Avant de s'envoler ce mercredi 14 mai 2014 pour le festival de Cannes, la fondatrice du festival du film de La Réunion, Fabienne Redt, s'est confiée à Imaz Press. L'occasion d'évoquer les 10 ans d'un événement qui se déroulera cette année du 7 au 12 octobre, mais aussi d'en savoir davantage ses projets personnels derrière la caméra. Rencontre avec une présidente surbookée mais comblée, car comme elle le confie : "Le festival a dépassé tous mes rêves." (Photo : Fabienne Redt avec Stanley Weber sur le tournage à Paris de la bande-annonce des 10 ans du festival du film de La Réunion - Photo D.R.)
Le festival du film de La Réunion va fêter ses 10 ans cette année. Que représente pour vous cet anniversaire ?
"On a tenu 10 ans, il y a peu d’événements qui durent aussi longtemps. C’est déjà une étape bien amorcée. On a su durer dans le temps, le festival s’est installé, s’est institutionnalisé."
À quoi attribuez-vous cette réussite ?
"Un festival, c’est avant tout des films. L’important est d’avoir une bonne programmation. Quand on a des films de qualité, on attire des personnalités de qualité. La programmation, c’est la base essentielle."
Comment s’effectue le choix des films sélectionnés pour le festival ?
"C’est très subjectif. Nous sommes trois à donner notre avis, car on ne peut pas choisir seul. Notre parti pris, c’est l’ouverture, c’est-à-dire ne laisser aucun genre de côté et ne pas avoir de tabou par rapport à ça. Dès le début, notre spécificité a aussi été de ne choisir que des premiers ou des seconds longs-métrages de production française."
"On repart de zéro chaque année"
Pourquoi ce parti pris ?
"L’objectif est de soutenir la production française et de l’aider à s’exporter. Il y a beaucoup de films qui sortent, notre job c’est de faire découvrir des films au public, pour qu’il ne se limite pas uniquement aux blockbusters."
Comment parvient-on chaque année à faire venir certaines des plus grandes stars du cinéma français ?
"Ce n’est jamais simple, surtout au début, car les personnalités ne savaient pas trop où elles allaient, elles avaient certaines interrogations. Mais nous avons eu rapidement de très bons ambassadeurs, comme Jean-Paul Rouve, Mélanie Doutey, Gilles Lelouche, puis Claude Brasseur, Nathalie Baye ou Audrey Tautou. Grâce à eux aujourd’hui tout le monde veut venir ! Avec le bouche-à-oreille, le festival est devenu une référence."
Le financement d’un tel événement est-il pour autant plus aisé ?
"Chaque année, c’est comme si on partait en production, on repart de zéro à chaque fois. Heureusement nous avons des partenaires fidèles qui nous suivent depuis des années, certains s’en vont, d’autres arrivent... Nous avons aussi des partenaires institutionnels comme l’Etat qui nous soutient énormément. La mairie de Saint-Paul est également notre partenaire depuis le début et cela continue avec la nouvelle municipalité, les négociations sont sur de bons rails. Quant à la Région, nous leur avons fait une demande en décembre et nous attendons toujours une réponse..."
"Redynamiser Boucan Canot"
Quelles sont les nouveautés prévues pour cette dixième édition ?
"Tout d’abord, le festival aura lieu plus tôt cette année, du 7 au 12 octobre 2014. La grande nouveauté, c’est que toute une partie se déroulera à Boucan Canot et non plus sur la plage des Brisants. La sélection officielle sera toujours projetée à Cambaie, mais les festivaliers et le grand écran seront à Boucan, où un village sera installé au coeur d’une grande zone piétonne. L’idée de déplacer le festival sur la plage de Boucan Canot, c’est de redynamiser tout ce quartier qui a subi de plein fouet la crise requin. Il y aura la projection de la carte blanche, mais aussi des spectacles et des concerts."
En plus de l’organisation du festival du film de La Réunion, vous êtes passée vous-même derrière la caméra...
"J’ai tourné la bande-annonce des 10 ans du festival. Le tournage vient de se terminer à Paris, avec deux jeunes comédiens : Elisa Lasowski, qui a notamment joué dans la série Game of Thrones, et Stanley Weber, le fils de Jacques Weber, qui a joué dans la série Borgia. Ce sont deux jeunes talents car l’objectif était aussi de servir de fer de lance à de jeunes comédiens. D’ailleurs, toute l’équipe était jeune, à l’image du chef-opérateur Valentin Vignet."
Vous avez également tourné un court-métrage...
"Oui, j’ai tourné un court-métrage à La Réunion au mois de juin dernier, qui s’intitule Sur la route des éclats, avec Caroline Ducey et Christophe de Choisy. Nous avons tourné dans le Sud, à l’hôtel Palm et à l’Entre-Deux. Il est quasiment terminé et sera projeté prochainement à La Réunion. À partir du mois d’août, l’idée est de le faire connaître dans les festivals."
"Réalisatrice, j'espère que c'est le début d'une carrière"
Où en est votre projet de long-métrage ?
"La phase d’écriture est terminée, on va maintenant pouvoir passer au casting. C’est une histoire qui se passe à La Réunion. Mon producteur, Benoît Ponsaillé, vit entre Los Angeles et Paris, ce qui est intéressant car c’est un projet plus international que franco-français. C’est un film qui parle de désir, d’une femme qui n’a plus d’émotions et qui retrouve toutes ses sensations en venant à La Réunion..."
Est-ce facile de naviguer entre les deux casquettes des présidente de festival et de réalisatrice ?
"C’est réjouissant de passer d’une carrière à l’autre. En tout cas, en tant que réalisatrice, j’espère que c’est le début d’une carrière pour moi. C’est comme pour le festival, c’est un rêve que je ne lâcherai pas. J’avais avant cette envie d’écrire et de réaliser, mais je n’osais pas, il faut de l’aplomb pour ça. Aujourd’hui j’ai davantage de distance par rapport au regard des autres et c’est vrai que le festival a amplifié ce désir."
Vous vous envolez ce mercredi pour le festival de Cannes. Que représente cet événement pour vous ?
"Le festival de Cannes, c’est une belle radiographie du cinéma du monde, et cela permet de situer le cinéma français. Pour le festival du film de La Réunion, on aura une idée de la programmation et du président du jury après Cannes. On aura déjà vu pas mal de films. Chaque année, ça commence à se dessiner à ce moment-là."
"Il y a une famille du festival"
Quelle personnalité rêvez-vous d’accueillir à La Réunion ?
"Avec des gens comme Nathalie Baye, Audrey Tautou, Patrick Bruel, Julie Depardieu, Ludivine Sagnier... le festival a déjà dépassé tous mes rêves."
Vous y attendiez-vous il y a 10 ans lorsque vous avez créé cet événement ?
"Non pas du tout ! Le festival est monté en puissance petit à petit. C’est l’aboutissement de 10 ans de travail avec une équipe soudée, un réseau qui se forme, se solidifie. Il y a une famille du festival aujourd’hui."
www.ipreunion.com
C'est depuis dix ans un moment que j'attends avec impatience. Quelle bonne ambiance autour de chacune des sélections, avec des artistes accessibles et une organisation rarement vue à la Réunion. (il y a plus de bousculades et d'attentes à Cannes!) Bravo à Fabienne Redt et longue vie à son festival!