Lettre ouverte à l'association des maires mahorais

Mayotte : Éricka Bareigts appelle à "travailler ensemble pour que la solidarité nationale soit mobilisée"

  • Publié le 25 février 2025 à 06:31
  • Actualisé le 25 février 2025 à 16:38

Il y a quelques semaines, dans une lettre ouverte à la presse, le président de l'association des maires de Mayotte s'est adressé à la mairie de Saint-Denis, Éricka Bareigts. Pointant du doigt l'action de l'élue lorsqu'elle était ministre des Outre-mer, l'édile du chef-lieu a décidé de lui répondre à son tour par le biais d'une lettre ouverte que nous publions ci-dessous (Photo : rb/www.imazpress.com)

Ernest Renan disait : "Une nation est une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu'on a faits et de ceux qu'on est disposé à faire encore." 

Justement parce que comme vous le rappelez "les Mahorais sont des Français comme les autres", c’est tout l’intérêt des Mahorais que, comme je l’appelle de mes vœux, la France assume enfin ses responsabilités à Mayotte comme dans tous les Outre-Mer et qu’en conséquence, la solidarité nationale soit pleinement à l’œuvre après Chido.

C’est cet engagement de la Nation envers les Outre-Mer qui est historiquement défaillant et pour lequel je me suis engagée à Oudinot. À ce titre, Mayotte a été au cœur de mes préoccupations. 

C’est d’ailleurs le territoire sur lequel j’ai fait ma première visite officielle en tant que ministre des Outre- Mer. Vous vous interrogez ainsi sur mon action pour doter Mayotte d’infrastructures ou pour aligner les prestations sociales lorsque j’étais Ministre.

La loi Egalité réelle Outre-Mer que j’ai portée comprenait pourtant de nombreuses dispositions en faveur de Mayotte.

En particulier, puisque vous abordez spécifiquement cette question, cette loi a beaucoup contribué à l’alignement progressif des prestations sociales à Mayotte. 

Ainsi, par exemple, Mayotte a été alignée sur les autres Outre-Mer pour plusieurs prestations familiales telles que le complément familial ou l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé. Les petites retraites mahoraises ont aussi été revalorisées pour accélérer leur rattrapage avec les autres Outre-Mer.

Mais nous avons aussi mis en place des dispositifs tels que les cadres d’avenir qui visent à sélectionner des étudiants et professionnels mahorais à fort potentiel pour effectuer une formation en Hexagone ou à La Réunion dans un secteur jugé prioritaire durant laquelle ils bénéficieront d’aides au transport et à l’installation, et une indemnité mensuelle contre l’engagement qu’à l’issue de leur formation ils travailleront au moins 5 ans à Mayotte. 

D’autres dispositions spécifiques à Mayotte ont aussi pu être adoptées dans ce même texte, par exemple celles sur la crise foncière qui étaient portées par le sénateur Thani Mohamed Soilihi, maintenant membre du gouvernement, et qui ont permis de débloquer du foncier pour la construction de logements, d’écoles, etc.

Mayotte, comme tous les territoires ultramarins, a aussi bénéficié des dispositions générales de la loi Egalité réelle Outre-Mer. Ainsi, par exemple, des contrats de convergence dont l’une des ambitions était justement de programmer les investissements nécessaires pour permettre un rattrapage des infrastructures. 

Ce sont ce travail de concertation avec la population et les élus et cette attention aux besoins des territoires qui ont permis à ce texte d’être voté à l’unanimité.

Mon travail comme ministre ne s’est cependant pas limité à la loi Égalité réelle Outre-Mer. J’ai obtenu de nombreux arbitrages, notamment financiers, pour Mayotte. 

Ainsi les lois de finances pour 2017 et loi de finances rectificatives pour 2016 ont apporté de nombreuses mesures, en particulier au bénéfice des communes mahoraises dans le calcul de leurs dotations, mais aussi fiscales comme l’abattement à la taxe d’habitation à Mayotte que nous avons travaillé avec Ibrahim Aboubacar.

Des sommes ont aussi été débloquées, par exemple avec le Fonds exceptionnel d’investissement pour la construction d’écoles, comme le collège de Bouéni dont j’ai lancé la construction, ou pour la construction de la troisième retenue collinaire et d’une usine de dessalement supplémentaire lors de la crise de l’eau. 

Le département a aussi bénéficié d’une compensation du transfert de la compétence de l’aide sociale à l’enfance de 51 millions d’euros alors même que l’Etat avait continué à exercer en partie cette mission. Enfin, dans le cadre du plan pour la sécurité, des moyens humains supplémentaires avaient été débloqués par le ministère de l’Intérieur.

Tout ce travail s’est traduit par une augmentation de la programmation budgétaire entre 2016 et 2017 de 12,48% en autorisations d’engagement et 7,73% en crédits de paiement pour l’ensemble des dépenses budgétaires de l’Etat (auxquelles viennent donc s’ajouter les dépenses fiscales et celles de la Sécurité sociale) dont pour le seul ministère des Outre-Mer une augmentation de 93,4% des autorisations d’engagement et de 56,04% des crédits de paiement.

Vous le voyez, Monsieur le Président, le problème des Mahorais n’est pas avec les Réunionnais en général ou avec la ministre que j’ai été.

Il est d’ailleurs paradoxal de vouloir "rompre le cordon ombilical qui lie Mayotte et La Réunion" tout en refusant aux Réunionnais le droit de dire qu’ils ne souhaitent pas être seuls à être solidaires avec Mayotte.

La Réunion, et Saint-Denis en particulier puisque comme vous je suis maire, cumulent en effet les retards et difficultés vis-à-vis de l’Hexagone. Ainsi en 2023, à Saint-Denis, le taux de chômage était de 4 fois la moyenne nationale, le niveau de vie médian inférieur de 20% à celui de l’Hexagone.

Dans ce contexte, Monsieur le Maire, notre responsabilité est de travailler ensemble pour que la solidarité nationale soit mobilisée sans faille pour Mayotte, pour La Réunion et pour les Outre-Mer. C’est notre unité qui fera notre force.

Ericka Bareigts, maire de Saint-Denis

guest
3 Commentaires
Missouk
Missouk
1 mois

dixit la même qui il y a quelques semaines tenait des propos à la limite du racisme anti-mahorais...

La loose
La loose
1 mois

Si la Reunion doit régler les problèmes de Mayotte, alors la Reunion est dans la merde.

Bouquet
Bouquet
4 semaines

Viens voir l'ami le nombre de Réunionnais à Mayotte. On a l'impression qu'il y a que les mahorais qui vont à la Réunion.
Il faut demander à vos élus qui ne veulent pas que les structures soit ouvertes à Mayotte, mais juste avoir des antennes exemple L'aposté, Crédit agricole, tous les assurances, conservatoire botanique, littoral, ONF,
Et pourtant aujourd'hui on a de plus en plus de mahorais capables aussi de diriger ses structures, mais vos dignitaires bloquent. Moi je ne suis pas contre les entreprises Réunionnaises à Mayotte. Mais pour les structures, il est temps que Mayotte ne soit pas juste une antenne de Mayotte. Aujourd'hui, si on ferme les antennes, c'est beaucoup de chômage à la Réunion. Tous l'argent de Mayotte transit à la Réunion. Il est temps que chaque partie prenne ses responsabilités.