Des centaines de personnes sont venues rendre hommage à Laurence Vergès ce lundi soir 5 novembre 2012 au domaine des Bois de Senteurs à La Possession. Des personnalités et des militants de toutes tendances politiques confondues, du monde associatif, culturel et une foule d'anonymes sont venus se dire un dernier mot à cette grande figure de l'histoire contemporaine réunionnaise. Le chagrin et l'émotion ont été palpables tout au long de cette veillée chaleureuse malgré tout. Nous publions ci-après un hommage rendu par Brigitte Croisier, amie proche de Laurence Vergès. Cette dernière sera inhumée au cimetière paysager du Port ce mardi à 16 heures
Laurence Vergès n’est plus, mais ce lundi soir, elle a réuni beaucoup de monde lors de la veillée organisée à La Possession. Après le moment intime de recueillement où chacun et chacune la contemplent, lui murmurent en silence un dernier petit mot, déposent un bouquet, on se retrouve pour échanger ses souvenirs, partager ses émotions. Parler d’elle la rend comme présente.
Un diaporama fait défiler des photos où l’on a, un instant, l’illusion d’une Laurence à nouveau tellement vivante : interviewant des femmes pour Témoignages, accompagnant Paul Vergès en voyage, et puis très souvent entourée de ses enfants, petits-enfants et parfois arrière petits-enfants. Ferrat, Ferré, Brel, Mouloudji et d’autres ajoutent à la nostalgie. Yeux vifs, rire franc, le goût des autres, la curiosité du monde, presque aventureuse dans sa spontanéité, on la retrouvait telle qu’en elle-même.
Cela explique sans doute à la fois l’affluence et la diversité des visiteurs, au-delà des frontières politiques de partis. Un paradoxe seulement apparent : Laurence Vergès, ancrée dans ses convictions communistes, fait l’unanimité et rassemble sur elle la sympathie par ses qualités humaines de simplicité, de modestie, de franchise.
Lundi soir, c’était comme si son esprit flottait dans l’assistance pour unir les uns et les autres dans un climat de fraternité chaleureuse à son image.
Dommage que, toujours par humilité, elle n’ait pas voulu raconter sa vie, cette longue vie, belle et pleine. Sollicitée, elle répondait toujours que cela n’était pas intéressant, alors qu’arrivée à La Réunion en 1954 avec son mari, partageant convictions et combats de celui-ci, avec toutes les péripéties des luttes politiques de l’époque, elle aurait pu écrire un récit palpitant, un roman vrai.
Engagement politique, féministe, culturel : elle a conjugué ces trois aspects dans une soif d’action et une volonté de transformer la société qui ne connaissaient pas de répit. Les freins habituels de l’âge la ralentirent à peine et elle a tenu à participer, le plus longtemps possible, à diverses manifestations. Elle se sentait autant à sa place dans un meeting que dans une conférence, donnant à penser aux plus jeunes : serai-je capable d’en faire autant plus tard ?
Puisse toute cette vivacité nourrir, ici et maintenant, les énergies dont La Réunion a besoin !
Brigitte Croisier