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Syrie: le régime sous pression pour entrer dans le dur des négociations

  • Publié le 21 mars 2016 à 20:33

Pressé par l'ONU d'abattre ses cartes, le régime syrien a entamé lundi à Genève une deuxième semaine de discussions indirectes avec une opposition déterminée à ouvrir les dossiers qui fâchent, à commencer par le sort du président Bachar al-Assad.


Après un week-end de pause, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, a repris ses consultations dans l'espoir de trouver une issue politique à une guerre qui a fait 270.000 morts et forcé des millions de Syriens à l'exode.
En début d'après-midi, il a de nouveau reçu la délégation de Damas, sur laquelle il avait mis la pression vendredi.
Appelant les négociateurs du régime à dépasser les déclarations de principe, le diplomate leur avait réclamé des propositions concrètes, notamment sur "l'organe de transition" qui, selon la feuille de route fixée par l'ONU, doit naître à Genève.
Cette question est "la mère de toutes les batailles", selon Staffan de Mistura, bien conscient que de précédentes tentatives de négociations ont achoppé sur ce point.
Pour le régime, cet organe ne peut être qu'un gouvernement élargi à quelques ministres d'opposition, mais toujours dirigé par Bachar al-Assad. L'opposition réclame un organe ayant les pleins pouvoirs dans lequel le président Assad n'aurait aucun rôle.
Pour détailler sa position, le Haut comité des négociations (HCN), principale coalition de l'opposition, rencontrera à nouveau mardi Staffan de Mistura, qui lui a délivré un satisfecit pour ses propositions "substantielles" jusqu'ici.
L'équipe du HCN s'est renforcée avec l'arrivée à Genève lundi de son coordinateur Riad Hijab.
- Combats à Palmyre -
Sur le terrain, les forces loyales au régime ont essuyé un sérieux revers dans leur tentative de reprendre la cité antique de Palmyre (centre) au groupe Etat islamique (EI), avec la perte de 26 combattants à quatre kilomètres de la "perle du désert syrien".
Une trêve, entrée en vigueur le 27 février, a permis la reprise des pourparlers en Suisse après un premier round avorté en début d'année. Mais le cessez-le-feu, parrainé par Washington et Moscou, ne s'applique pas aux groupes jihadistes.
Lundi, des tensions sont apparues entre les deux puissances, l'armée russe accusant l'armée américaine de ne pas vouloir discuter du suivi de la trêve.
Pour un diplomate occidental, cette sortie n'est toutefois qu'une diversion russe "pour s'éloigner du sujet central, une transition sans Assad."
Une rencontre à Moscou, prévue cette semaine, entre les chefs des diplomaties américaine John Kerry, russe Sergeï Lavrov et le président Vladimir Poutine, pourrait permettre d'arrondir les angles.
Elle sera également "significative" pour le dialogue à Genève, a expliqué à l'AFP Karim Emile Bitar, directeur de recherches à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
Allié historique du régime de Damas, Moscou a permis à Bachar al-Assad de regagner du terrain, avec une opération militaire lancée fin septembre.
Il y a une semaine, l'annonce-surprise par Vladimir Poutine du retrait partiel des troupes russes a toutefois augmenté la pression sur Damas.
Selon M. Bitar, "la décision russe de retrait n'équivaut pas à un lâchage du régime d'Assad mais elle pourrait inciter ce dernier à se montrer un peu moins sûr de lui et à faire des concessions un peu plus significatives qu'il ne l'aurait souhaité."
- "Pied de nez" -
Sur la défensive, les négociateurs du régime se font plutôt discrets à Genève et cherchent, selon l'opposition, à jouer la montre.
Staffan de Mistura avait initialement prévu que l'actuel round de discussions s'achève jeudi soir et qu'une nouvelle session ait lieu après une dizaine de jours de pause, soit une reprise autour du 4 avril.
Le régime, qui organise des élections parlementaires le 13 avril, ne souhaite pas reprendre le dialogue avant, notamment parce que "cinq membres de la délégation sont candidats", a expliqué une source proche de Damas.
Pour le HCN, ces élections - annoncées en février - sont "illégitimes" et le calendrier doit être tenu.
"La volonté d'organiser des élections en avril est en contradiction flagrante avec le processus", estime aussi Karim Emile Bitar. En les annonçant "le régime semblait vouloir faire un pied de nez aux négociateurs", mais depuis "la donne a changé considérablement."

Par Caroline Nelly PERROT - © 2016 AFP
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