Belal est passé sur La Réunion il y a déjà plus de six mois, ravageant sur son passage des terrains agricoles, plantation comme chemin. Et pourtant, depuis six mois, nombreux sont les agriculteurs affirmant n'avoir toujours pas perçu un centime de l'aide d'urgence promise par le Département. Difficultés pour travailler, problèmes de trésorerie… Pour sa part la collectivité départementale indique que 4,74 millions d'euros d'aides ont déjà été versés. (Photo photo Sly/www.imazpress.com)
Le 29 janvier 2024, nous nous étions rendus chez Bernard Lauret, planteur dans le sud de l'île. Son terrain avait été profondément creusé par les fortes pluies.
Depuis rien n'a changé. Contacté le 26 juillet, l'agriculteur dit être toujours dans l'attente de l'aide financière du Département.
"Pour le moment rien n'a été versé. On me dit que c'est en pourparlers." Mais il le dit, il ne touchera "pas grand-chose". "Pour le moment c'est statué à 25 euros du mètre linéaire mais pour ma parcelle je pense qu'il faudrait entre 10.000 et 15.000 euros. Du coup je vais essayer d'avoir d'autres subventions", dit-il.
Bernard Lauret ne peut toujours pas accéder à certaines de ses parcelles. "Je suis un planteur planté", ajoute-t-il. "La campagne ne sera pas trop terrible".
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À la Plaine des Cafres, une vingtaine agriculteurs a mis en avant les difficultés suite au non-versement des aides "Belal".
"Nous sommes 19 associations à avoir fait la demande pour réparer les chemins d'exploitation dégradés et seulement quatre – à ma connaissance – à avoir obtenu les 60% de démarrage", affirme un adhérent de la FDSEA.
- Les agriculteurs attendent leurs aides -
"Nous sommes fin juillet et on a énormément d'agriculteurs qui n'ont pas reçu cette aide", déplore Stéphane Sarnon, président de la FDSEA.
"D'autres ont reçu les aides, mais elles ne correspondaient pas aides pertes qu'ils ont déclaré", ajoute-t-il.
Une aide d'urgence "Belal" annoncée par le Département de La Réunion le 1er février 2024 pour "la relance des exploitations agricoles impactées".
Sont concernés, "les cultures maraîchères, horticoles, vergers, bâtiments d’élevage, stress animal) affectés partiellement ou totalement par l’évènement climatique concerné".
"À chaque fois on est comme des mendiants pour se faire payer", lance-t-il. "Au départ on nous dit que les dossiers sont en instruction, que ça prend du temps mais au départ on parlait bien d'un dispositif d'urgence or Belal c'était il y a plusieurs mois."
La Chambre d'agriculture confirme également "l'important retard et des aides très faibles".
"Ils étaient beaux les discours après le passage du cyclone. On nous a promis monts et merveilles, une aide du Département qui devait vite arriver."
Mais voilà "ceux qui avaient les moyens ont dû faire face avec leurs fonds propres mais pour ceux avec des trésoreries compliquées, les chemins d'accès restent impraticables", expliquait également le président des Jeunes Agriculteurs, Guillaume Sellier lors d'un précédent entretien.
Guillaume Sellier qui, ce mercredi 31 juillet 2024, doit rencontrer les services du Département pour évoquer cette situation.
Interrogé, le Département a expliqué qu'à "ce jour, la collectivité a versé 4,74 millions d'euros en faveur de 1.517 agriculteurs et 15 associations d'agriculteurs".
Des aides "couvrant les besoins de relance des productions maraichères, soutien de la fertilisation des parcelles cannières et réparation des chemins d'exploitation".
Toutefois, reste à payer "des aides individuelles (environ 0,6 million d'euros) pour les derniers dossiers en instruction (représentant moins de 7% du montant total des aides allouées)".
- Pour les chemins… il faudra attendre la fin des travaux -
Concernant les chemins d'exploitation, "l'aide publique est de 25 €/ml de chemins d’exploitation à réparer avec un plafond de 450.000 euros par organisme. Les engagements des parties seront définis par convention. (...)", indique le Département sur son site.
"Les sommes résiduelles à verser (évaluées à 3,5 millions d'euros) concernent principalement des soldes de subvention pour la réparation des chemins d'exploitation qui ne pourront être payées qu'après l’achèvement des travaux par les associations d'agriculteurs (environ 2,9 millions d'euros)", ajoute le Département.
Suite à ce cyclone, "l'intervention de la collectivité en faveur des agriculteurs devrait donc atteindre un niveau inédit (plus de 8 millions d'euros d'aide), témoignant du soutien indéfectible du Département envers le monde agricole", précise le Conseil départemental.
Pour rappel, les aides versées par la collectivité lors des derniers épisodes cycloniques s'élevaient à :
- 2018 (3 cyclones Berguitta, Dumazile, Fakir) : 5,1 millions d'euros versés
- 2022 (1 cyclone Batsirai) : 6,5 millions d'euros versés
- "On est sur le fil" -
Des agriculteurs qui, sans aides, voient leur trésorerie fondre à vue d'œil. "Tout cela n'arrange pas les agriculteurs qui sont déjà impactés par la crise, le prix des intrants et ont beaucoup de difficultés à produire", indique Stéphane Sarnon.
Des maraîchers, planteurs, obligés de travailler à côté "pour compenser".
"On est sur le fil", alerte le président de la FDSEA.
Ce que demande la FDSEA, et alors que "les agriculteurs ont fait des efforts, sont partis replanter, ont relancé leur production en puisant dans leur trésorerie", c'est que "le Département réponde à ses devoirs envers ces agriculteurs qui se sont investis".
"Les fournisseurs sont compréhensifs mais ils demandent à être payés."
"On interpelle le préfet et le Département et s'il n'y a pas de réaction on va monter au créneau", prévient Stéphane Sarnon.
"On ne critique pas le Département mais il faut trouver des solutions. Ce n'est pas possible d'attendre pour avoir des aides d'urgence."
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Et on appelle cela aides d'urgences.
Avec certains fonctionnaires l'urgence a été oubliée.
C'est marrant, le département est toujours en fête !