Au début du mois d'octobre 2011, Manuel Valls, alors candidat aux primaires socialistes pour l'élection présidentielle, était venu faire campagne à La Réunion dans l'indifférence de la plupart des élus et parlementaires socialistes de l'île. Un manque de considération qui a bien changé maintenant que l'ancien maire d'Évry occupe le fauteuil de Premier ministre...
Les temps peuvent vite changer en politique. Promu Premier ministre le 31 mars 2014, Manuel Valls peut en témoigner. Boudé, critiqué, vilipendé dans son propre camp à l’aube de la primaire socialiste pour l’élection présidentielle de 2012, le voici désormais – pour une partie du PS tout du moins – l’homme providentiel, le sauveur d’un gouvernement bien mal embarqué.
Il n’y a qu’à se pencher sur l’attitude des élus socialistes réunionnais, exemplaires en la matière. À l’instar des cinq députés reçus à Matignon ce mardi 20 mai : Ericka Bareigts, Monique Orphé, Patrick Lebreton, Jean-Claude Fruteau et Jean-Jacques Vlody. Tous posent fièrement autour de Manuel Valls et de la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin, pour une photo qu’ils n’hésitent pas à diffuser via les réseaux sociaux.
Et tous de saluer, à l’image de Monique Orphé, un Manuel Valls "à l’écoute des attentes de la population réunionnaise", au cours d’un "échange constructif". Il faut dire que la députée de la 6ème circonscription avait été la seule élue socialiste à rencontrer le futur Premier ministre en visite à La Réunion en octobre 2011, lorsqu’il n’était qu’un "petit" candidat aux primaires.
Ses collègues du PS local s’étaient en effet montrés bien plus discrets autour d’un Manuel Valls esseulé dans son propre parti comme lors de son séjour réunionnais. Certes, il avait été reçu à la chambre de commerce par le président Ibrahim Patel et au conseil général par la présidente Nassimah Dindar. Il avait rencontré une délégation du parti communiste réunionnais et sillonné les rues de Saint-Leu aux côtés de Thierry Robert. Mais en dehors de Monique Orphé pour une petite visite de l’hôtel de ville de Saint-Denis, pas un seul dignitaire socialiste ne s’était manifesté.
C’est que l’ancien maire d’Évry ne représentait qu’un courant minoritaire au sein du parti socialiste. Il était l’émanation d’une "aile droite" honnie par toute une partie de son camp, voulait revenir sur les 35 heures, prônait des thèses sécuritaires. Pas question donc de prendre le risque de rouler pour un candidat crédité d’à peine 5 % des voix. Même si Manuel Valls fut le seul à avoir fait le déplacement jusqu’à La Réunion lors de cette campagne des primaires.
La donne a bien changé aujourd’hui. On se presse autour d’un des rares socialistes dépassant – pour combien de temps ? – la barre des 50 % d’opinions favorables.
En rencontrant le Premier ministre, les parlementaires socialistes sont dans leur rôle. Mais l’on peut se demander si ce dernier a gardé en mémoire son séjour réunionnais et le peu d’égards qui lui avaient été accordés. Se demander aussi si les élus socialistes locaux n’ont pas manqué de vision politique en négligeant à l’époque la visite de l’ambitieux Manuel Valls...
Nul doute qu’ils sauront se rattraper lors du prochain passage du Premier ministre, attendu à La Réunion avant la fin de l’année...
www.ipreunion.com