Olivier Hoarau interpelle le ministre des Outre-mer sur la réutilisation des eaux usées

  • Publié le 14 février 2023 à 18:30

Le maire du Port, Olivier Hoarau, interpelle ce mardi 14 février 2023 le ministre délégué aux Outre-mer, Jean-François Carenco dans une tribune. Dans celle-ci, l'édile réunionnais souligne les "freins" à la mise en place du projet de réutilisation des eaux usées traitées nommé VETSSE qui permettraient l'économie "d'un million de mètres cubes d’eau par an". Il demande donc au ministre, dans le cadre du prochain comité interministériel pour l’Outre-mer, "de débloquer tous les freins réglementaires pour que le projet VETSSE puisse enfin voir le jour", dans un contexte de déficit pluviométrique à La Réunion. Il fait notamment référence à un décret national relatif à la réutilisation des eaux usées traitées a limité la durée d’autorisation à cinq ans. Nous publions la tribune complète d'Olivier Hoarau ci-dessous (Photo d'illustration rb/www.imazpress.com)

Monsieur le Ministre,

2022 a été l’année la plus chaude jamais enregistrée en France, avec des épisodes de sécheresse sans précédent dans de nombreuses régions. 

La Réunion n’a pas échappé à cette crise puisque le mois d’octobre 2022 a été le mois le plus sec depuis 51 ans. Nos agriculteurs ont été les premiers impactés, eux qui avaient déjà été durement touchés par l’augmentation des coûts des matières premières. Dans plusieurs communes, des restrictions d’eau ont dû être instaurées.

Avec moins d’un mètre cube d’eau par an de précipitations, Le Port est la commune la plus sèche de l’île. Sur les 6 millions de mètres cubes d’eau consommés chaque année, près de la moitié le sont pour des usages autres que domestiques. C’est le cas notamment de l’irrigation des espaces verts (47 m²/ habitant) et de l’approvisionnement des sites industriels, nombreux sur le territoire. 

Par ailleurs, Le Port est situé au cœur de grands projets d’aménagement portés par le Territoire de la Côte Ouest, tels que l’Ecocité qui a vocation à accueillir plus de 35 000 nouveaux logements d’ici à 2050. L’enjeu du partage équitable et de l’accès à la ressource en eau se pose donc avec acuité sur ce petit territoire de 16,6 km².

Depuis 30 ans, la commune porte un projet de réutilisation des eaux usées traitées dénommé VETSSE. Il consiste à traiter les eaux en sortie de station d’épuration par un procédé technique extrêmement contrôlé et sécurisé dit d’osmose inverse. Ce projet a fait l’objet de plusieurs expérimentations dont les résultats ont démontré que l’eau ainsi traitée était d’excellente qualité et sans risque sanitaire. 

Grâce à VETSSE, un million de mètres cubes d’eau par an pourraient être économisés. Malgré cet intérêt écologique évident, le projet bute encore sur deux écueils réglementaires majeurs.  

En 2018, un arrêté préfectoral a autorisé le procédé pour l’arrosage tout en imposant des restrictions sanitaires excessives, excluant du périmètre 80% des espaces verts potentiellement éligibles. En outre, cet arrêté n’autorise pas la réutilisation des eaux usées traitées pour des usages industriels. 

En 2022, un décret national relatif à la réutilisation des eaux usées traitées a limité la durée d’autorisation à cinq ans. Cette durée est incompatible avec le montant des investissements (19 millions d’euros), leur durée d’amortissement et la mobilisation de fonds publics (FEDER). Elle ne permet pas de développer un modèle économique soutenable et sécurisé pour le maître d’ouvrage et ses partenaires potentiels (financeurs, concédant, etc.). 

Ainsi entravé, le projet, désormais de dimension intercommunale, ne peut toujours pas se développer.

Monsieur le Ministre, je vous demande solennellement, dans le cadre du prochain Comité Interministériel pour l’Outre-mer, de débloquer tous les freins réglementaires pour que le projet VETSSE puisse enfin voir le jour.

En effet, au-delà de son impact vertueux pour l’écologie, il ne fait pas de doute que la réutilisation des eaux usées traitées pourrait aussi avoir un impact favorable sur le prix de l’eau et donc sur le pouvoir d’achat des usagers.

Dans plusieurs autres pays (Singapour, Espagne, Israël, Namibie…), la réutilisation des eaux usées traitées est une réalité depuis de nombreuses années.  En France, elle concerne moins de 1% de l’eau usée traitée. 

Nous ne pouvons plus attendre que les sécheresses se multiplient et s’aggravent pour autoriser ce type de démarches. Alors, faisons, dès maintenant, de l’accès à l’eau notre priorité. 

« Au commencement de toute humanité est l'eau. Au commencement de toute dignité, de toute santé, de toute éducation, de tout développement. Dans l'ordre des priorités, rien ne précède l'accès à l'eau. »

Olivier Hoarau, Maire du Port

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