Selon une étude du ministère de l'Éducation

À La Réunion, un quart des jeunes de 16-25 ans ne maîtrisent ni la lecture ni l'orthographe

  • Publié le 13 juin 2023 à 10:19
  • Actualisé le 13 juin 2023 à 13:28

Dans une étude publiée le 6 juin 2023 par le ministère de l'Éducation nationale, un jeune Français sur dix est en difficulté de lecture, soit 11% des 16-25 ans. Près de la moitié d'entre eux peut être considérée "en situation d’illettrisme". L'étude s'appuie sur des tests conduits auprès de 750.000 participants à la Journée défense et citoyenneté (JDC). À La Réunion, ce chiffre est encore plus important. 26,4% des 16-25 ans jeunes ont des difficultés pour lire. Conséquence logique, l'orthographe aussi est mise à mal. Pourquoi ces savoirs fondamentaux ne sont pas maîtrisés par de nombreux élèves de la primaire et jusqu'à la terminale ? À qui la faute ? Aux élèves plus habitués aux langages SMS et aux réseaux sociaux, à l'Éducation nationale qui a failli dans sa mission d'apprentissage ? La réponse est sans doute dans la conjugaison des deux causes (Photo rb/www.imazpress.com)

Devoirs criblés de fautes d'orthographe, lecture approximative ou peu fluide… les savoirs fondamentaux sont parfois malmenés par les nouvelles générations. Un constat alarmant que dresse le ministère de l'Éducation nationale au travers de son étude.

Comme l’ont démontré les chiffres, une partie d’entre eux serait même en "situation d’illettrisme". Ils ont d’ailleurs "une compréhension en lecture très faible". Ou "inexistante". 4,9 % des jeunes de la tranche d'âge concernée rencontrant les difficultés les plus sévères ont aussi un "déficit important de vocabulaire".

- Des chiffres qui interpellent -

Une fois établit que le niveau de lecture et d'écriture des jeunes est faible en France hexagonale et à La Réunion, il convient de ne pas tomber dans les lieux communs.

Et pour cause. Il serait trop facile de cibler les jeunes en affirmant qu'ils ne font pas d'efforts d'apprentissage, alors que l'Éducation nationale et le gouvernement ne font eux-mêmes pas d'efforts pour aider les professeurs dans leur mission. Bien au contraire.

"Le volume horaire de l'enseignement du français a été divisé par deux ces dernières années, notamment au collège et au lycée", déplore Joël de Palmas, secrétaire général de CGTR Éduc'Action.

Un constat confirmé par Marie-Hélène Dor, secrétaire générale du syndicat FSU. "Il y a une baisse dans les langues, l'écriture, la grammaire. Mais en même temps le nombre d'heures de français est passé à quatre par semaine contre six à huit heures il y a quelques décennies."

"Le temps qu'on consacre à l'apprentissage des fondamentaux a diminué donc forcément la rigueur orthographique et grammaticale en pâtit", ajoute-t-elle.

Dans le même temps, les barèmes liés à l'orthographe et la grammaire diminuent. "Un élève peut avoir la moyenne même si sa copie est remplie de fautes", note Joël de Palmas de CGTR Éduc'Action.

"C'est l'Académie française (à travers le dictionnaire) qui est bienveillante. Elle a admis des orthographes simplifiées, des mots plus accessibles aux jeunes…", ajoute-t-il.

Selon Marie-Hélène Dor, "le ministère est directement responsable de la dégradation du niveau, ce sont ses choix qui ont engendré cela".

Pour une professeure, ce constat n'est que le "résultat d'années d'errements de notre système éducatif" où chaque ministre veut imposer "sa réforme. Comme s'il fallait réinventer chaque matin ce qui fonctionne déjà depuis toujours".

- Des réformes en veux-tu en voilà... mais des moyens on n'en a pas -

Le manque de moyens alloués à l'Éducation nationale est également l'une des raisons de cette baisse de niveau selon les syndicats.

"Il y a trop d'élèves par classe, trop peu d'heures par discipline, une multiplication des tâches annexes pour les enseignants, des certifications diverses et variées qui s'empilent, des changements de programme sans concertation, des injonctions contradictoires, la liste n'est pas exhaustive…", s'agace Corinne Payré du Snes FSU Réunion. "Voilà ce qui dénature nos métiers et a des répercussions sur les apprentissages et la réussite de nos élèves", commente-t-elle.

"Il y a moins de moyens mis en faveur de l'école", renchérit Béchir Ben Hamouda, co-secrétaire du FSU-SNIpp. "Il y a de moins en moins d'attractivité pour ce métier qui est aussi pénalisé par le niveau de salaire" dit-il. "Il faudrait que le ministère revalorise le métier pour faire en sorte qu'il soit plus attractif" ajoute-t-il.

Selon le syndicaliste, "il faudrait aussi plus de formation pour les professeurs. Les enseignants se forment souvent tout seuls" déplore-t-il. Il explique ensuite : "avant les professeurs qui avaient le concours étaient à 80% en IUFM (institut universitaire de formation des maîtres - structure qui n'existe plus en France depuis 2015) et 20% en stage de formation, l'étudiant était accompagné. Désormais ceux qui réussissent leur concours sont à 100% seuls dans une classe". Il ajoute, "si le ministre voulait démolir l'école, il ne s'y prendrait pas autrement".

- Assurer la maîtrise des savoirs fondamentaux par tous les élèves -

Interrogé par Imaz Press, le rectorat précise que la maîtrise du socle commun de connaissances et de compétences et des fondamentaux que sont lire, écrire, compter et respecter autrui doit être acquise par tous les élèves. Mais, ils sont encore trop nombreux à sortir du système scolaire sans avoir acquis ces compétences de base, souligne le rectorat.

Les premières années à l’école sont déterminantes pour l'acquisition des fondamentaux, la lutte contre l’illettrisme, une arrivée en sixième réussie et une orientation mieux choisie en fin de collège.

Pour le rectorat, "on peut également noter, sans fatalisme, que le niveau de pauvreté à La Réunion est jusqu'à trois fois plus important qu'en France hexagonale. Hélas, une corrélation entre la difficulté scolaire et l'indice de positionnement social est établie".

"Comme pour la lecture, les performances en orthographe, sont marquées par les différences sociales", ajoute l'Académie.

Pour pallier cet état de fait, et au-delà des actions quotidiennes menées dans les écoles et les établissements, le rectorat énumère les dispositifs nationaux œuvrant en faveur de la lecture, le dédoublement des classes de GS (grande section), CP et CE1 en zone d'éducation prioritaire, les trente minutes de lecture quotidienne, le plan bibliothèque, les stages de remise à niveau, l'école ouverte....

On peut citer également des actions d'accompagnement des parents d'élèves mises en place par l'Académie avec le concours du Département, le plan PR2C (Plan régional pour la maîtrise des compétences-clés) dans lequel l'Académie est fortement représentée.

Lire aussi : La Région signe son plan régional pour la maîtrise des compétences-clés

Lorsque l'on demande si diminuer les barèmes concernant les fautes d'orthographe dans le cadre de la bienveillance prônée par le ministère, n'est pas défavorable à l'apprentissage de l'élève, le rectorat répond : "la bienveillance, c’est considérer l’élève dans son individualité et s’adapter. Oui, il y a bienveillance. Oui, il y a tolérance. Mais il y a également exigence et expertise des enseignants. Il faut éviter de tomber dans les clichés".

"Dans l’académie de La Réunion, où plus d’un élève sur deux est scolarisé en zone d'éducation prioritaire, où plus de 95 % des élèves sont scolarisés dès la maternelle, où les évaluations diagnostiquent un écart significatif avec le national dans les domaines de la maîtrise du français et de la résolution de problèmes, et où un jeune sur sept peut-être considéré comme en situation d’illettrisme, la maîtrise des apprentissages fondamentaux par tous les élèves reste un objectif à atteindre et une priorité à porter par tous les acteurs", estime l'Académie.

Lire aussi - Lutte pour les savoir fondamentaux : la Région lance le dispositif "LespassClés"

Pour rappel, à La Réunion l'illettrisme touche plus de 100.000 personnes, soit 20% de la population. Un chiffre tristement constant depus au moins trois decennies.

Lire aussi - Education nationale : l'école s'effondre, le ministre s'intéresse aux tenues des élèves

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

guest
9 Commentaires
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1 an

mal le français que le créole…. Les responsables sont de toutes évidences les sur diplômés employés par le ministère de l’éducation nationale ! Souvenez vous de la nouvelle définition du ballon, transformée en ….référentiel bondissant ! En fin de cycle primaire l’enfant doit savoir lire écrire et compter … au mininum.

Dom
Dom
1 an

La maîtrise du langage est essentielle pour l'acquisition de la lecture et du reste. Comment est enseigné le langage dès la petite section? Quelle formation des enseignants ? Quelle place faite à un vrai bilinguisme et pas à un francréole mélange supposé , à tort, bienveillant?

Orphée 974
Orphée 974
1 an

Bonjour

Peut-être aussi se poser la question de l'utilisation de la langue créole à l'école par les Professeur des écoles qui ajoute de la confusion à l'apprentissage du français ; la diglossie à ses limites hélas.......

HULK
HULK
1 an

Et les parents dans tout celà? Avoir des enfants c'est pas seulement fait pour les allocs (quoi que). Il faut les éduquer. Et çà c'est une autre affaire.

SAMEM
SAMEM
1 an

une methodologie de l'évaluation? sur quel échantillon?

Moi
Moi
1 an

Bonjour, effectivement, les parents n'ont pas pu s'en rendre compte ? C'est facile d'accuser les autres. Quand on montre la lune, l'idiot regarde le doigt... Paraît il. Au lieu de faire des enfants et de croire que ce sont les professeurs qui les éduqueront au lieu de les instruire, je pense que certains parents devraient se remettre en question. Et les autres, ceux qui ont fait correctement cet accompagnement, exigez de l'Ecole que les fauteurs de troubles qui font perdre du temps aux élèves soient exclus des classes de leurs enfants qui eux, sont là pour travailler. Puis, peut être pourrons nous adresser des reproches aux autres.

Lili
Lili
1 an

À noter qu’en éducation prioritaire renforcée, à SAINT-DENIS le dédoublement ce n’est pas 12, mais 14, voire 15, 16 élèves par classe de cycle 2 et 24 dans les autres. Des élèves qui n’ont aucun suivi à la maison, aucun sens de ce qu’est l’école. La pauvreté lexicale est la règle. Mais on continue d’anéantir les RASED, il faut en moyenne 1 an pour obtenir un rdv chez l’orthophoniste, les redoublements sont quasi interdits …
Non les profs ne sont pas surpayés, ni trop en vacances, et ils ne peuvent pas, en plus, faire le travail des parents: stimuler ses enfants au quotidien dès le plus jeune âge, jouer avec eux, les faire parler, les abonner à la médiathèque, les intéresser à leur avenir, leur donner le goût de l’effort…

CHABAN
CHABAN
1 an

A 16 ans on a passé 13 ans à école et cette étude est le résultat de la journée d'appel : LOL
Personne de SURindexée, de SURenvacance ne se rend compte de ça au primaire, au collège? Il faut faire intervenir l'armée ? LOL

A 16 ans ils sont au cm1? Cm2?

CHABAN
CHABAN
1 an

A 16 ans on a 13 d'école et D'après les résultats de la journée d'appel : LOL
Personne de SURindexée, de SURenvacances ne rend compte de ça ?
A 16 ans ils sont au cm1? Cm2?