Alors que les vacances d’octobre approchent, il me semble que le moment est venu de faire le point sur la période passée depuis la rentrée. Il me semble qu’elle a été épouvantable tant pour les élèves que pour les enseignants. Au bout d’une semaine à peine, les tensions étaient déjà palpables et annonçaient d’emblée un climat scolaire dominé par les conflits et la violence (Photo : rb/www.imazpress.com)
Qu’on me comprenne bien, je ne mets pas en cause les élèves car, il importe de ne jamais le perdre de vue : ce sont des enfants. Alors qui rendre responsable de cette situation sinon ceux qui sont officiellement responsables, c’est-à-dire, les adultes ? L’éducation n’a-t-elle pas pour visée première d’apprendre à l’enfant à se maîtriser lui-même, c’est-à-dire, à se conduire correctement ? Mais pourquoi la plupart des adultes, parents ou enseignants, en sont-ils apparemment incapables ?
La première raison est qu’ils n’ont pas été formés pour savoir faire cela correctement, ce qui veut également dire efficacement.
Une deuxième raison est qu’ils sont eux aussi dans une forme de toute-puissance que nous ne savons pas reconnaître car nous la croyons réservée à l’enfant. Cela se manifeste par le fait que la plupart des adultes se croient en position d’éduquer par la menace, les cris, les reproches ou les humiliations dans le but de contraindre l’enfant à obéir, à se soumettre à... la volonté de l’adulte, devenu tyran !
La troisième raison est que l’adulte étant le modèle de l’enfant celui-ci tente d’affirmer sa volonté de la même manière, de sorte que le conflit est non seulement inévitable, il est tout naturellement porté à l’escalade, allant ainsi de plus en plus vite vers des extrêmes redoutables.
Le constat que je fais au quotidien est, qu’en maternelle ou en élémentaire, les adultes ne s’efforcent pas de comprendre les besoins des élèves, ils s’efforcent avant tout de les contenir ou de les faire "rentrer dans le rang" de manière souvent brutale (le fait de s’autoriser à crier est quasiment la norme). Ils le font aussi, parfois d’une manière outrageusement complaisante mais dans les deux cas, tout se passe comme si, au fond, ils avaient peur de leurs élèves et cherchaient par tous les moyens à les dominer ou les amadouer afin de les soumettre à leur volonté.
La cerise sur le gâteau c’est que les parents n’ont quasiment plus de respect pour l’enseignant et se permettent de le contester à tout propos. Sauf qu’étant eux-mêmes portés à crier et tempêter, ils ne font qu’ajouter le conflit au conflit, sans même voir que, ce faisant, ils se polarisent souvent sur l’arbre qui cache la forêt de la violence scolaire.
L’école devient donc petit à petit une foire d’empoigne dans laquelle chacun rend l’autre responsable des troubles et protège ainsi son narcissisme à peu de frais, quitte à mettre un peu de sa propre poussière sous le tapis. L’administration a toujours été championne de ce point de vue.
Mais nous arrivons à un moment de l’histoire où les enfants ont déjà pris un tel pouvoir dans les familles qu’ils ne vont pas s’en laisser compter à l’école. Nous avons besoin d’enseignants qui soient des professionnels, tout à la fois formés et responsables, ce qui veut dire, en particulier, capable de reconnaître quand ils sont en échec. Aucune chance que cela arrive demain matin. Nous n’avons même pas les formateurs compétents pour cela. L’école publique part à la dérive, elle est entre Charybde et Scylla. Dieu seul sait ce que l’avenir nous réserve mais je pense qu’il va être de plus en plus difficile de recruter puis de garder les enseignants à leur poste tant ils souffrent au quotidien en même temps qu’ils engendrent une immense souffrance chez leurs élèves.
Cyrav