Agriculture

La Réunion consomme (beaucoup) de pesticides mais cherche à se déshabituer

  • Publié le 22 janvier 2025 à 08:09
  • Actualisé le 22 janvier 2025 à 14:31

La Réunion est le département ultramarin consommant le plus de pesticides, révèle l'ONG Générations dans une étude publiée début janvier 2025. Selon ces chiffres, en 2022, les agriculteurs locaux ont acheté 67,7 tonnes de pesticides dont plus de 20 tonnes de glyphosate. Ces données sont toutefois à prendre avec précaution. Depuis 2019, l'utilisation de produits phytosanitaires a commencé à diminuer. La baisse a atteint près de 22% en 2024. "Les agriculteurs cherchent des solutions adaptées aux contraintes locales" commente la la FDSEA, principal syndicat agricole dans l'île (Photo : www.imazpress.com)

La carte de l'association affiche les résultats par année (de 2015 à 2022), sur la base du calcul de l'indice de fréquence de traitement phytosanitaire (IFT) communal. Une estimation du niveau d'utilisation des pesticides en fonction de l'assolement (répartition des cultures), du type de pratique (conventionnelle ou bio) et des IFT régionaux.

Basée sur les données de la Banque nationale des ventes de produits phytopharmaceutiques (BNV-D), cette carte "permet aux chargés des contrôles sanitaires de l’eau potable d’identifier et de cibler les territoires à risque", précise Générations Futures.

La carte permet aussi de se pencher sur trois des substances parmi les plus décriées actuellement : le glyphosate, classé comme probable cancérogène par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) mais toujours autorisés dans l'UE, le prosulfocarbe, herbicide parmi les plus vendus en France, et le flufénacet, de la famille des PFAS, plus connus sous le nom de "polluants éternels" et dénoncés pour leur action néfaste sur la santé et l'environnement en raison de leur durée de vie dans les sols.

Lire aussi - L'UE va renouveler l'autorisation du glyphosate pour 10 ans

- La Réunion : département ultramarin le plus consommateur de pesticides -

En 2022, l'île a acheté 67,7 tonnes de pesticides dont plus de 20 tonnes de glyphosate.

Le constat est le même pour le "2.4-d" - acide 2,4-dichlorophénoxyacétique qui entre en tant que substance active dans la composition d'herbicides - acheté pour16,3 tonnes à La Réunion.

De plus, selon les données relevées par Générations Futures, l'indice de fréquence de traitement phytosanitaire moyen de La Réunion est de 1,89.

Il varie de 0 pour la commune du Port jusqu’à un maximum de 2,82 pour la commune de Sainte-Suzanne.

Sur la carte Adonis des herbicides, 12 communes apparaissent en rouge du fait d’IFT herbicide moyens (sur l’ensemble de la SAU - surface agricole utile) tous supérieurs à 2 et proches de 2,91, l’IFT herbicide communal le plus élevé en France.

Les productions fruitières (majoritairement banane, ananas et mangues) à La Réunion ont fortement recours à l’utilisation de pesticides (principalement des fongicides et des insecticides). Elles occupent 10% de la surface agricole (dont 10% en bio) et 25% de l’utilisation des pesticides sur l’île.

Enfin, des pesticides sont également utilisés en production de légumes qui occupe 0,1% de la surface agricole et 1% de l’utilisation totale des pesticides sur l’île.

- La production de canne à sucre dépendante de l’usage d’herbicides -

À La Réunion, dominée par la culture de la canne qui occupe plus de 53% de la surface agricole de l’île (en 2022), la production est de loin la plus impactante sur les quantités de pesticides utilisées sur l'île.

La pression pesticide est d'ailleurs concentrée sur les zones littorales.

"Les molécules utilisées pour désherber et leurs métabolites contaminent l’environnement (et en particulier l’eau) et les autorisations d’usage sont progressivement retirées (comme le S-métolachlore). L’enjeu est donc de taille pour la filière canne à sucre qui doit poursuivre la mise en œuvre de pratiques alternatives au désherbage chimique pour diminuer la pression globale des pesticides", précise l'ONG.

- Des indicateurs à prendre en compte -

"Selon les chiffres de Génération Future, La Réunion n’est pas un territoire singulier dans l’utilisation des produits phytosanitaires car elle se classe en 49ème position. La comparaison entre les régions ultramarines doit toutefois être prise en compte avec précaution car certains facteurs ne sont pas intégrés et peuvent varier en fonction du territoire (culture, climat, caractéristiques des produits)", indique la préfecture de La Réunion.

"L’agriculture réunionnaise présente des caractéristiques différentes des autres DROM. Le territoire a une production nettement supérieure à ces dernières (production de 360 millions d'euros contre 100 à 600 millions pour les autres DROM)", ajoute les services de l'État.

"Ces productions sont soumises à des conditions climatiques particulières (chaleur, humidité), favorisant le développement de ravageurs et de maladies. Cela nécessite parfois des interventions phytosanitaires pour préserver les cultures et garantir un rendement minimal pour assurer un revenu décent aux agriculteurs", précise Guillaume Sellier, président des Jeunes Agriculteurs.

- Les pesticides réduits de 22% à La Réunion -

Si la carte date de 2022, dès 2019, "nous avons diminué les produits phytosanitaires et les herbicides de l'ordre de 22%", note Stéphane Sarnon, président de la FDSEA. Il faut savoir "que quand on utilise les pesticides ce n'est pas une volonté, c'est par défaut", indique-t-il.

De même que depuis, "certaines molécules utilisées dans les traitements phytosanitaires ont été supprimées à la suite de décisions réglementaires européennes et nationales visant à réduire l’impact environnemental des pratiques agricoles", indique Guillaume Sellier.

"Des efforts importants sont faits pour améliorer les pratiques, notamment la diminution de l’IFT. De plus, des programmes de recherche et d’accompagnement sont en cours pour optimiser les doses utilisées et réduire les applications", poursuit l'agriculteur.

La Réunion est en perpétuelle recherche d'alternatives "pour développer des techniques de biocontrôle (utilisation de produits naturels, prédateurs naturels ou micro-organismes)".

"Une feuille de route régionale est d'ailleurs en construction pour l’année 2025 et répondra aux enjeux locaux sur les six prochaines années, dans le cadre du plan Écophyto", abonde la préfecture.

Cinq millions d'euros ont également été validés dans le cadre du dispositif PARSADA (Plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures).

"Il s’agit du projet IDECAS sur le désherbage de la canne à sucre et le projet SA-IRA sur les ravageurs des fruits et légumes ayant pour vocation de faire émerger des solutions innovantes permettant une baisse significative de l’usage des pesticides", précise l'État.

Les efforts pour réduire l’utilisation des pesticides à La Réunion sont réels et progressent, mais ces solutions doivent être adaptées aux contraintes locales.

ma.m/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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5 Commentaires
Gérard LEVENEUR
Gérard LEVENEUR
2 mois

La Réunion a remplacé la Martinique et la Guadeloupe, c'est bien à cause de cela que la population développe beaucoup de cancer, il faut revenir rapidement à la façon de cultiver d'avant par nos vieux parents, il n'y avait pas tous ces saloperies d'insecticides et de pesticides comme ceux utilisés actuellement par nos agriculteurs qui sont peu intelligent et qui écoute les gens qui sont au service de BAYER.

Bernard BONNET
Bernard BONNET
2 mois

Semble-t-il, l'article est à l'initiative de la rédaction d'Imaz press . Merci pour ce point de situation! Il est très bien construit et riche de nombreuses informations actualisées.
... Mais beaucoup proviennent d'évidence d'interlocuteurs qui défendent leur politique, leurs actions et certains résultats obtenus en conséquence: Services de l'État, Syndicats agricoles, Département, etc.
Chacun a mis en avant ce qui sert son discours depuis des dizaines d'années et ce qui est en cours et devrait être porteur de progrès dans la réduction de l'utilisation des pesticides à La Réunion; avec, au nom de spécificités locales, la volonté d'adapter les réglementations nationales et européennes pour continuer à utiliser ces produits profondément néfastes pour la santé humaine et l'environnement naturel dans tous ses composants.
Une spécificité fondamentale de notre île, c'est que tout ce qui est déversé sur les bassins versants se retrouve dans les nappes phréatiques et sur le littoral, dans les "lagons" et sur la barrière récifale: celle qui protège ce littoral depuis des millénaires et est aujourd'hui gravement mise en péril.
Que les services de l'État affichent donc les taux de pollution récurrents des sols, des eaux d'infiltration et des nappes, des eaux marines et... de tout ce que nous consommons pour l'alimentation ou que nous exportons!
Depuis combien d'années a-t-on utilisé les pesticides à la Réunion? Auparavant, ne produisions-nous pas de fruits, de légumes pour l'alimentation humaine?
Et si l'État, qui a affiché en 2019 avec la trajectoire 5.0 "0 polluant agricole" , et avec les collectivités, soutenaient beaucoup plus ardemment et publiquement l'agriculture biologique? Ne serait-ce pas cela la vraie transition écologique dont l'urgence n'est plus à redire?

Gérard LEVENEUR
Gérard LEVENEUR
2 mois

La Réunion a remplacé la Martinique et la Guadeloupe, c'est bien à cause de cela que la population développe beaucoup de cancer, il faut revenir rapidement à la façon de cultiver d'avant par nos vieux parents, il n'y avait pas tous ces saloperies d'insecticides et de pesticides comme ceux utilisés actuellement par nos agriculteurs qui sont peu intelligent et qui écoute les gens qui sont au service de BAYER.

Pierrot 974
Pierrot 974
2 mois

Nos cancers disent merci aux agriculto-chimistes de Ste Suzanne !
On se demande comment faisaient les vrais agriculteurs avant que le glyphosate soit inventé...
Mangez du bon sucre et buvez du bon rhum, bien empoisonnés, avec la bénédiction de Macron qui refuse l'interdiction du glyphosate, malgré ses promesses !

benoit
benoit
2 mois

cane=subvention=pesticide=lagon plein de pesticide