Les indépendantistes de Catalogne désignent dimanche, trois mois et demi après les élections régionales, un nouveau président chargé de conduire à la sécession d'avec une Espagne qui peine à se doter d'un nouveau gouvernement pour relever ce défi.
Dans un retournement de situation de dernière minute, le président régional sortant Artur Mas a cédé samedi aux pressions de ses détracteurs et renoncé à garder son poste. Le retrait de sa candidature a permis la formation d'une coalition de gouvernement, qui va des conservateurs à la gauche anti-capitaliste, décidée à profiter de sa majorité absolue au parlement régional pour proclamer d'ici 18 mois l'indépendance de la Catalogne.
Dimanche soir, les députés indépendantistes confirmeront Carles Puigdemont, 53 ans, pour succéder à Artur Mas, aux termes d'un compromis entre les formations sécessionnistes. Membre du même parti qu'Artur Mas, Puigdemont, journaliste de langue catalane, est maire du fief indépendantiste de Girone, à 100 km au nord de Barcelone.
"Nous avons un projet en marche, solide et qui va dans la bonne direction", a-t-il commenté samedi sur son compte twitter après l'accord in extremis qui permet aux indépendantistes de reprendre leur bras de fer avec Madrid.
La loi accordait aux parlementaires catalans jusqu'à dimanche soir, à minuit, pour investir un gouvernement régional.
Les indépendantistes regroupent leurs forces alors qu'à Madrid les élections législatives du 20 décembre ont laissé un parlement fragmenté, où les conservateurs du chef du gouvernement sortant Mariano Rajoy ont perdu la majorité absolue et cherchent en vain des partenaires pour former une coalition.
Face à la rébellion de la région la plus riche d'Espagne, le cabinet de M. Rajoy a insisté samedi sur la nécessité pour le "prochain gouvernement d'Espagne de compter sur une large base parlementaire qui garantisse la stabilité et la capacité (de) faire face au défi indépendantiste".
M. Rajoy espère parvenir à un accord avec le Parti socialiste (PSOE), deuxième force politique en Espagne, et avec le parti libéral Ciudadanos, opposés comme lui à l'indépendance de la Catalogne. Mais le PSOE vise jusqu'à présent une alliance avec la gauche radicale de Podemos et des partis nationalistes en Catalogne et au Pays basque.
- Le danger de nouvelles élections -
Après avoir écarté Artur Mas dont la candidature était trop controversée, les indépendantistes veulent mettre en oeuvre le programme qu'ils avaient promis d'appliquer après avoir remporté la majorité absolue de 72 sièges sur 135 au parlement régional, avec 47,8% des voix, le 27 septembre dernier.
Dès novembre, ils avaient adopté une résolution proclamant le début du processus de sécession et l'insoumission aux institutions de l'Etat espagnol.
Mais leur plan avait failli échouer en raison du désaccord entre les 62 députés de la coalition "Junts pel si" (Ensemble pour le oui), formée par Artur Mas, et les 10 députés anti-capitalistes de la Candidature d'unité populaire (CUP). La petite formation indépendantiste d'extrême gauche refusait de reconduire Artur Mas à la tête du gouvernement, lui reprochant quatre ans de politique d'austérité et la corruption de son parti.
Le retrait de M. Mas permet d'éviter la convocation de nouvelles élections, les quatrièmes depuis 2010 en Catalogne, où les indépendantistes risquaient de perdre leur toute nouvelle majorité.
"Ils savent que s'il y avait de nouvelles élections, leur projet échouerait lamentablement", a commenté Inès Arrimadas, leader de Ciudadanos en Catalogne.
Le pacte conclu entre la CUP et "Junts pel si" garantit la stabilité du nouveau gouvernement régional parce que les anti-capitalistes se sont engagés à ne jamais laisser la coalition seule face aux 63 députés de l'opposition.
Le parlement doit voter vers 20H00 GMT l'investiture de Carles Puigdemont, qui devra former ensuite son cabinet. Les premières lois qu'il devra présenter sont la création d'administrations fiscale et de sécurité sociale pour la Catalogne.
- © 2016 AFP
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