[VIDÉO] En visite à La Réunion

Younous Omarjee, député européen : "les gens doivent se soigner contre le racisme et la xénophobie"

  • Publié le 15 novembre 2023 à 10:02

Younous Omarjee, député européen, président de la commission du développement régional au parlement européen et membre de la France Insoumise est actuellement en visite à La Réunion son île natale. Dans un entretien accordé à Imaz Press, le député est revenu sur la guerre qui fait rage entre Israël et le Hamas entrainant la mort de milliers de personnes. Commentant les outrances générées par ce conflit dans une partie des opinions publiques de l'Occident, le député européen souligne : "les gens doivent se soigner contre le racisme et la xénophobie". Il a aussi évoqué avec nous la visite de Virginijus Sinkevičius, Commissaire européen aux Affaires maritimes et à la Pêche et la nomination d'Huguette Bello à la présidence des régions ultrapériphériques (RUP). Entretien (Photo : rb/www.imazpress.com)

• Vous êtes député européen depuis trois mandats, affilié LFI. Ce parti régulièrement stigmatisé et accusé de refuser de condamner le Hamas. Qu'en pensez-vus ?

Je crois que cette stigmatisation a un objectif, celui de nous faire taire dans la condamnation aujourd'hui des crimes qui sont commis à Gaza, des crimes de guerre.

Il faut bien noter que nous sommes à peu près les seuls à avoir condamné immédiatement les crimes de guerre commis en Israël par le Hamas le 7 octobre. Dès le lendemain de l'opération de Tsahal nous le savions, cela allait prendre au fur et à mesure et avancer vers une dimension tout à fait tragique, meurtrière, contraire au droit international.

Nous devons nous élever contre ce que j'appelle un crime contre l'humanité. Les gens le savent ici à La Réunion, nous sommes en 2023 et nous vivons en direct live ces images insupportables de civils qui sont bombardés, sous les décombres.

Si nous voulons être en concordance avec les valeurs que nous proclamons, nous ne pouvons pas nous taire.

Beaucoup de dirigeants européens et de responsables politique ont condamné l'attaque du Hamas mais pour le reste, ont apporté leur soutien à Israël et lui ont accordé un droit à se défendre et on le sait c'est en contradiction avec le droit international. Ce qui veut dire que d'une certaine manière ils portent aussi une responsabilité dans le cours tragique de ces événements.

Je pense qu'il y a cet objectif de faire taire toutes les voix de soutien au peuple palestinien. Cela fait des années que la communication du gouvernement d'extrême droite de Benyamin Netanyahou vise à opérer une confusion entre la défense du peuple palestinien et l'accusation abjecte d'antisémitisme et c'est une terreur intellectuelle qui aujourd'hui s'abat sur le débat public.

Mais nous tenons bon car il faut tenir bon. Parce que des millions des Français ont un sentiment de solidarité vis-à-vis des victimes. Et ces millions de Français, il faut que leur colère puisse être exprimée dans le débat démocratique et si on laisse cela, se serait très dangereux.

• Vous mettez l'accent sur l'attitude de l'État français qui condamne peu malgré la mobilisation dans la rue

Il faut rappeler qu'il s'agit d'une guerre coloniale menée par un armée d'occupation et les pays européen on cette histoire coloniale qui est encore ancrée dans les profondeurs. Il est évident que ces pays se désolidarisent beaucoup plus facilement avec ces opérations coloniales, plutôt que les peuples du Sud global qui lisent les événements de manière différente.

Il y a une fracture entre l'Occident et le Sud global qui va s'aggraver de manière plus profonde qu'elle ne l'était déjà.

• Quels sont les risques engendrés par cette attitude ?

D'abord il y a le risque d'un embrasement de la région et que ce conflit israélo-palestinien devienne ce point brûlant.

Tout est fait pour que cela n'advienne pas.

Mais hier, j'ai noté une déclaration du ministre israélien qui menaçait de s'attaquer au Liban donc la situation est excessivement dangereuse.

Un pays comme la France doit mettre son affluence au service de ce non embrasement et on espère que notre diplomatie est en action pour cela.

Dans le même temps, vous avez la guerre en Ukraine qui se poursuit. Les conflits sont intenses et la guerre n'est pas terminée et cette guerre a créé une situation géopolitique nouvelle. Vous combinez les deux, cette nouvelle géopolitique est en train de naitre sous les yeux et un pays comme la France perdrait beaucoup à ne pas saisir ce qui est en train de se passer.

Il en revient cette théorie du choc des civilisations qui ouvre sur des guerres de religion du bien et du mal et c'est le danger auquel il faut échapper.

• À La Réunion, deux rassemblements pour la paix en Palestine ont eu lieu. Quel apporte peut avoir La Réunion dans ce mouvement ?

J'étais au rassemblement et j'ai commencé mon discours en disant aux Réunionnais que nous devons avoir conscience que nous avons atteint un niveau très avancé chez nous dans le dialogue des cultures et des religions.

Je vis en Europe et je me dis nous sommes plus civilisés et là-bas ils sont malades dans leur tête. Il faut qu'ils se soignent contre les maux du racisme, de la xénophobie, de la peur des autres.

À La Réunion, même si les choses ne sont jamais définitivement acquises, nous avons forgé des valeurs de paix, des valeurs de respect qui font que je ne suis pas surpris et nous sommes de ces outre-mer qui savons ce qu'est l'histoire colonial. Ici nous avons l'histoire marquée par l'esclavage et c'est évident que les Réunionnais de manière naturelle se retrouvent dans le soutien aux palestinien et j'en suis très fier.

Je pense que les Français sont révoltés de voir que les palestiniens continuent de vivre sous le joug de l'armée israélienne.

Autre sujet, le commissaire européen à l'environnement et à la pêche est en visite à La Réunion, selon vous quel est l'avenir de la filière à La Réunion ?

Nous voulions qu'il y ait un avenir mais la réalité, il faut le dire, c'est que tout est fait pour empêcher le développement et la structuration d'une filière pêche à La Réunion.

99% des captures de poissons dans l'Océan Indien sont le fait de flotte internationale et européenne. La part restant pour les pêcheurs de La Réunion.

Nous sommes une île entournée d'eau et c'est évident que la pêche doit d'abord pouvoir servir à des objectifs d'auto-suffisance alimentaire. C'est une aberration aujourd'hui qu'on apporte du poisson en surgelé qu'on retrouve dans les supermarchés.

En tant que président de la commission du développement régional, je dois faire en sorte que les pêcheurs aient la possibilité de pêcher dans nos eaux, de débarquer à La Réunion, de transformer le poisson chez nous et de le commercialiser ici pour le besoin du développement local et non pas pour subventionner les bateaux qui vont débarquer ailleurs.

• Quelles solutions faudrait-il mettre en oeuvre ?

La proposition que j'avais faite c'était de réserver la possibilité de la modernisation et du renouvellement des flottes de pêche aux seuls bateaux des petits pêcheurs réunionnais.

L'Union européenne a accepté ma proposition. La décision a été prise par la commission européenne et par le commissaire à la concurrence, à condition qu'il y ait une transmission par la France d'un certain nombre de données économiques sur la ressource.

Mon amendement et mon rapport ont été votés en 2017. Autorisation en 2018. 2019, 2020, 2021, la France ne transmet pas les données. 2022, elle les transmet partiellement et 2023 pareil. En mars 2023, la commission fait le constat qu'après toutes ces années la France n'a pas fourni les éléments demandés.

Ce que nous disions à la commission européenne, c'était que la demande formulée à la France concernant La Réunion était inadaptée par rapport aux particularités de la pêche chez nous. On ne peut pas demander aux Réunionnais de fournir les mêmes données. Ce que nous avons donc demandé c'est d'appliquer la décision politique de considérer sur la base de l'article 349 qui fonde ces dérogations, de considérer que les données transmissions sont conformes et ainsi pouvoir prendre la décision.

Sur ce sujet, le comité scientifique doit se réunir dans les jours à venir mais de ce que le commissaire a dit, on ne va pas vers une acceptation. Nous lui avons donc dit ce que nous pensions et sous le coup de la pression il a déclaré "je m'engage avant fin 2024".

Désormais, nous allons rentrer à Bruxelles et nous allons tenter de formaliser cette décision de la commission européenne.

• Huguette Bello vient d'être nommée à la tête des régions ultrapériphérique (RUP), qu'en pensez-vous ?

La présidence des RUP c'est important car c'est peut-être le moment d'avancées significatives et aussi pour avoir de nouveaux programmes en faveur des régions ultrapériphériques.

La présidente réunionnaise a une importance car La Réunion a une forme de leadership reconnue par les institutions européennes. Nous gérons bien les fonds.

De grandes questions budgétaires sont s'ouvrir pendant la présidence des RUP et nous sommes déjà au travail.

Deux phrases pour expliquer l'Europe aux Réunionnais

Je dirais qu'on est dans l'Europe non pas par la géographie mais par rapport à des intérêts croisés.

L'Union européenne tire un avantage considérable des Outre-mer et de La Réunion et nous tirons un avantage de notre appartenance à l'UE.

Mais nous devons rester attentif parce que vous voyez aujourd'hui la pense prise dans beaucoup de pays européen avec l'extrême droite qui avance partout. Cela doit nous inquiéter car nous faisons partie de cette Europe et cela doit aussi nous interroger sur la solidarité.

L'Europe va aussi s'élargir. L'UE pourrait bousculer un certain nombre de carte et nous devons travailler pour maintenir le maximum de bénéfices à sa participation.

ma.m et mb/www.imazpress.com/redac@ipreunion.com

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5 Commentaires
Dépè-chon
Dépè-chon
2 semaines

Il est sorti du bois. Ça sent les élections ...

jeduflair
jeduflair
3 semaines

au moins il parle lui

HULK
HULK
3 semaines

Il devrait trouver un bon docteur pour le gourou MÉLENCHON. Toujours cette indignation sélective indécente.

Jen
Jen
3 semaines

Toujours pas un mot de compassion envers les victimes du pogrom commis par le Hamas le 7 octobre qui n’est pas un crime de guerre mais un massacre de nature genocidaire contre des juifs. On peut condamner Israël pour l’usage disproportionné de la force et les nombreuses victimes innocentes, et pour ses actions de colonisation. Mais on doit parler du massacre odieux qui est le fait de fanatiques pas de résistants ! LFI est aveuglée par son idéologie pro palestinienne, les gens modérés (sont je suis) ne vous suivront plus.

Dom
Dom
3 semaines

Pour qu'il y ait crimes de guerre, il faut qu'il y ait guerre.
Le 7 octobre dernier, une organisation terroriste, le Hamas, dont le but est de rayer Israël de la carte s'en est pris à des civils parce que juifs. Bref une entreprise d'extermination..
Oui, il faut se soigner, car être dans le déni et mettre la lumière uniquement sur ce qui a suivi (la réplique de l'armée d Israël), relayer les infox ,comme l'a fait Mathilde Panot LFI au sujet du bombardement de l'hôpital, voter contre (vous au parlement européen) la condamnation du Hamas.. refuser de participer au rassemblement de dimanche contre l'antisémitisme, se faire l'avocat d'une entreprise génocidaire, relève d'une cécité inquiétante pour des personnes qui ambitionne de gérer les affaires de ce pays.