Documentaire de Sébastien Folin

Ziskakan, ces révolutionnaires créoles

  • Publié le 16 mars 2023 à 02:57
  • Actualisé le 16 mars 2023 à 22:21

La bande à Pounia, proches et amis, militants, personnalités politiques et du monde culturel dans son ensemble ont répondu présent à l’invitation de Sébastien Folin, la semaine dernière, à l’occasion de la diffusion en avant-première de son documentaire consacré à l’emblématique groupe Ziskakan. Un 52 minutes retraçant tant l’histoire d’un mouvement artistique que 40 ans de lutte pour la reconnaissance de la culture créole. (Photo Ziskakan photo, RB imazpress)

Ils étaient tous là jeudi 9 mars 2023, la famille Pounia mais aussi proches et amis, militants, personnalités politiques et du monde culturel pour découvrir l’histoire d’un combat pour la reconnaissance de la culture créole… « Ziskakan, une révolution créole », premier film de Sébastien Folin, est un documentaire de 52 minutes, en créole réunionnais (sous-titré) qui raconte par la voix d’Abd Al Malik, le combat pacifique mené par le groupe Ziskakan, collectif d’artistes, d’intellectuels et de militants, dans les années 70 à La Réunion.

À cette époque, la langue créole et ses avatars culturels sont absents de l’espace public et dévalorisés par le pouvoir politique. Pour contourner la censure, les concerts clandestins et les fanzines distribués sous le manteau, ont participé à la naissance d’un mouvement, dont le ciment a été une solidarité sans faille. Pour la première fois, cette jeunesse réunionnaise racontait sa réalité et dessinait un portrait sans artifice de La Réunion. Une lutte qu’ils ont menée sur le terrain de la parole, à travers les contes, les poèmes et les chansons

Ce documentaire, produit et réalisé par Sébastien Folin himself, est parti d’une idée émanant de Maya Kamaty. « On a commencé à en parler en 2016 et sept ans après, il est enfin sur les écrans. C’est un film avec plusieurs particularités dont je suis fier. D’abord parce que c’est une équipe 100% réunionnaise qui l’a réalisé - pour une chaîne nationale qui plus est - que ce soit le chef opérateur sons, Christophe Martin, le chef opérateur images le directeur photo David Dijoux, le régisseur Yann Baconnier…, on a tout fait ici à La Réunion" se réjouit Sébastien Folin.

"La deuxième fierté c’est que c’est qu’il s’agit d’un film en créole et qui sera sous-titré. Résumer une histoire de plus de 40 ans n’a pas été simple et ce fut une aventure extraordinaire au cours de laquelle j’ai appris beaucoup de choses sur l’histoire du groupe et surtout sur cette époque et ce long mouvement culturel et identitaire qu’a traversé l’île depuis les années 70. Et ce n’est pas fini » ajoute-t-il.

Il n’a pas manqué de remercier la Région, la bibliothèque départementale de La Réunion et la mairie de Saint-Pierre sans oublier le soutien indéfectible de la famille Pounia (Gilbert, Anny, Maya et Waziz) qui a accueilli ce projet à bras ouverts ainsi que les proches tels que Sully Andoche, Alain Armand (premier président de l’association Ziskakan), Patrice Treuthardt qui ont découvert le film pour la première fois jeudi soir… Découverte qui a laissé place à une grande séquence émotion une fois le rideau tombé.

« Avec beaucoup d’avance sur son temps, Ziskakan a ouvert les chemins des possibles et m’a accompagnée lorsque j’étais au lycée Leconte Delisle dans les années 80, dans mon regard sur l’autre à travers leurs chansons engagées dans mon chemin de militante et de combat », n’a pas manqué de souligner Patricia Profil, conseillère régionale, déléguée à la Coopération régionale en matière sportive et culturelle, et pour qui la collectivité répondra toujours présent qu’il s’agira de mettre en lumière « notre culture réunionnaise et notre créolité qui apparaît comme l’un des puissants modèles d’avenir pour l’humanité ».

43 ans après la création du mouvement, alors que Ziskakan a fait le tour du monde, que le maloya est classé au patrimoine mondial immatériel de l’Unesco et le créole est désormais enseigné à l’école, le film interroge ces pionniers sur leurs motivations, leur histoire, leur héritage, et brosse un portrait sans concession de La Réunion post-coloniale où ils ont évolué. Bref, « Ziskakan, une révolution créole » est autant l’histoire d’un mouvement artistique que celle de la quête identitaire d’un bout de France de l’océan Indien. Et si nombre d’entre vous se demandent encore pourquoi Ziskakan, on y apprend avec grand intérêt le pourquoi de ce nom devenu culte ici et par-delà la mer…

- Ils ont dit -

Pierre-Henri Aho, directeur de la BDR et neveu de Patrice Treuthardt : « Lété vrémen gayar de viv’ cet expérience, kom un zistoir la famille. Nou lé tous une famille ici La Réunion. L’expo ke nou la fé ek Ziska Fé Klèr té raconte déjà l’histoire du militantisme culturel, cette révolution ke la eu na 40 ans, nou la sign’ un pacte ek l’association et Ziska Fé Klèr i existe depuis 4 ans maintenant et que zot i donne une envergure nationale avec ce reportage, nou lé plus que contents kan i porte la parole déor ».

Patricia Profil, déléguée à la Coopération régionale en matière sportive et culturelle : « Ce reportage met en lumière l’un des plus grands groupes réunionnais né au cœur des revendications identitaires et sociales des années 70. Époque pas si lointaine où la jeunesse réunionnaise racontait sa réalité et dessinait un portrait sans artifice mais lucide de l’île. C’est aussi l’occasion de mesurer le chemin parcouru depuis plus de 40 ans même s’il reste encore beaucoup à faire. L’époque où le créole était banni dans de nombreuses familles a été balayée par le vent de l’égalité des cultures et des langues. Si nous pouvons nous mettre debout et fiers pour affirmer que nous sommes des hommes et des femmes qui voulons vivre et laisser s’exprimer la mosaïque de nos différences réunies et libérées, c’est aussi parce que des artistes tels que Ziskakan ont mené avec force et courage cette révolution culturelle. Et pour raconter notre histoire, le cinéma est un biais formidable aux vertus émancipatrices extraordinaires pour nous permettre d’avancer ».

Sylvie Baronce, présidente de l’association Ziskakan : "C’est une belle aventure et je n’aurai pas imaginé en faire partie, parce que quand j’étais jeune, à la case on n’écoutait pas de maloya et encore moins Ziskakan. Ma rencontre avec Gilbert quand j’avais 20 ans a ouvert mon esprit et m’a permis de me réconcilier avec mon histoire et la culture de mon pays. Je souhaitais remercier toutes les personnes qui l’ont entouré depuis 1979, tout ce qu’elles ont laissé comme héritage pour faire avancer la culture créole, notre pays et l’aventure continue grâce au soutien de nos nombreux partenaires et sponsors ».

Maya Kamaty : "Lors de mes études à Montpellier, je suivais des cours de socio-linguistique et je m’étais dit qu’il serait intéressant de parler du passage du français au créole chez les étudiants réunionnais installés sur place. Il se trouve que Ziskakan était en tournée à ce moment-là. J’en ai parlé à papa et il a tout de suite été partant. C’est aussi grâce à Ziskakan que je fais de la musique aujourd’hui, même si je voulais pas à la base. En étant à Montpellier, j’ai pu me rendre compte de tout ce que les membres du groupe ont réalisé et pour ça, je leur serai éternellement reconnaissante ».

- Un ouvrage sur le bilinguisme créole réunionnais-français -

Le Conseil de la Culture, de l'Éducation et de l'Environnement, instance consultative de la Région, a récemment édité une publication intitulée « Korbèy shomin la vi biling kréol èk fransé - le bilinguisme créole réunionnais français : une réalité en terre réunionnaise ». Selon Isabelle Testa, conseillère au CCEE, l’objectif est de porter à la connaissance de tous des expériences de bilinguisme dans différents secteurs.

Cet ouvrage résulte de réflexions sur la valorisation de la langue et de la culture créole dans la société, car « si c’est une chance et une richesse d’être bilingue, dans la réalité la valorisation de la langue créole est tout autre. Le CCEE se positionne avant tout comme citoyen parce qu’avant l’école, il y a les parents. Le point de départ c’est le regard qu’on porte en tant que parents sur nos enfants, sur la société et ce regard de l’adulte va accompagner l’enfant dans son développement. Car être bilingue, n’est pas uniquement parler la langue, c’est aussi la comprendre, que ce soit le créole ou le français et cette capacité à jongler entre les deux ».

« Ziskakan, une révolution créole » sera diffusé le 22 mars à La Réunion à 19h45 dans Archipels, et à suivre en national dans La case outremers le doc sur France 3

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2 Commentaires
ZembroKaf
ZembroKaf
1 an

GP n'est pas le créateur de "ziskakan" !!! il c'est approprié le "bébé"!!!

juliana a.
juliana a.
1 an

Ziskakan : premier bénéficiaire de "larzent kolonial" la DRAC et autres zinstitutions kolonial !!!!! G.P grand retourneur de veste ! Ami de tous "puissants" locaux. Un coup à gauche, un coup à droite quand il faut !Quoique cette fois-ci, on l'a pas vu "tape" un roulér quand Mame Belo est arrivé à la Région ! Pas assez payé sans doute !! Comme on dit maintenant un "vrai fake"!