Ce mardi 26 novembre 2024, à l’aube d’une séance plénière cruciale pour les orientations budgétaires 2025, Cyrille Melchior, président du Conseil départemental, et ses vice-présidents ont présenté les grandes lignes de dépenses pour les mois à vanir. Entre contraintes financières, ambitions et inquiétudes liées aux décisions nationales, la collectivité cherche à préserver ses priorités malgré un contexte difficile (Photo : sly/www.imazpress.com)
"Si le budget de l’État n’est pas voté, je n’ose pas imaginer la suite", avertit Cyrille Melchior, président du Conseil départemental, lors de la conférence de presse de présentation des orientations 2025.
En effet, dans un contexte de tension budgétaire nationale, le Département se retrouve face à des recettes en baisse, notamment à cause de la chute des droits de mutation immobilière (-30 millions d’euros) et du gel de la TVA prévue dans la Loi de finance 2025 qui devrait coûter 15 millions supplémentaires.
- Un budget à maîtriser -
Cette diminution des ressources s’ajoute à une explosion des dépenses sociales. Selon le Département, entre 35 et 50 millions d’euros supplémentaires sont nécessaires pour financer les allocations de solidarité et les établissements médico-sociaux.
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"Nous devons présenter un budget réaliste et maîtrisé", insiste Cyrille Melchior, tout en rappelant que la collectivité a épargné plus de 10 % de ses revenus courants en 2023, permettant un remboursement rapide de ses dettes si nécessaire.
Seule bonne nouvelle, le président du Département a obtenu la garantie que les coupes budgétaires prévues par le gouvernement n'affecteront pas les collectivités réunionnaises. Écoutez :
- Des priorités maintenues mais … -
Malgré ces défis, le Département entend maintenir un budget de 1,3 milliard d'euros et "préserver ses ambitions", notamment autour de dix axes prioritaires. Parmi les mesures phares, le lancement des travaux du Musée de l’habitation et de l’esclavage, la plantation du 500.000ème arbre du plan "1 million d’arbres", la remise en culture de 400 hectares de friches agricoles, ou encore le soutien à 700 projets via le FEADER.
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"Pour l’instant, nous n’en sommes pas à rogner sur les dépenses obligatoires ni même facultatives, mais certains investissements pourraient être décalés", reconnaît Cyrille Melchior. Parmi les ajustements envisagés, une baisse des dépenses sur les routes, qui pourraient par exemple passer de 30 à 25 millions d’euros par an.
Jean-Marie Virapoullé, vice-président en charge de l’action sociale, précise toutefois : "On maintient le cap sur l’urgence sociale et l’accès au droit, malgré le cadre contraint qui touche toutes les collectivités de France".
- Mis en place d'un Institut citoyen d'apprentissage de la vie publique -
Pour prouver que le Département reste ambitieux, Cyrille Melchior a annoncé la création d'un Institut citoyen d'apprentissage de la vie publique (ICAP). Il sera orienté autour de trois axes. À commencer par des forums citoyens en présence d'experts locaux qui auront à charge d'éclairer des débats publics.
Le deuxième axe sera tourné vers les élus avec la mise en place de cessions de formation. Enfin, le dernier volet de cet institut concernera le renouvellement des effectifs. Selon le Département, 40% des agents vont partir à la retraite dans les 10 ans à venir.
"Il faut attirer les jeunes réunionnais vers les emplois de service public", assure Cyrille Melchior. Pour cela, l'institut devra travailler avec le CNFPT et l'Université de La Réunion afin de favoriser le recrutement dans la fonction publique.
- Des enjeux sociaux et démographiques cruciaux -
Ce besoin de renouvellement des effectifs s'intègre dans le cadre général d'un vieillissement de la population. Avec 16 % de réunionnais âgés de plus de 60 ans aujourd’hui, et 26 % attendus d’ici 2050, les besoins de prises en charge s'accroissent.
Le Département prévoit ainsi de doubler les places en EHPAD, passant de 2.000 à 4.000. Trois nouveaux établissements verront le jour à Bras-Panon, à la Petite-Île et dans la micro-région sud-ouest. Deux autres sont dans les cartons, si "l'État accompagne financièrement le Département", explique le président.
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"Nous faisons face à des enjeux que nous ne pourrons pas porter seuls", alerte Cyrille Melchior, réclamant une adaptation des règles nationales pour mieux tenir compte des spécificités de La Réunion.
Une motion a d'ailleurs été adoptée lors des assises des départements de France qui se sont déroulées la semaine dernière à Paris et à Angers. Elle appelle à une révision des mécanismes de compensation pour l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA). Selon le Département, "les coûts augmentent de 9 % par an depuis 2015" à La Réunion.
- Un appel à l’État et des perspectives incertaines -
Les élus départementaux ont également plaidé pour davantage de soutien de l’État, notamment dans la lutte contre la vie chère et la transparence des prix. Une motion adoptée à l’unanimité par les acteurs des assises des Départements demande que toute baisse d’octroi de mer ou de TVA se traduise intégralement par une réduction des prix pour les consommateurs.
"Jusqu’à quand le Département de La Réunion sera-t-il épargné par les coupes budgétaires ?" s’interroge Éric Ferrère, vice-président chargé de l’aménagement. Avec 36 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté, les marges de manœuvre financières sont minces.
- Des études pour construire le budget -
94% de bénéficiaires estiment que le dispositif qui les concerne a eu un impact positif sur leur situation. La seconde étude concerne une mesure de l'opinion sur l'action et les politiques publiques du conseil départemental. La lutte contre les violences intra familiales le soutien aux étudiants et l'action pour les personnes âgées arrivent ainsi en tête des préoccupations des 500 personnes interrogées.
Malgré cela, 1 personne sur trois ne sait pas qu'il s'agit de compétences du Département. Les attentes exprimées spontanément sont d'ailleurs diffuses : action pour améliorer les transports et déplacements (18%), action sociale (14%), logement (13%), personnes âgées (12%), jeunesse (11%), emploi formation (9%) et pouvoir d'achat (7%) sont les domaines les plus cités.
C'est avec ces données et en prenant en considération les attentes que le département a souhaité que le nouveau budget soit construit. En conclusion de la conférence de presse, Cyrille Melchior s'est dit prudent, mais déterminé : « Tant que nous n’avons pas de certitudes, nous avançons avec un budget réaliste, en veillant à répondre aux attentes des Réunionnais. »
Une vigilance qui sera mise à l’épreuve dès la présentation du budget, prévue en séance plénière ce mercredi 27 novembre.
pb/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com