À La Réunion, les jardins sont à l'image de l'île, divers et variés. La richesse culturelle se retrouve évidemment dans les "Kours" créoles, dans les jardins marrons mais aussi sur les bords de ravines aménagés. Partout sur l’île, le jardin est présent. Depuis des années, des générations de jardiniers se sont succédé pour créer ces lieux, brassage des cultures, des croyances et des origines ethniques (Photo : rb/www.imazpress.com)
Souvent décrit au premier regard comme un fouillis végétal, le jardin réunionnais avec ses trois fonctions essentielles : se nourrir (manzé), se soigner (zerbaz) et recycler (resiklaz) révèle cette diversité.
Mélange de salade, oignons, tomate, bringelle, mouroung, géranium, feuilles 4 épices, kaloupilé… Le jardin reflète les multiples influences et pratiques qui ont façonné notre société. Notre cours c'est nous. C'est être cafre, malbar, chinois, zoreil…
Il permet autant de cultiver tranquillement, que de faire des économies en plantant son propre garde-manger, que de soigner avec les feuilles péi.
- Le jardin créole : un fouillis végétal organisé -
Produit de savoirs pratiques et culturels, le jardin créole est décrit comme un espace pour la transmission de la connaissance.
Le ti coin la kour se décompose en trois parties pour Raymond Lucas, naturaliste. "Il y a d'abord le devant de port, le parterre où se trouvent les fleurs et plantes aromatiques pour accueillir", dit-il. "Ce morceau-là, c'est là où la maîtresse de maison jardine. Quand demoun i cri et na poin person. C'est là aussi où commence les conversations, le partage des plants."
Vient ensuite "le jardin avec la palissade pour amener une certaine autosuffisance alimentaire pour la famille". "Na dedans le plant de salade, de carotte, du persil, des pieds de bringelle, le piment…"
Et enfin le fond de kour, où se trouvent les animaux. "Il y a les poules, canards, pintades, cabris, lapins, cochons amarrés avec un poteau", détaille Raymond Lucas, membre fondateur de l’Association des plantes et de la nature. Écoutez.
- Le jardin créole comme miroir de la kréolité -
"L'idée c'est de dire que le jardin créole, c'est le reflet de l'âme créole", explique Stéphanie Gonthier, fondatrice de Luniversité Zarboutan.
"Tout se mélange à La Réunion. On est loin des jardins octogonaux, symétriques que l'on voit dans les séries américaines. À La Réunion, il n'y a pas deux jardins similaires", poursuit-elle.
"Dans son morceau de terre, le créole exprime sa pluralité et son individualité. La kour peut être vue comme une création identitaire qui permet l'enracinement dans un processus en constante évolution", souligne Stéphanie Gonthier.
"Souvent il y a les mêmes plantes - celles que l'on pense à tort être des mauvaises herbes alors qu'elles sont médicinales et comestibles – mais agencée d'une autre façon. Chacun y met son âme", ajoute Stéphanie Gonthier. Écoutez.
- Une culture qui se perd, au profit de jardins gazonnés -
Malheureusement, l'urbanisation a provoqué une forme de déconnexion des habitants à la terre et entraîne depuis une perte des savoir-faire "traditionnels" relatifs au jardinage.
"Ce jardin, dont beaucoup de plantes sont investies d'une fonction cultuelle, se perd car La Réunion succombe aux sirènes modernes, à la culture du vide, à un jardin avec une pelouse et trois palmiers", se désole Isabelle Horau-Joly, anthropologue.
Le jardin créole de nos jours "est considéré comme un jardin sale et on assiste à l'appauvrissement de la culture réunionnaise et de la biodiversité", dit-elle. Écoutez.
Selon l'anthropologue, "il faut avoir une approche humaine du jardin". Un combat que mène Sébastien Clément, paysagiste, qui prône la création d'une formation de paysagiste spécialisé dans les cultures tropicales à La Réunion lors d'un événement initié par le Conseil de la culture au Moca à Saint-Denis.
De quoi dépasser une vision limitée à la dimension touristique d'un jardin créole, essentiellement décoratif et vendu comme un pur produit esthétique.
ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com
Le jardin créole est une perle de la creolite ! Oui, un reflet de l'âme créole.
Pour préserver son essence, il faut aussi, comme pour cet événement, valoriser la créolité, (ses racines et son expression aujourd'hui) dans son rapport à son environnement proche, à la nature (souvent focalisé sur l'alimentation, la musique, etc)
Bravo pour ce coup de projecteur sur la kour kréol !
C'est un début, mais il y a besoin de plus: de réinventer avec les enjeux modernes. De faire des "kour kréol" urbaines et collectives ! De créoliser davantage les jardins partagés qui sont en pleine expansion.
Isabelle Horau-Joly, quelle déesse de culture et d'intelligence. Bien sûr qu'il faut redécouvrir ces sublimes jardins créoles. Hélas à Saint-Denis, la beauté du barachois autrefois jardin magnifique de bord de mer a été sacrifié pour en faire un champ de foire de politique la fête. Le jardin Laboudonnais avec sa statue d'époque nous transportait dans la Réunion au charme colonial est devenu un jardin urbain du 93... Le jardin de l'Etat autrefois magnifique, a été restauré en jardin pseudo créole certes agréable mais totalement moins beau que l'ancien jardin au charme indicible... Et que dire du futur parc dionysiens, calqué sur un parc urbain là encore du 93.... tristesse, tristesse. Vivement que le voeux de Sébastien Clément se concrétise !!!
Parler de fouilli organisé pour chercher à valoriser le jardin créole, quelle bêtise ! Quel manque de vocabulaire et de culture. On parle plutôt de la redécouverte de la nature sous son aspect poétique et sauvage, avec des formes irrégulières et des jeux de couleurs et de profondeur créés avec la diversité des végétaux sur l'île. Etc. Etc.
Grand Merci à vous toutes et tous qui savez de quoi vous parlez! Zardin Kreol, le kom la vie, ou sa k'nan a l'amour, la vie le la! Zardinié gran matin: tout chante, ici, là, tout enchante:
oursin soleil , fleurs sourires, chants d'oiseaux, arbre abeilles chante aussi...
Liberté!
Exellente reflexion sur nos jardin tradition et la préservation de notre culture du jardin .. en foutanorganizé..!👍👍✨🏝️🙏