique qui est répandue", plaide son rapporteur, le député macroniste Mathieu Lefèvre.
"Ce sera un vote qui départagera ceux qui sont en faveur de la poursuite de la construction européenne et ceux qui ont l'Europe et le drapeau honteux", a-t-il lancé mardi devant la presse.
C'est au nom de leur engagement européen que les groupes socialiste et écologiste à l'Assemblée ont ainsi indiqué mardi qu'ils voteraient en faveur du texte. Tout en déplorant une initiative "opportuniste", selon la députée PS Christine Pires-Beaune, et "pas loin d'un texte politicien" pour l'écologiste Jérémie Iordanoff.
"On continue à penser que ce texte n'était pas utile", a déclaré de son côté le député Modem Erwan Balanant, tout en estimant que ses collègues présents "voteront sans doute pour le texte".
Côté LR, le vote contre semble acquis: "je n'ai aucun problème avec le drapeau européen, mais l'Europe, c'est un choix pas une obligation", a fait valoir le chef de file du groupe à l'Assemblée, Olivier Marleix.
- Européennes à l'horizon -
Ce débat sur les drapeaux a donné la possibilité à chacun de se positionner à un an d'un scrutin européen qui ouvrira la deuxième partie du quinquennat d'Emmanuel Macron.
A gauche, l'eurodéputée LFI Manon Aubry a suscité la polémique lundi en présentant le drapeau européen comme "une forfaiture démocratique", en allusion au référendum de 2005 sur la Constitution européenne, rejetée par le peuple, mais dont la substance a été ensuite approuvée par l'Assemblée nationale.
Partisane d'un accord pour une liste unique des partis de gauche aux européennes comme lors des législatives de l'an dernier, elle a été attaquée par ses alliés.
"Non, l'Europe n'est ni LE problème, ni une forfaiture!", s'est emporté sur Twitter l'eurodéputé écologiste Yannick Jadot, dont le parti tient à présenter sa propre liste.
Le député européen Raphaël Glucksmann (Place Publique), qui avait dirigé une liste commune entre sa petite formation et le Parti socialiste aux européennes de 2019, a lui saisi l'occasion pour rejeter une alliance avec les Insoumis. "Ce drapeau européen est un symbole de liberté", a-t-il estimé sur France 2.
Dans une tribune dans Le Monde, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, estime que l'"Europe n'est pas par essence libérale, elle est un espace toujours en construction". Et il ajoute qu'il faut œuvrer pour y "changer de paradigmes" sans "refuser les compromis".
Marine Le Pen, dont le parti était arrivé en tête en 2019 avec 23,34% des voix devant Renaissance (22,42%), a elle dénoncé sur Sud Radio une UE qui décide "de plus en plus de choses", fustigeant des "injonctions de Bruxelles de plus en plus délétères et mortifères", notamment dans le domaine de l'immigration.
Un sujet également abordé par le président des Républicains, Eric Ciotti, qui a estimé sur France Inter que le droit national devait "primer" en matière migratoire sur toute disposition européenne.
AFP