Exclusion des réseaux sociaux, confiscation du téléphone...

Harcèlement scolaire : le gouvernement annonce une série de mesures, sans (tout-à-fait) convaincre

  • Publié le 28 septembre 2023 à 10:24

Après plusieurs drames survenus dans l'Hexagone, la Première ministre Elisabeth Borne a présenté un plan interministériel pour lutter contre le harcèlement scolaire ce mercredi 27 septembre 2023. Plusieurs mesures ont été annoncées, notamment la saisine automatique du parquet en cas de signalement, le bannissement des réseaux sociaux lors de l'ouverture d'une instruction judiciaire contre un harceleur présumé ou encore la confiscation du téléphone portable en cas de condamnation. A La Réunion, qui n'est pas épargnée par ce phénomène, les syndicats et associations de parents d'élèves ne sont pas vraiment convaincus par la série d'annonces (Photo d'illustration rb/www.imazpress.com)

La Première ministre Elisabeth Borne a sonné, ce mercredi 27 septembre, la "mobilisation générale" pour mener "une lutte implacable" contre le harcèlement scolaire avec une kyrielle de mesures allant du signalement systématique des cas à la justice à la volonté d'"exclusion des élèves harceleurs" des réseaux sociaux

Plusieurs mesures ont été annoncées :

- Saisine automatique du parquet en cas de signalement -

Les procureur de la République seront "systématique" saisis en cas de signalement de harcèlement. "Notamment grâce à une plateforme dédiée entre l'Éducation nationale et la Justice. Je souhaite également une saisine systématique des procureurs pour les plaintes", a précisé Elisabeth Borne.


- 3018, numéro de téléphone unique pour dénoncer le harcèlement -

Actuellement dédié au cyberharcèlement, le 3018 sera désormais le numéro unique de signalement de tous les harcèlement y compris donc pour les faits commis dans le cadre scolaire .Un bouton de signalement va être installé sur tous les réseaux sociaux pour renvoyer vers la plateforme.

Jusqu'à présent le 3020 était dédiés aux familles et victimes, et le 3018 spécifiquement sur le cyberharcèlement)

- Changement d'établissement pour les élèves harceleurs -

Dans les cas les plus graves, le changement d'établissement d'un élève harceleur pourra être prononcé après intervention des équipes académiques.

- "Exclure les élèves harceleurs des réseaux sociaux" -

Elisabeth Borne veut permettre d'"exclure les élèves harceleurs des réseaux sociaux", afin de lutter contre le cyberharcèlement. Elle n'a pas donné de précision sur cette mesure mais a indiqué qu'elle sera  intégrée aux "dispositions actuellement débattues au Parlement, dans le cadre du projet de loi pour réguler et sécuriser l’espace numérique".

- Une "confiscation définitive" du téléphone portable -

Au cours de la conférence de presse de la Première ministre, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a annoncé que les juridictions pour mineurs pourront désormais déclencher la "confiscation définitive" du téléphone portable dans les cas de cyberharcèlement. Dans "les faits les plus graves", cette saisie serait "automatique", notamment si le téléphone portable a "servi pour commettre les faits de harcèlement", a précisé le Eric Dupond-Moretti.

- Des cours d'empathie à partir de janvier 2024 -

Le ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal, a annoncé la généralisation dans "le cursus scolaire" de "cours d'empathie" à partir de la rentrée 2024 sur le modèle de ce qui se pratique par exemple au Danemark. "Dès la rentrée de janvier 2024, il y aura chaque semaine des cours d'empathie dans au moins une école pilote par département", a promis le ministre.

- Un questionnaire pour les élèves du CE2 à la terminale -

À partir du 9 novembre, un questionnaire va être remis à tous les élèves du CE2 à la terminale pour libérer la parole et repérer des signaux de harcèlement.

- Une "cellule dédiée au harcèlement" dans chaque académie -

Gabriel Attal a annoncé l’ouverture d’une "cellule dédiée au harcèlement" dans chaque rectorat.

Le ministre de l’Education nationale a précisé qu’il concernerait "plusieurs personnes dédiées et formées à 100 % sur la question du harcèlement". Ces personnes se se déplaceront au sein des établissements scolaires" afin d'apporter des solutions aux cas de harcèlement et de "mettre plus d’humain dans les académies".

Lire aussi - Harcèlement scolaire : une cellule dédiée sera créée dans chaque rectorat

- Les syndicats et les associations de parents d'élèves "attendent de voir" -

A La Réunion, les syndicats et les associations de parents d'élèves restent prudentes et "attendent de voir" la mise en place concrète de ces mesures.

Pour Jérôme Motet, du Snalc Réunion, la problématique du harcèlement scolaire "aurait dû être travaillée depuis longtemps". "C'est quelque chose qu'on a laissé passer pendant des années, dans la logique du "pas de vagues"…L'Etat est coupable d'avoir laissé ce phénomène s'installer dans les écoles" estime-t-il.

S'il est favorable à des mesures punitives en cas de harcèlement, il s'interroge cependant sur les moyens mis en place pour appliquer les dites-mesures. "Pourquoi pas, mais comment les mettre en place ? Je suppose qu'un adolescent peut contourner ces mesures" souligne-t-il. En effet, il semble difficile de mettre en place un véritable bannissement des réseaux sociaux, ou une confiscation totale du téléphone portable.

"Heureusement qu'ils les proposent, il faut un volet préventif et dissuasif dans les sanctions" relativise-t-il cependant.  "Il faut aussi responsabiliser les parents, ce n'est pas normal que les parents d'élèves violents n'aient pas de réaction" ajoute-t-il par ailleurs.

Daniel Amouny, président départemental de la Fédération des Conseils de Parents d'Elèves (FCPE), dénonce lui un "plan à 200% sur la répression et très peu sur la sensibilisation".

"On a un plan qui est dans la même ligne directrice que ce que l'on voit depuis cinq ans : on n'arrive pas à régler le problème, donc on va mâter les élèves. Ca ne marche pas, on ne peut pas se baser uniquement sur la répression" estime-t-il. "Je ne dis pas qu'il ne faut pas sanctionner, mais ça ne peut pas être une politique globale."

"Comment va-t-on interdire aux enfants d'aller sur les réseaux sociaux ? Qui va devoir gérer ça ? Comment vérifier que l'enfant ne donne pas une fausse date de naissance ou une fausse identité quand il s'inscrit ? " s'interroge-t-il lui aussi.

- "Changement de mentalité" -

"Ce que nous attendons c'est un changement de mentalité dans la gestion des situations de harcèlement qui sont portées à la connaissance des institutions, de l'autorité scolaire des parents et par les enfants" dit Daniel Amouny.

"Il faut qu'il y ait des moyens dans l'écoute pour que les parents et enfants puissent s'exprimer sur la situation et qu'on puisse plus tôt déceler s'il s'agit d'un problème de harcèlement ou pas, et qu'un accompagnement soit aussi mis en place pour l'élève harceleur, on ne règle pas tout en punissant."

"Il faut plus de coordination avec les parents et acteurs de terrain, pas seulement au niveau des enseignants mais aussi tous les professionnels qui travaillent sur le périscolaire et extrascolaire" estime par ailleurs Audrey Coridon, du collectif Stop Vif

Une demande à laquelle certaines mesures devraient répondre. "Nous allons mettre plus d'humain dans les académies, avec la création de brigade anti-harcèlement dans chaque rectorat. Nous allons créer des équipes académiques de lutte contre le harcèlement" a en effet assuré le ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal.

- Manque criant de personnel -

La question des personnels disponibles se pose tout de même, alors que le programme pHARe peine à se mettre en place dans l'île.

"Il devrait être déployé mais aujourd'hui il n'est pas encore opérationnel. On demande à ce que ce projet, ce dispositif soit expliqué aux élèves et parents d'élèves. Qu'est-ce que c'est ? Comment ça fonctionne ? Comment on active ce dispositif ? Aujourd'hui ce programme n'a pas été présenté aux parents" dénonce Daniel Amouny.

"Que fait-on pour remédier au manque de personnel, et comment fait-on pour mettre en place ces dispositifs alors qu'il manque énormément de personnel pour gérer les élèves dans les établissements ?" s'interroge-t-il.

"Le ministre parle de professionnels de santé qui interviendront dans les établissements : avec qui ? A quelle fréquence ? A partir de quel âge ? On n'a déjà pas les personnels, comment va-t-on faire ?"

"Il faut donner des moyens à La Réunion de combattre le harcèlement, on a de gros soucis de prévention. Les effectifs ne sont pas suffisants, comment peut-on faire notre travail ?" abonde Jérôme Motet.

"Il n'y pas assez d'infirmière, d'AED, de personnels sociaux…pourtant ce sont les personnels les plus en contact avec les élèves quand ils ont des problèmes. Et les classes surchargées n'aident pas à lutter contre les violences, au contraire" ajoute-t-il, prônant le placement en zone d'éducation prioritaire pour toute La Réunion afin de soulager les effectifs par classe.

as/ma.m/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

guest
1 Commentaires
Bruno Lateigne
Bruno Lateigne
1 an

Que de beaux discours ! ce nouveau ministre-étudiant a menti dès la prise de son ministère...1 professeur devant chaque classe, plus d'A.E.S.H. pour accompagner les enfants, etc...et l'Education nationale est au même point; dans la mouise ! continuions à écouter leurs promesses, "l'espoir fait vivre!" ..surtout les imbéciles.
Ce gouvernement, n'aiment pas les pauvres et encore moins les D.OM. ,vu qu'on n'a pas voté pour eux...Ne l'oublions pas, car eux s'en souviennent!