Depuis plusieurs années, et plus encore ces derniers mois, La Réunion fait face à une accumulation de difficultés économiques, sociales et structurelles. En tant que chef d’entreprise et citoyen Réunionnais profondément attaché à mon territoire, je ressens aujourd’hui le besoin d’alerter. Pas pour faire du bruit. Pas pour défendre un cas isolé. Mais parce que ce qui se joue ici, dans notre île, mérite d’être entendu au plus haut niveau de l’État.
Le taux de chômage à La Réunion reste dramatiquement élevé : 16,5 % au premier trimestre 2025, selon l’Insee, contre 7,4 % en France hexagonale. Ce chiffre, pourtant souvent cité, ne reflète pas la réalité complète : le chômage des jeunes explose, les demandeurs d’emploi de longue durée augmentent, et les inégalités sociales s’aggravent.
Ces données ne sont pas abstraites : ce sont des visages, des familles, des jeunes diplômés qui n’arrivent pas à trouver leur place dans une économie asphyxiée.
Une année blanche nationale, des conséquences locales amplifiées
Si l’annonce d’un gel des dotations concerne toute la France, son impact n’est pas égal partout. Dans des territoires comme à La Réunion, où les filets de sécurité sont déjà réduits, cette décision risque d’avoir un effet de décrochage massif.
La fin progressive de certaines exonérations spécifiques, le ralentissement des versements publics, et l’absence d’aides nouvelles arrivent dans un moment où beaucoup d’entreprises n’ont toujours pas récupéré leur niveau d’activité d’avant- crise. L’année blanche nationale risque d’être, pour nous, une année noire. Les entreprises de La Réunion majoritairement des TPE et PME ne demandent pas des privilèges. Elles demandent des moyens pour travailler, embaucher, investir et contribuer à la dynamique locale.
Une fracture territoriale qui ne cesse de s’élargir
Appliquer les mêmes règles partout en France, c’est oublier que l’égalité ne signifie pas uniformité. L’égalité, c’est tenir compte des différences pour offrir à chacun les mêmes chances. À La Réunion, nous faisons face à des défis structurels immenses, mais avec la même volonté que partout ailleurs de réussir, d’entreprendre, de construire l’avenir.
Cette fracture entre l’Hexagone et l’Outre-mer n’est pas seulement économique : elle devient institutionnelle, presque morale. Elle alimente un sentiment d’abandon croissant.
Il est encore temps de changer de cap
Face à cette situation, il apparaît essentiel que nos décideurs politique revoient leur position concernant cette année blanche, dont l’application uniforme ne peut ignorer les disparités territoriales. Il est indispensable de maintenir, voire de renforcer les dispositifs d’aides spécifiques à l’Outre-mer, notamment les exonérations qui permettent aux entreprises locales de faire face à des coûts structurellement plus élevés. Enfin, une concertation approfondie avec les acteurs économiques ultramarins doit être engagée rapidement, afin de construire une politique de développement qui soit réellement adaptée, juste et durable
La Réunion n’est pas un fardeau. C’est une force pour la France. Une richesse humaine, culturelle, économique. Mais elle a besoin d’un État qui l’écoute, la soutienne et croit en elle. Ne rien faire, ce serait accepter de laisser mourir silencieusement un pan entier de notre République.
Par Valdo Maroudé Gopalle, chef d’entreprise et citoyen engagé à La Réunion.
Citoyen engagé, c'est-à-dire qu'il se présente aux prochaines municipales?