Tribune libre du SNESUP-FSU

Droit de réponse à Frédéric Miranville

  • Publié le 3 juin 2024 à 10:57
  • Actualisé le 3 juin 2024 à 11:01

Le communiqué de Monsieur Miranville fait suite à la décision du Conseil d’État de rejeter son nouveau recours. Qui lit la réponse du Conseil d’État avec attention, découvre que celui-ci donne tort à Monsieur Miranville non seulement sur la forme (en validant toutes les mesures prises à son encontre) mais aussi sur le fond en soulignant que les accusations portées par l’inspection générale sont suffisamment vraisemblables, suffisamment graves et étayées pour que la ministre ait fait le bon choix ! (Photo université de la réunion , photo sly/www.imazpress.com)

Face à cette décision catastrophique pour lui, puisqu’il ne peut plus échapper à la section disciplinaire du CNESER, il déploie plusieurs stratégies.

Que cherche -t-il à nous dire ?
 
Sa première stratégie, consiste à mettre en avant son ouverture et ses capacités de dialogue ; pour ce faire, il propose un débat entre lui et ses victimes. Disons-le clairement : une telle démarche est véritablement odieuse, perverse et indécente ; Pourrait-il simplement envisager qu’il les a suffisamment traumatisées et fait souffrir pour qu’elles ne puissent supporter sa présence ? Bien sûr qu’il le peut (il est loin d’être bête), c’est bien d’ailleurs pour cela qu’il l’emploie en visant, en banalisant ce qu’elles ont déjà vécu, à désavouer à nouveau la mesure conservatoire de protection des victimes par Madame la ministre. Que Monsieur Miranville parle au CNESER, c’est le lieu prévu à cet effet ! il aura alors tout loisir de s’exprimer tant et plus.
 
Sa deuxième stratégie consiste à désigner d’autres responsables potentiels visant ainsi la dilution de sa responsabilité personnelle.  Charger des subalternes pour s’alléger du poids de ses fautes est une stratégie classique qu’avait employé par exemple, Marlène Schiappa mise en cause par le sénat dans l’affaire des « fonds Marianne ». Mais, cette démarche a un coût élevé en termes de cohérence : en effet, il est très difficile de soutenir en même temps qu’aucune faute n’a été commise et qu’on a des co-responsables. Elle revient donc à un aveu implicite. De même, on ne peut guère en même temps ne pas reconnaître la validité du rapport des inspecteurs, et s’en réclamer quand il se réfère à un système de harcèlement institutionnel.
 
Sa troisième stratégie est celle de la victimisation en construisant un « narratif » inversant les rôles, où il se définit en victime d’un complot. A ses yeux, les responsables de ses déboires sont chaque jour plus nombreux. A Madame la ministre première visée, viennent s’ajouter aujourd’hui les inspecteurs généraux, l’incompréhension du conseil d’État, Madame Grondin-Perez (qu’il désigne quasi nommément) et Monsieur Comby l’administrateur provisoire. Très classiquement encore, le suspendu transforme son cas particulier en une cause générale, ce n’est pas lui qu’on persécute en particulier mais l’autonomie des universités en général (Pardi, mais bien sûr ! chacun appréciera…).

Voilà pour le fond du texte, commentons maintenant sa forme.

 Ce communiqué de presse est celui d’un homme aux abois. On y reconnait clairement (presque toutes) les étapes du modèle de Elisabeth Kübler-Ross au sujet de la chronologie émotionnelle ressenties par les malades à l’approche de leur mort. Ce modèle, on s’en souvient, est composé d’une séquence en cinq étapes :

 - d’abord le déni (ce n’est pas vrai),
- puis la révolte (ce n’est pas juste),
- vient ensuite le marchandage (d’accord pour perdre une partie mais à condition de sauver le plus important),
- puis la dépression (tristesse et abattement),
- enfin l’acceptation (je suis prêt et serein face à ce qui m’attend).
 
Comme ce modèle peut s’appliquer à toutes pertes catastrophiques, il s’applique au choc ressenti par monsieur Miranville à l’annonce de la décision du conseil d’État. On retrouve donc dans ce texte ses principales étapes.

1) Déni : Ce n’est pas vrai ! je n’ai rien fait. C’est la première réaction de Monsieur Miranville

Conseil à Monsieur Miranville :

Persister un peu plus dans le déni ne fera que vous enfoncer d’avantage car ce déni têtu montre que vous n’êtes pas apte à changer ni à faire l’effort nécessaire pour vous transformer. On peut craindre pour vous qu’il exaspère les membres de la commission disciplinaire du CNESER. En toute généralité, et sans nuire à votre présomption d’innocence, n’oubliez pas que demander pardon pour ses erreurs est la seule manière de s’engager dans un processus permettant aux victimes et à l’agresseur de se reconstruire. Songez-y, si vous souhaitez réellement l’apaisement et l’unité de notre université.
 
2) Révolte et colère : "Pourquoi moi ?" Votre sentiment d’injustice est celui de l’élève fautif qui avance comme défense : je ne suis pas le seul à être pointé du doigt pourquoi ça tombe uniquement sur moi ?

Conseil à Monsieur Miranville :

Ne vous dissimulez pas derrière les autres et ne fuyez pas vos responsabilités : si d’autres ont mal agi, ils n’auraient sans doute pas osé le faire s’ils ne s’étaient sentis libres (voire, qui sait, encouragés) par un « système de harcèlement institutionnel » pour reprendre l’expression des inspecteurs généraux.
 
3) Marchandage : Vous basculez dans la négociation quand vous écrivez "la mesure de suspension déjà incroyablement sévère". On voit bien que vous cherchez là à éviter la révocation en suggérant par avance que la suspension est déjà un prix important. On n’est déjà plus dans le déni pur et simple mais dans la discussion du prix à payer. La révocation c’est trop cher, on discute de la réduction de la sanction encourue …

Conseil à monsieur Miranville :

Là encore, ne vous emmurez dans la négation de la réalité, car vous nous privez des véritables raisons que vous avez eues d’agir contre les victimes ; cela vous aiderait pourtant lors de votre passage devant la commission disciplinaire.
 
4) Dépression : autant vous niez le désarroi des victimes, autant leur souffrance vous indiffère royalement (qu’importe leur dépression, leur passage à l’hôpital, l’effondrement de leur univers, etc.), autant, il faut reconnaitre que vous savez mettre en avant votre mal-être.
 
Conseil à Monsieur Miranville :

Cherchez au fond de vous-même et trouvez un peu d’empathie pour les victimes et exprimez-la.
 
5) Acceptation : Le modèle de Kübler-Ross est bien sûr   imparfait dans votre cas car vous êtes loin de la phase de l’acceptation, et cherchez toujours à repousser l’inévitable.
 
En définitive, on peut craindre que monsieur Miranville ne s’égare hors de la réalité ; Ainsi, quand il adresse « tout son soutien » aux personnels et aux étudiants "en cette période délétère".

On a envie de lui répondre : "Merci, mais ce n’est vraiment pas la peine ; nous nous en passons sans aucun problème. Sans vous, l’université se porte bien mieux ; elle est certes convalescente ; mais chaque jour, elle va un peu mieux et on y souffre un peu moins.  Sous l’impulsion de Monsieur Comby, se construit collectivement quelque chose de nouveau et de plus accueillant. Progressivement, notre université s’épure et redevient plus transparente".

Lire aussi : Suspendre puis démettre un président d’université élu avant même de l’avoir entendu ?

 

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3 Commentaires
Ro_974
Ro_974
9 mois

Le chant du cygne son communiqué

Danièle
Danièle
9 mois

tant que c'était les victimes qui déprimaient et qui ne s'en remettaient pas ça ne le dérangeait pas trop, il ne commence à s'inquièter aujourd'hui que lorsque il va passer en conseil de discipline au CNESER et qu'il voit la sanction s'approcher. Est-il donc capable d'aucune empathie ? Ouf l'université sera bientôt débarrasser d'un bohnomme aussi malfaisant

974
974
9 mois

Encore un proche de Didier robert mis en cause.