Les médecins libéraux de La Réunion, à l'instar de leurs collègues de l'Hexagone, sont en grève ce mardi 14 février 2023. La grogne a débuté il y a plusieurs mois déjà, dans le cadre de la proposition de loi Rist étendant certaines compétences des médecins aux infirmiers. Les syndicats réclament par ailleurs une augmentation tarifaire de 50 euros pour les consultations, contre les 1,50 euros proposés par le gouvernement. Une conférence de presse est organisée par l'intersyndicale réunionnaise pour l'occasion ce mardi à 10 heures 30. Nous serons en direct, suivez-nous.
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"Les médecins ont des salaires qui ne leur permette pas d'engager des employés" estime Christine Kowalzyck
"On travaille 52 heures par semaine, et les jeunes médecins aspirent à une vie privée" abonde-t-elle, considérant qu'il y a une méconnaissance des réalités du quotidien du côté du public.
"Le patient est toujours dans la relation de confiance avec son médecin. Mais dans la vision globale il y a effectivement un désamour, parce qu'il y a un gouvernement qui porte atteinte à la crédibilité du médecin."
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"On est entrain de payer la politique des 20 dernières années"
"Si le numerus clausus a été supprimé, nous allons devoir attendre 10 ans pour qu'ils soient diplômés" dit Christine Kowalzyck.
En ce qui concerne les déserts médicaux, les syndicats rejettent les mesures coercitives. "Nous sommes déjà à flux tendu dans toutes la France, comment décide-t-on où envoyer les étudiants ? Les mesures coercitives vont surtout éloigner les jeunes des études de médecines."
Le mal-être des médecins et des étudiants est discutée. "Il y a des étudiants qui se suicident, d'autres qui font des burn-out, 10% qui abandonnent les études".
"Cette situation peut aussi s'observer chez les médecins, la profession est en souffrance. Si on améliore pas les choses, il n'y aura pas de candidats pour devenir médecin".
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"L'ordre des médecins est dans la rue, c'est historique" disent les syndicats
"L'ordre veut dénoncer le risque de disparition du système de santé à la française. On manque de médecins, en particulier dans certains territoires. On a dégoûté beaucoup de jeunes à se diriger vers la médecine générale, qui est celle qui présente le plus de contrainte. Les jeunes médecins, à qui on rajoute une quatrième année d'internat, n'ont pas envie de s'installer dans ces conditions"
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"Il y a un taux de suicide 2,5 fois plus élevé chez les médecins" alerte Elodie Huot
"Il y a quand même 48% des médecins généralistes qui s'estiment épuiser" continue le médecin. Une situation, dite "syndrôme d'épuisement" qui peut se décliner aux autres branches de la médecine.
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"S'il n'y a pas de revalorisation des honoraires, il y aura un désengagement"
"L'Etat doit s'engager si on ne veut pas se diriger vers un système de santé semblable à celui anglo-saxon" estime Christine Kowalzyck.
"Une valorisation de la consultation complexe permettra pour le médecin d'investir s'il le souhaite dans un assistant médical afin de l'aider à coordonner le patient et les différents intervenants" disent les syndicats.
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Les médecins spécialistes sont aussi présents
"90% des cabinets de ville sont fermés, tous les cabinets de radiologie sont fermés" annonce le docteur Reuben Veerapen, chirurgien. "La grève est massive."
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Les syndicats dénoncent le transfert de compétence
"C'est permettre à un.e infirmier.ère ayant 5 ans de formation versus un médecin formé en 10 ans de pouvoir prendre en charge des patients porteurs de pathologies chroniques. C'est à dire diagnostiquer et prescrire sous la responsabilité d'un médecin sans que celui-ci n'ait vu le patient" dénonce Christine Kowalzyck.
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"Depuis 20 ans, le tarif de la consultation de base n'a que peu progressé au regard de l'inflation" explique Christine Kowalzyck
"Dans la réalité, l'inflation a été de 31 % en 20 ans contre 3% de profession pour la consultation. En décembre 2022, la CARMF (Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France) a présenté les chiffres, corrigés de l'inflation, de l'évolution des revenus des médecins libéraux de 2002 à 2021, chiffres inédits à ce jour. Ils montrent qu'en vingt ans le pouvoir d'achat des médecins n'a progressé que 3% : c'est trois fois moins que les salariés du privé" développe-t-elle. -
"Il y a une grande incompréhension sur nos raisons de faire la grève" estime Christine Kowalzyck
"Depuis de nombreuses années, les différentes politiques de santé ont abouti à un manque cruel de médecins libéraux" dit-elle.
Elle liste de nombreux dysfonctionnements au sein du métier :
- Maintien voire baisse du numerus clausus et augmentation du temps de formation des médecins (complexification de l'entrée dans les études, souffrance psychique des étudiants en médecine….10 % abandonnent leurs études)- Manque d'anticipation sur l'évolution du métier : les médecins libéraux aspirant à des horaires de travail plus adaptés à leur vie privée- Démographie médicale en pyramide inversée avec des départs massifs à la retraite et recours aux reconversions vers d'autres modes d'exercice (salariat, .)- Augmentation du nombre de patients à prendre en charge liée à l'accroissement du nombre de personnes porteuses de pathologies chroniques nécessitant une prise en charge de plus en plus complexe (vieillissement de la population)- Désorganisation du système hospitalier par manque de structuration et de moyens (suppression massive de lits et donc de postes de soignants, abandon des hôpitaux de proximité dans les territoires) -
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À propos
"La grève est suivie de façon intensive à La Réunion" prévient Christine Kowalzyck, médecin à Saint-André et présidente de l’Union régionale des médecins libéraux.
D'après cette dernière, près de 300 médecins s'étaient déjà signalés en grève ce lundi. Un chiffre en-deçà de la réalité du terrain : il risque d'être particulièrement difficile de trouver un rendez-vous chez un généraliste ce mardi, dont les cabinets seront fermés, selon Christine Kowalzyck.
Par solidarité, les médecins de garde suivent aussi la grève ce mardi, bien que nombreux d'entre eux risquent d'être réquisitionnés pour assurer le service de santé. "Si cette loi concerne majoritairement les médecins libéraux, certaines mesures comme la délégation de certains soins de santé nous concernent aussi" assure Laurent Fabrigoule, médecin généraliste dans un cabinet de garde de Saint-Joseph.
"La situation globale du système de santé français est catastrophique, et ça s'empire d'année en année" soupire-t-il. "Au lieu d'essayer de réparer les erreurs commises ces dernières décennies par les gouvernements précédents, on préfère continue à casser notre système de santé."
Il dénonce lui aussi l'augmentation de seulement 1,50 euro des cotations des actes médicaux. "C'est ridicule et scandaleux" estime-t-il. "Nous sommes le 26ème pays sur 27 dans l'Union européenne en termes de rémunérations de consultation."
- L'ordre départemental des médecins dans la tourmente -Cette grève intervient dans un contexte particulier à La Réunion, alors que l'élection du président de l'organisation départementale de l'Ordre des médecins a été annulée par le tribunal administratif ce vendredi 10 février 2023. Le tribunal a reconnu des faits de fraudes au moment des “opérations électorales”. Ainsi, Benjamin Dusang n’est plus le président de l’ordre.
En temps normal, l'intérim de la présidence devrait revenir au vice-président. Mais dans le cas présent, le vice-président en question…est mis en examen dans une affaire de fraude à la Sécurité sociale à hauteur 1,5 million d'euros, et a été radié de la profession.
Un ou une président.e par intérim devrait être nommé.e sous peu. Sinon, c'est l'Ordre national des médecins qui devra intervenir pour nommer quelqu'un.
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