Tribune libre de Union des Femmes Réunionnaises

Sobatkoz décevant sur l'IVG

  • Publié le 22 mars 2024 à 06:39
  • Actualisé le 22 mars 2024 à 06:41
évelyne corbière

L’Union des Femmes Réunionnaises a suivi avec beaucoup d’attention les débats qui se sont tenus lors de l’émission diffusée sur Réunion Première le 21 mars 2024, autour du droit à l’interruption volontaire de grossesse (Photo www.imazpress.com)

Nous regrettons le manque de précision apportée sur les contours du texte adopté par le Congrès du Parlement.

Nous regrettons qu’alors que notre société réunionnaise est multiculturelle, seule l’église catholique ait eu le privilège de s’exprimer.

Pourtant, il faut bien reconnaître que pendant ces dernières semaines, celle-ci a largement communiqué et fait pression pour nuire à l’inscription de cette liberté dans la Constitution.

Nous regrettons que l’histoire de La Réunion sur le contrôle du corps des femmes n’ait pas été abordée : pas grand chose sur le recours des Réunionnaises à l’avortement avant la loi Veil, rien sur les avortements forcés ni sur les stérilisations forcées, rien sur le depo-provera utilisé en contraceptif, rien sur la politique anti-nataliste que nos mères et grands-mères ont connu.

Nous regrettons que les débats aient finalement - encore une fois -, tourné sur la moralité et la gravité de l’avortement.

Insister autant sur ces deux aspects sans évoquer la situation des femmes dans le monde au regard de ce droit à disposer de leur corps, c’est ignorer délibérément l’avancée majeure pour la France en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

En effet, les arguments qui ont été développés sont ceux des forces anti-avortement, comme si l’inscription de cette liberté dans la Constitution pouvait encore être discutée.

L’impression qui se dégage de ce débat, c’est que l’IVG ne pourrait être moralement toléré et "pardonné"que dans des situations de détresse concernant des mineures ou des personnes vulnérables. Pourtant dans les chiffres recensés chaque année, on sait bien que les femmes qui ont recours à l avortement ne sont pas toutes mineures.

Une femme sur trois a recours à l'IVG dans sa vie, et pour d es raisons qui la concernent personnellement, que chacun doit respecter et s'interdire de commenter.

Ce choix est certes difficile mais ce qui en fait un choix dramatique c'est aussi le jugement que la société porte sur cet acte et sur les femmes qui y recourent. Ce qui est traumatisant c'est aussi l'obligation du secret qui l'entoure si l'on veut échapper à ce jugement

Or, contrairement à la Pologne, nous voulons qu en France l'IVG reste un choix véritable pour les femmes, sans contrain te morale, économique, sociale ou religieuse.

Nous voulons pour les femmes une liberté fondamentale, universelle et garantie . C'est une très grande fierté pour toutes les militantes féministes de l'UFR de voir que la France est le premier pays au monde à inscrire cette liberté pour toutes les f emmes dans son texte suprême.

L'inscription dans la Constitution de la liberté garantie pour les femmes de recourir à une interruption volontaire de grossesse protège les femmes du risque politique d'un recul de ce droit.

Les arguments moralisateurs continuent d'être exprimés de manière décomplexée comme si on pouvait encore considérer que la femme devait perdre tout contrôle sur elle-même et son avenir dès lors qu'elle est enceinte.

Le jugement qui pèse sur les femmes qui recourent à l'IVG n a pas été dénoncé il a été justifié. Ce débat n a pas fait progress er l égalité entre les femmes et les hommes. Heureusement qu'il intervient après que les parlementaires de notre pays ont eu la sagesse de garantir par la Con stitution cette liberté pour les femmes, en admettant qu'elles sont définitivement les plus placée  pour décider pour elles-mêmes

Evelyne Corbière Naminzo
Présidente de l’Union des Femmes Réunionnaises
Sénatrice de La Réunion
 

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