Les amoureux du ballon ovale sont gâtés en ce moment avec le déroulement de la coupe du monde en Nouvelle-Zélande, qui prendra fin le 23 octobre prochain. L'occasion de faire le point sur cette discipline sportive à La Réunion. Si à son arrivée sur l'île il y a plus de quarante ans, elle ne faisait pas l'unanimité, les choses ont évolué depuis. Le rugby, sans connaître le même engouement que le football chez le public réunionnais, a toutefois de plus en plus d'adeptes aussi bien chez les hommes que chez les femmes, mais aussi chez les jeunes et chez les férus des sports de plage.
La Réunion compte aujourd'hui 14 clubs de rugby, un peu plus de 3000 licenciés, et environ 10 000 pratiquants, selon les indications données par Armon Coupou, président du comité territorial de rugby de La Réunion depuis une dizaine d'années. Pas mal pour une discipline qui n'attirait pas vraiment lors de son arrivée dans les années 1960. "Le rugby a débarqué sur l'île vers 1962-1964, sous l'impulsion de jeunes fonctionnaires métropolitains", rappelle Armon Coupou. "A l'époque, il existait deux ou trois clubs. C'est un sport qui a eu du mal à s'imposer, notamment par rapport au football qui représentait la discipline reine sur l'île", assure-t-il. "Le fait que la discipline soit venue des métropolitains a joué en sa défaveur aussi, on considérait le rugby comme un sport de passage", ajoute Armon Coupou.Cependant, au fil du temps, le rugby a réussi à se faire une place sur les pelouses de l'île et dans le c?ur des Réunionnais. "Le développement de la discipline s'est fait petit à petit. Il s'agissait d'aménager les stades, de structurer les équipes, mais surtout d'intégrer la pratique du rugby dans les m?urs réunionnaises et de faire comprendre à la population que sous un sport qui peut paraître brutal au premier abord, se cachent en vérité des valeurs fortes, telles que la générosité, la solidarité, la tolérance ou le respect. C'est aussi un sport où on peut s'amuser et se défouler", explique le président du comité territorial de rugby.
Ainsi, après la mise en place du comité de rugby dans le milieu des années 1970, des formations ont pu être proposées et la discipline est parvenue à se développer. Depuis une quinzaine d'années, certains professeurs d'éducation physique et sportive ont initié leurs élèves à la pratique du rugby. Et la discipline se dynamise un peu plus depuis cinq ans. "Il y a un certain nombre de clubs masculins. Mais les filles ont également montré de l'intérêt pour la pratique sportive. L'équipe de La Réunion a d'ailleurs participé au tournoi international de rugby à 7 qui s'est déroulé il y a quelques mois à Saint-Denis. Les filles ont eu l'occasion de se mesurer à des équipes comme l'Afrique du Sud, Madagascar, l'Ouganda, Mayotte, la Nouvelle-Calédonie et l'équipe métropolitaine", souligne Armon Coupou.
Le président du comité territorial estime aussi que la diversité de la pratique participe à une plus grande popularité de la discipline. "On peut jouer au rugby sur les pelouses bien évidemment, mais aussi sur le sable. Le côté sport de plage se veut plus décontracté et apporte du public, ça permet à tout le monde de toucher à un ballon de rugby", assure-t-il. Et là encore, La Réunion se débrouille pas mal. "L'équipe de Saint-Pierre était dernièrement en métropole pour participer à la finale de beach rugby. Ils se sont inclinés face à Bobigny, mais c'est une belle expérience qui illustre qu'il y a du potentiel sur l'île pour ce sport", estime Armon Coupou.
Au sujet de ce potentiel, certains Réunionnais sont entrés dans des clubs métropolitains, à l'image de Jordan Sigismeau ou Romain Mazzochin. "Mais partir dans les centres de formation dans l'Hexagone n'est pas toujours chose aisée, à cause de l'éloignement, du froid et de l'exigence demandée. On essaye donc de bien réparer les petits avant de partir. On a d'ailleurs ouvert un centre sur l'île avec le CREPS pour intégrer les jeunes de 14 à 17 ans avant de les placer en métropole, afin de mieux leur inculquer la discipline".
La pratique est donc en pleine évolution sur l'île. En cinquante ans, le rugby a réussi à transformer son essai sur les terres réunionnaises.
Samia Omarjee pour