Elles se multiplient

Les cagnottes en ligne, une nouvelle façon de militer

  • Publié le 12 août 2023 à 07:25
  • Actualisé le 12 août 2023 à 07:28

Longtemps cantonnées à lever des fonds pour des cadeaux d'anniversaires ou des projets professionnels ou personnels, les sites de cagnotte en ligne semblent de plus en plus revêtir une prise de position idéologique. Un changement parfaitement illustré par le succès rencontré par la cagnotte ouverte en soutien au policier ayant causé la mort du jeune Nahel, après un refus d'obtempérer à Nanterre. Une forme de militer sans avoir besoin de manifester. (Photo photo RB/www.imazpress.com)

Si la levée de dons a toujours fait partie de la vie militante, notamment via les caisses de grève, le phénomène semble plutôt nouveau en matière de violences policières, en France en tout cas. A la suite de la mort de Nahel, tué par balle par un policier à Nanterre, plus d'un million d'euros ont été récoltés…pour soutenir le policier mis en détention provisoire. Parallèlement, la cagnotte en soutien à la famille de Nahel a atteint près de 500.000 euros.

Derrière ces sommes, c'est tout une opinion qui s'affiche : ceux qui soutiennent inconditionnellement les forces de l'ordre, et ceux qui soutiennent la famille de la victime. L'organisateur de la cagnotte du policier, Jean Messiah, ne s'est d'ailleurs pas caché de son soutien indéfectible à la police, et ce malgré la mise en détention provisoire de l'agent mis en cause.

Le même schéma s'est renouvelé quelques jours plus tard, après la mise en détention provisoire d'un autre policier, cette fois-ci à Marseille. Plus de 75 000 euros ont été levés pour ce dernier et ses quatre collègues mis en examen. Concernant la victime, Hedi, un peu moins de 48 000 euros ont été récoltés.

- Un marqueur de l'opinion publique -

Si, sur le papier, ces sommes peuvent paraître anecdotique, elles revêtent en réalité une posture idéologique assez claires. Et permettent, dans une certaine mesure, de mesurer où se situe l'opinion publique. Tout particulièrement en cette période de crise, où l'inflation touche durement une grande partie de la population : investir dans une cagnotte quand l'argent se fait rare marque une réelle prise de position politique, sans avoir à bouger de chez soi. Un phénomène amplifié par les réseaux sociaux et leur capacité à rendre viral les cagnottes, que cela concerne des affaires policières, ou des appels à la solidarité des plus banals.

Le même phénomène avait aussi pu être observer à l'époque des Gilets jaunes, quand une cagnotte avait été créée en soutien à Christophe Dettinger, condamné pour l'agression de gendarmes. Plusieurs milliers d'euros avaient été levés pour l'aider à ses frais de justice, avant que la cagnotte ne soit suspendue.

Ce deux poids, deux mesures interrogent d'ailleurs, alors que de nombreux signalements ont été fait afin d'annuler les cagnottes en soutien aux policiers mis en examen. La plateforme a estimé qu'elles n'enfreignaient pas la loi, ces dernières étant destinées aux familles des policiers, et non à leur frais de justice. A noter tout de même qu'une enquête contre la cagnotte ouverte par Jean Messiha, suite à une plainte pour "escroquerie en bande organisée, recel d’escroquerie en bande organisée, détournement de finalité d’un traitement de données à caractère personnel et recel de détournement de finalité d’un traitement de données à caractère personnel".

Face à ce nouveau phénomène, certains élus veulent s'emparer du flou juridique qui entoure ces cagnottes. Ils sounaitent en effet "réfléchir à ce qu'on ne puisse pas utiliser des cagnottes pour inciter à la haine", a précisé le député du Calvados Arthur Delaporte à BFMTV. A voir désormais ce qui en ressortira.

www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

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