Protection des cétacés

Observation des baleines : la nouvelle réglementation fait des vagues

  • Publié le 12 juin 2025 à 03:00
  • Actualisé le 13 juin 2025 à 13:51

La saison des baleines débute à La Réunion. Le mercredi 4 juin 2025, la préfecture a publié un arrêté préfectoral pour mieux encadrer l’approche, l’observation et la mise à l’eau à proximité des cétacés. Objectif : concilier tourisme et préservation d’espèces fragiles, dans un contexte de surfréquentation et de comportements à risques. Si la mesure est saluée par les associations environnementales et plusieurs acteurs du secteur, elle suscite des inquiétudes chez certains professionnels de la mer. (Photos www.imazpress.com)

Tous les ans, de juin à octobre, les baleines à bosse se croisent au large des côtes réunionnaises, souvent accompagnées de dauphins. Un spectacle naturel prisé, devenu une attraction touristique majeure. Mais face à l’augmentation du nombre de navires et de mises à l’eau, et à certaines pratiques jugées intrusives, l’État a décidé de durcir les règles.

- Ce que dit le nouvel arrêté -

Ce nouvel arrêté préfectoral, fruit d’une concertation engagée en 2024 avec les professionnels, les scientifiques et les associations, entre en vigueur pour la saison 2025. Parmi les principales dispositions du texte :

• Trois embarcations maximum peuvent s’approcher d’un groupe de cétacés,
• Sept personnes à l’eau simultanément, encadrement compris,
• Observation depuis une embarcation autorisée de 9 heures à 16 heures et mise à l’eau de 9 heures à 13 heures uniquement,
• Entre 16 heures et 18 heures, seuls les engins de plage et les navires à propulsion décarbonée sont autorisés à s’approcher,
• Vitesse maximale de navigation fixée à 10 nœuds dans la zone entre la baie de Saint-Paul et le Grand Cap, du 1er juillet au 30 septembre,
• Normes techniques renforcées pour les navires de mise à l’eau, afin de garantir la sécurité des usagers.

Lire aussi - Mise à l'eau contrôlée et horaires restreints : la préfecture durcit la réglementation pour mieux protéger les cétacés

"Il ne s’agit pas de brider l’activité touristique, mais de la rendre compatible avec la préservation de la biodiversité", affirme Philippe Malizard, sous-préfet de Saint-Paul. Écoutez.

- Réduire la pression sur les cétacés -

Pour Nicolas Le Bianic, directeur de la mer Sud Océan Indien (DMSOI), ce texte vise à "limiter la pression exercée sur les cétacés", en encadrant des pratiques qui, jusqu’ici, manquaient parfois de rigueur. "Ce n’est pas un loisir comme un autre. L’approche des cétacés doit se faire dans le respect d’un cadre strict". Écoutez.

Un avis partagé par Jonathan Cotto, chargé de mission au Centre d’Étude et de Découverte des Tortues Marines (CEDTM) : "Depuis quelques années, on observe un véritable emballement autour de l’activité, avec des dérives parfois dangereuses pour les animaux. Cette nouvelle réglementation permet de redonner de la cohérence à la pratique". Écoutez.

L'équipe Quiétude, qui fait partie de l'association CEDTM, est spécialisée dans la sensibilisation et l'amélioration des conditions d'observation des cétacés.

Du côté de ces associations de protection de la faune marine, la mesure est accueillie avec soulagement. Pour Jean-Marc Gancille, responsable communication et développement chez Globice, association spécialisée dans la biologie et l'écologie des cétacés, il était temps : "Il faut arrêter de banaliser le dérangement des cétacés. La faune marine n’est pas un décor pour touristes. Cette réglementation va dans le bon sens". 

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- Des professionnels de la mer partagés -

Si les scientifiques saluent ce durcissement, certains acteurs du secteur expriment leurs réserves. Christian Lucas, gérant de All Boat Location 974 et moniteur de plongée indépendant, estime que "la mesure est nécessaire", mais regrette un manque de soutien pour les petites structures. "On nous impose des règles de plus en plus strictes, sans nous donner les moyens de nous adapter. Le risque, c’est aussi de voir les tarifs augmenter". Écoutez.

Un point de vue confirmé par Jean-Yves Le Barbu, moniteur de plongée dans un club associatif : "On a l'habitude de faire quelques sorties et de rester dans les clous. Mais pour certains professionnels, ça risque d'être compliqué de faire moins de mises à l'eau".

- Appel à la responsabilité collective -

La préfecture insiste sur le caractère non négociable de la préservation des cétacés : les contrôles seront intensifiés en mer et à terre. Les contrevenants s’exposeront à des sanctions administratives et pénales. "Nous comptons sur le sens des responsabilités de chacun. Il est tout à fait possible de continuer à observer les baleines et les dauphins sans les perturber", conclut Philippe Malizard.

Jean-Marc Gancille mise également sur le respect dont chacun doit faire preuve. "Notre intérêt commun est de préserver ce patrimoine naturel, de faire en sorte que nous puissions le plus longtemps possible cohabiter avec ces animaux qui nous émerveillent tous", il explique. "Il faut qu'on arrive à trouver la bonne limite qui permet à la fois de profiter de leur présence, de ce spectacle, mais de respecter leurs besoins vitaux". Écoutez.

Alors que Globice constate les avancées et les salue, l'association évoque certains points qui sont encore à discuter : "Certaines choses pourront progresser dans les années à venir, en concertation avec tout le monde. Il ne s'agit pas d'imposer une vision unique; celle des animaux ou celle de l'activité économique; mais de trouver les meilleurs compromis possibles". 

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Placée sous le signe de la mer, l’année 2025 marque un tournant dans la manière d’interagir avec la faune marine. Alors que la saison des baleines débute, l’administration, les scientifiques et les acteurs du secteur appellent à une pratique plus respectueuse pour faire avancer le tourisme bleu à La Réunion.

vg / www.imazpress.com / redac@gmail.com

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4 Commentaires
Michto
Michto
2 jours

Quelle hypocrisie ....
Certes de nouvelles mesures vont dans le bon sens mais la préfecture à lâché face aux pressions des structures de mise à l'eau commerciales qui s'engraissent sur le dos des animaux en ne respectant pas leur tranquillité.
Cette activité dois être interdite comme dans bon nombre de pays du monde ...

Réyonez
Réyonez
2 jours

Très bien et bravo à l’état pour cette nouvelle réglementation. Beaucoup de professionnels faisaient n’importe quoi et le risque était grand de blesser ou d’apeurer les baleines ! La mer appartient aux animaux pas aux humains.

JaK
JaK
2 jours

Bravo

D. CLAIN
D. CLAIN
2 jours

Qu’en est il de l’usage des drones ?
Il serait bien de le rappeler !