Emmanuel Macron a agi dans la nuit

Dans la précipitation : la loi sur la réforme des retraites officiellement promulguée

  • Publié le 15 avril 2023 à 13:30
  • Actualisé le 15 avril 2023 à 15:01

Emmanuel Macron a agi dans la nuit de vendredi à samedi. L’impopulaire et très contestée réforme des retraites en France, avec sa mesure phare de recul de l’âge de départ à 64 ans, a été promulguée samedi matin au Journal officiel. L’essentiel du texte avait été validé par le Conseil constitutionnel vendredi soir. Le président de la République disposait de quinze jours pour la promulgation. Il a préféré agir dans la nuit et faire promulguer le texte au petit matin.

Le Conseil constitutionnel a reconnu le "caractère inhabituel" de l’accumulation de procédures visant à restreindre les débats au Parlement, mais il a quand même validé l'essentel du texte.

Les syndicats avaient alors demandé "solennellement" au président de la République de "ne pas promulguer la loi". Une demande restée lettre morte : en promulguant le texte, Emmanuel Macron a opposé une fin de non-recevoir.

Une manière de tuer dans l'oeuf les maigres espoirs des syndicats de le voir surseoir à cette ultime paraphe et de montrer sa détermination à mettre en application sa réforme, malgré la très vive opposition qu'elle suscite.

Le président de la République disposait de quinze jours après la validation de la plupart des mesures de la réforme vendredi par le Conseil constitutionnel pour apposer sa signature, lui donnant ainsi force de texte. Il a préféré le faire dans la nuit.

Lire aussi : Retraites : Macron promulgue la loi dans la nuit

"Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié […] Au premier alinéa, le mot : +soixante-deux+ est remplacé par le mot : “+soixante-quatre+" énonce le texte.

Le texte publié au journal officiel est a retrouvé ici.

Le Conseil constitutionnel a validé vendredi l’essentiel de la réforme des retraites et bloqué une première demande de référendum d’initiative partagée (RIP) de la gauche, qui espérait entamer la collecte de 4,8 millions de signatures en vue d’une inédite consultation des Français.

Une nouvelle demande de référendum a été déposée vendredi par la Nupes. Le conseil constitutionnel se prononcera sur sa validité le 3 mai prochain.

"Nous appelons le Conseil constitutionnel à jouer son rôle de gardien de la Constitution en saisissant l’opportunité du deuxième RIP pour rendre la parole au peuple et empêcher ainsi la fracturation de notre société" a commenté la député réunionnaise Karine Lebon.

Elle a aussi estimé "le Conseil Constitutionnel a refusé de censurer le projet de loi de réforme des retraites. Par cette décision, il valide les détournements de procédure et les innombrables courbures du gouvernement pour nous imposer ce texte".

- Colère de la rue -

Dès vendredi soir, dans la rue, des manifestations ont accompagné la décision du Conseil. À Paris, elle a été accueillie par des huées des quelques 4.000 manifestants rassemblés devant l'Hôtel de ville à l'appel de plusieurs syndicats dont la CGT et FO.`

Plusieurs centaines de personnes sont ensuite parties en cortèges sauvages émaillés d'incidents dans le centre de la capitale, entraînant l'interpellation de 112 personnes, selon la préfecture de police.

Quelques centaines de manifestants se sont également rassemblés à Lille, Toulouse, Strasbourg ou encore à Marseille après l'annonce de la décision du Conseil.

À Rennes, notamment la porte d'un poste de police du centre-ville a été incendiée avant d'être éteint. Même scénario sur une des portes du centre des congrès dans l'ancien couvent des Jacobins.

- Ce n'est pas fini -

"Il n’y a ni vainqueur ni vaincu" avait assuré la première ministre, Élisabeth Borne, évoquant "la fin du cheminement institutionnel et démocratique" du texte adopté à l’Assemblée après l’utilisation du49.3, article controversé de la Constitution permettant d’adopter un projet de loi sans vote.

"Ce n’est pas fini", ont promis en réponse les syndicats, convaincus que ne pas promulguer la loi était le "seul moyen de calmer la colère […]" et qui ont refusé une invitation lancée par Emmanuel Macron pour ce mardi.

L'intersyndicale n'entend pas se rendre à l’Élysée avant le 1er mai, traditionnel rendez-vous social qu'elle souhaite transformer en "journée de mobilisation exceptionnelle et populaire" contre le cœur de la réforme : la retraite à 64 ans.

Lire aussi : Retraites: après la validation de la loi, réparer les dégâts et relancer le quinquennat

Le chef de l’État devrait prendre la parole en début de semaine prochaine, selon plusieurs sources au sein de l'exécutif. Il réunira les cadres de la majorité lundi à l’Élysée.

En attendant la parole présidentielle, Élisabeth Borne s'exprimera samedi après-midi, à l'occasion du Conseil national du parti Renaissance à Paris.

Elle pourrait livrer quelques pistes pour la suite... dont elle devrait continuer à faire partie. Mais les mêmes difficultés l'attendraient alors à l'Assemblée, faute de majorité absolue.

"Le sort politique de la réforme des retraites n'est pas scellé" et son entrée en vigueur "marquera la rupture définitive entre le peuple français et Emmanuel Macron", a estimé la leader du Rassemblement national, Marine Le Pen.

Pour La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon a évoqué un "1er mai décisif", en accusant le Conseil constitutionnel d'avoir "agrav(é) la crise". "Il faut rassembler réellement toutes les forces qui veulent s’opposer pour que le dernier mot soit à la souveraineté populaire et non à la monarchie présidentielle", a-t-il dit sur sa chaîne Youtube.

- Demande d'abrogation de la réfome -

Députés et sénateurs socialistes avaient par ailleurs déjà annoncé vendredi leur intention de déposer un texte législatif demandant l'abrogation de la réforme des retraites "si le président de la République promulgue".

"Le Conseil Constitutionnel a validé en droit. Il reconnaît que le texte est constitutionnel mais il a validé une mauvaise loi, une loi injuste et inutile (...)" a pour sa part réagi le député réunionnais Phiippe Naillet, "Le combat doit continuer. Au niveau national, nous demandons que cette loi, ou au moins son article 7, soit enfin soumise au vote des représentants de la Nation" a-t-il ajouté

Cette réforme "inutile", "brutale", et injuste, selon les oppostions provoque l'un des plus importants mouvement social des dernières décennies. Plus de 80% des Français sont contre cette réfome.

www.imazpress.com avec l'AFP / redac@ipreunion.com

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6 Commentaires
Missouk
Missouk
1 an

Il ferait mieux de dormir un peu la nuit au lieu de faire des bêtises

Emmanuel Riquier
Emmanuel Riquier
1 an

Comme à son habitude, Marine Le Pen ment !
"Le Peule (qui) a toujours le dernier mot" , elle ne l'a jamais soutenu.
A l'Assemblée Nationale, le groupe RN a voté, main dans la main avec les macronistes, CONTRE :
- la revalorisation des retraites au niveau du SMIC
- la revalorisation des minima sociaux au niveau du seuil de pauvreté
- le blocage des prix des produits de 1ère nécessité
- le taux de TVA à 0% sur les produits de 1ère nécessité dans les Outre-mer
- la gratuité des premiers m3 d'eau
- l'augmentation du SMIC
- le gel des prix des loyers
- la gratuité des cantines scolaires
- le rétablissement de l'Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF)
- l'augmentation de la TVA sur les produits de luxe
etc... etc... etc....
https://linsoumission.fr/2022/03/24/le-pen-programme-classes-populaires/

Missouk
Missouk
1 an

A l'image du fonctionnement du bonhomme. La rue va s'enflammer

Macron la HONTE
Macron la HONTE
1 an

Scandaleux ! Ignoble ! Agir dans la nuit .............

Lutte ouvrière
Lutte ouvrière
1 an

Conseil constitutionnel : des sages ? Où ça ?

Quelques décisions suffisent à rappeler ce rôle du Conseil. En 1982, sous Mitterrand, il annula une loi pourtant bien timide sur la parité, arguant que le principe d’égalité ne permettait pas de différencier les citoyens en fonction de leur sexe.
En 1995, il valida les comptes de campagne présidentielle de Jacques ­Chirac et d’Édouard Balladur. Les conseillers savaient que ces comptes recelaient de graves irrégularités, dépassement du plafond autorisé et versements en liquide, qui auraient dû entraîner l’annulation de l’élection. Mais il ne fallait pas révéler la fraude au grand public. On ne connut les dessous de la décision que vingt-cinq ans après, délai pendant lequel les délibérations sont soumises au secret. Il est à noter que la même année les comptes de notre camarade Arlette Laguiller furent, eux, en partie retoqués sous un mauvais prétexte.
En 2012, c’était la taxe de 75 % touchant les 1 500 personnes ayant un revenu d’activité excédant un million d’euros, la taxation exceptionnelle de solidarité promise dans sa campagne par François Hollande, qui était renvoyée aux oubliettes. Le prétexte était que cet impôt était assis sur les personnes physiques alors qu’il aurait dû être prélevé par foyer fiscal. Cela évitait de reprendre ouvertement la campagne de la droite contre « une mesure confiscatoire ».
La Constitution est bonne fille, elle permet de justifier tout et son contraire, et les membres du Conseil ne s’en privent pas. Ils participent d’un ensemble d’institutions et d’articles de loi, comme le désormais célèbre 49.3, permettant au président de gouverner dans l’intérêt de la bourgeoisie, en passant outre l’avis de la population et même celui des députés, fussent-ils de son camp. Sous le règne de la bourgeoisie, le mot de démocratie prend un sens vraiment capital.

Lutte ouvrière
Lutte ouvrière
1 an

Le mouvement doit continuer
Jeudi 6 avril, les cortèges ont regroupé à nouveau des centaines de milliers de manifestants, avec, comme à chaque fois depuis le 19 janvier, un nombre de grévistes toujours important, même s’il est difficile à connaître puisque les patrons des entreprises du privé ne le communiquent pas.
Nombre de dirigeants politiques et syndicaux ont présenté le vendredi 14 avril, date de rendu de l’avis du Conseil Constitutionnel sur la réforme, comme une étape décisive. Ainsi, le dirigeant de la CFDT, Laurent Berger, a déclaré : « Je ne remettrai pas en cause la légitimité du Conseil constitutionnel » sur la réforme des retraites. Mais au nom de quoi les neuf « sages » qui siègent dans cette instance auraient-ils une légitimité pour décider de l’âge de départ à la retraite de millions de travailleurs ? Sur ces neuf membres, deux ont été nommés par Macron, trois par l’actuel président du Sénat, le LR Gérard Larcher, deux par le macroniste Richard Ferrand quand il était président de l’Assemblée nationale. Parmi eux figure l’ancien Premier ministre de droite Juppé, qui en 1995 avait tenté de s’attaquer aux retraites et avait dû manger son chapeau face à la mobilisation. Enfin, c’est Fabius, lui aussi ancien Premier ministre, qui préside cette assemblée au sein de laquelle les travailleurs n’ont vraiment aucun ami ! Tous sont des représentants patentés de la bourgeoisie, et certains ont eu l’occasion de le montrer en exerçant des responsabilités ministérielles.
Cette institution constitue la dernière étape du processus législatif et le coiffe comme une sorte de dispositif de sécurité. Selon Macron et tous ceux qui évoquent sa légitimité, les travailleurs n’ont plus qu’à s’incliner après qu’il a rendu son avis. Pour le justifier, ils évoquent le respect de règles démocratiques. En fait de démocratie, ils voudraient que les travailleurs respectent les règles d’un système organisé pour permettre à un gouvernement d’imposer des lois conformes aux intérêts d’une minorité de capitalistes, sans avoir à tenir compte de ce que pensent la majorité de la population et en particulier des travailleurs.
Les travailleurs ont, quant à eux, la légitimité d’être la classe qui produit les richesses et assure les tâches utiles et indispensables à la vie sociale. Ils ont le droit légitime de refuser que leur mouvement pour défendre leurs retraites soit mis en balance avec la volonté de neuf représentants de la classe privilégiée !
La seule chose qui comptera en définitive est le rapport de force que la classe ouvrière sera capable d’instaurer face à la bourgeoisie pour défendre ses conditions de vie, ses salaires, ses emplois, sa retraite, en utilisant ses vraies armes que sont ses mobilisations, les grèves et les manifestations.