Nouvelle année difficile pour les planteurs

Campagne sucrière : la saison s'annonce particulièrement compliquée

  • Publié le 6 juillet 2024 à 07:20
  • Actualisé le 10 juillet 2024 à 06:09

Le jeudi 11 juillet 2024 démarre la campagne sucrière. Elle s'annonce d'ores et déjà particulièrement compliquée. Prévisions mauvaises, retard de la canne, mauvais temps… Tous ces facteurs combinés rendent l'année difficile pour les planteurs. Des planteurs qui au fil des années, voient la filière canne en décourager plus d'un (Photo d'illustration RB/www.imazpress.com)

"En termes de tonnage, les prévisions ne sont pas fameuses", note Guillaume Sellier, président des Jeunes Agriculteurs.

Interrogé, le planteur et président de l'Upna, Dominique Clain, est lui aussi très pessimiste quant à cette campagne. "Ce sera une mauvaise campagne", répondit-il.

D'après les prévisions, "on part pour une année compliquée", confirme Olivier Fontaine, secrétaire général de la Chambre d'agriculture. "Les prévisions sont très mauvaises. Elles tournent autour de 1 million 380.000 tonnes selon le CTICS (Centre technique interprofessionnel de la canne et du sucre)", dit-il.

Des estimations confirmées par Tereos." On a des estimations pour 2024 de 659.000 tonnes pour l'usine du Gol et 721.000 pour Bois Rouge.

Selon l'agriculteur Guillaume Sellier, si le tonnage ne sera pas énorme, "la richesse aussi risque d'être faible, notamment à cause des périodes pluvieuses très marquées".

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- Une campagne impactée par le retard de l'année précédente -

L'une des raisons qui pourrait expliquer cette saison morose, le retard pris par rapport à la dernière campagne.

Si cette année, la campagne sucrière va démarrer à une date "normale" à l'instar de celles des années ultérieures, hormis celle de 2023. Le retard vient de la campagne précédente.

"L'an dernier, la campagne a commencé tard et fini tard et donc forcément cette année il y aura un décalage", explique le représentant syndical des Jeunes Agriculteurs.

"On n'a pas pu faire l'entretien des champs comme il le fallait", explique le président de l'Upna.

"En fait il y a eu l'effet positif de la relance, mais annulé par les deux cyclones et tempêtes connus en début d'année", ajoute Florent Thibault, président de Teros. "Tout cela a fait que la canne ne s'est pas bien remise."

Après, "est-ce que le climat durant la campagne sera favorable à la pousse de la canne en fin de coupe sera-t-il sec et donc favorable à la richesse mais défavorable au tonnage ?", se questionne Tereos.

En 2023, la récolte s’est achevée à 1,425 million de tonnes de canne.

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- Des cannes pas épargnées par les fortes pluies -

Le passage successif de Belal, Candice et des fortes pluies n'a pas non plus épargné les planteurs.

"On a quand même vu des cyclones, du mauvais temps et de la sécheresse l'année passée et forcément cela impact la production", lance Olivier Fontaine.

Ce que déplorent certains agriculteurs également et qui les met en difficulté pour cette campagne sucrière, c'est le fait que les chemins agricoles n'aient pas tous pu être remis en état après la météo désastreuse du début d'année.

"Ils étaient beaux les discours après le passage du cyclone. On nous a promis monts et merveilles, une aide du Département qui devait vite arriver."

Mais voilà "ceux qui avaient les moyens ont dû faire face avec leurs fonds propres mais pour ceux avec des trésoreries compliquées, les chemins d'accès restent impraticables", explique le président des Jeunes Agriculteurs.

Bernard Lauret en est d'ailleurs le meilleur exemple. Le 29 janvier 2024, nous nous étions rendus chez lui pour constater le trou béant qu'avaient laissé les fortes pluies dans son chemin agricole. Depuis… rien n'a changé. "Je suis un planteur planté,", dit-il en gardant toutefois le sourire.

Mais il le sait : "la campagne ne sera pas trop terrible". "La canne n'a pu repris, les sols ont été lessivés."

Des cannes sur des parcelles que le planteur ne peut toujours pas accéder. "J'attends toujours le Département. Mais j'espère que cela sera débloqué à la fin de l'année.

En attendant, "je vais essayer de nettoyer d'autres parcelles", confie Bernard Lauret.

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- Une filière en manque de bras -

À cela s'ajoute un découragement général de la profession. "Malgré la convention canne plutôt favorable pour les planteurs mais malheureusement la conjoncture a suivi et ce que l'on a obtenu a été masqué par les effets conjoncturels", déplore Guillaume Sellier.

"On a subi la crise ukrainienne, l'inflation, l'envolée des prix des intrants, combiné au manque de main d'œuvres, la suppression de certaines molécules d'herbicides fait que forcément la spirale est négative", ajoute-t-il.

"Les problèmes de trésorerie d'année en année impactent également les producteurs qui n'ont plus les moyens de produire correctement", déplore le secrétaire général de la Chambre d'agriculture.

"On sent un découragement total au sein de la filière agricole dans son ensemble et encore plus les jeunes qui veulent s'installer", se désole Guillaume Sellier.

"Ils ont la volonté de s'installer mais avec la conjoncture et la gestion du Feader (Fonds européen agricole pour le développement rural) pour l'installation c'est le bordel", dit-il, ne mâchant pas ses mots.

"La première commission a eu lieu en octobre 2023 et là nous sommes en juillet et les agriculteurs n'ont toujours pas reçu le moindre centime", peste-t-il.

Un découragement qui pousse certains "à abandonner leurs terrains et à passer à autre chose". "D'année en année, la filière est en train de chuter."

D'autant que "le métier n'est plus attractif comme avant", note Olivier Fontaine.

- Un plan de relance pour relancer la canne -

Pour tenter de sortir de la crise, l'interprofession a émis "le souhait de mettre en place un plan de relance".

Selon Dominique Clain, "le seul modèle – on le dit et on le répète – c'est celui de la mécanisation et tant que l'on n'a pas mis cela au point il n'y aura pas de relance de la filière canne".

"Il y a quelques fondamentaux plus solides qu'avant. Il ne faut pas oublier la convention canne qui a permis de remettre à niveau le revenu des planteurs, le plan de relance avec un soutien aux intrants et le levier de productivité mis en place pour les terrains des planteurs en difficulté", explique Florent Thibault.

"Lors du dernier bureau, nous avons validé 71 hectares pour bénéficier du plan de relance d'un montant de 256.000 euros."

Une première session qui sera renouvelée pour remettre en état les 7.000 hectares de friches à La Réunion et "redonner un nouveau souffle à la filière canne".

Un plan dont les effets se feront sentir certainement "à plus ou moyen terme".

"Il faut se dire que les cultures prennent du temps à se mettre en place et les effets se verront d'ici deux ou trois ans", déclare Olivier Fontaine.

Toutefois, malgré cela, "on sent l'envie de faire de la canne à La Réunion".

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- Un appel à la prudence sur les routes de l'île -

Le secrétaire général de la Chambre qui a tenu également à rappeler les Réunionnais à faire preuve de la plus grande des prudences sur les routes.

"Il faut faire passer des messages en termes de sécurité routière, de sécurité au travail car il y a toujours de plus en plus d'accident et c'est inquiétant."

De la vigilance de la part des agriculteurs et surtout des usagers de la route. "Attention, les tracteurs restent de gros engins, il faut partager la route.

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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3 Commentaires
Non au RN
Non au RN
3 mois

Solidarité avec les planteurs

Tech
Tech
3 mois

Et quand vos impôts vont pour les grateurs d'ki, ça vous dérange pas ?

Pierrot 974
Pierrot 974
3 mois

Chaque année, il a fait trop chaud ou trop froid, trop sec ou trop humide...
Les agriculteurs bloqueront... et nous paierons des primes compensatrices à travers nos impôts.
Ce n'est que la routine.