Grève aux centrales thermiques du Gol et de Bois-Rouge

Pas tous égaux face aux délestages

  • Publié le 4 janvier 2011 à 11:00
Centrale thermique du Gol

Depuis le dimanche 2 janvier 2011 à 23 heures, les Réunionnais vivent au rythme des coupures de courant électrique. Au plus fort de la consommation, dans la soirée du lundi 3 janvier, près de 90 000 foyers ont été privés de courant. Pourquoi ces coupures ? Comment se fait le choix des zones à priver d'électricité ? Les Réunionnais ne sont pas tous égaux face aux délestages.

Tout d'abord, EDF ne produit pas la totalité de l'électricité de l'île. Les infrastructures appartenant à EDF, à savoir la centrale du Port, les turbines à combustion du Port, et la centrale hydraulique de l'Est de l'île, produisent 40% de l'électricité de l'île. La plus grande partie de l'énergie (60%) provient des centrales thermiques du Gol et de Bois-Rouge. Ces dernières appartiennent à la Séchilienne Sidec, un groupe privé spécialisé dans les énergies. L'électricité produite par ces deux centrales est revendue à EDF qui ensuite se charge d'assurer l'équilibre du réseau électrique et d'alimenter les foyers réunionnais. Les salariés du groupe étant en grève, les machines du Gol et de Bois-Rouge sont à l'arrêt.

Conséquence, EDF doit répartir les 40% restants pour alimenter La Réunion. Or, ces 40% sont équivalents à une puissance énergétique de 240 à 250 Mégawatt alors que 350 à 400 Mégawatt sont nécessaires en temps normal (le record de consommation est de 430 Mégawatt). Pour ne pas déséquilibrer le réseau, EDF doit donc procéder à des délestages tournants de 2 heures environ sur toute l'île.

Ce type de situation est prévu et il existe un "plan de délestage" validé en préfecture. Il comporte 6 échelons. Chaque échelon compte de plus en plus de foyers. Lorsqu'une coupure est décidée, elle concerne une zone appelée "départ", c'est-à-dire un quartier qui compte environ 800 foyers. Dans la soirée de lundi, environ 110 départs, soit autant de quartiers, ont été privés d'électricité simultanément. Comment sont choisies ces zones ? Impossible de le savoir. "Elles concernent toute l'île", assure Christophe Carrère, chargé de communication à EDF. Il souligne que des grandes surfaces commerciales ont également été touchées par des coupures dans la journée de lundi.

Une chose est sûre, les zones dites "sensibles" comme les hôpitaux ou les pompiers, sont les mieux protégées des pannes de courant. Elles sont situées à l'échelon 6. "Il ne peut pas y avoir de coupure de courant dans ces endroits. Dans l'hypothèse où une seule turbine resterait en fonction sur toute l'île suite à une panne généralisée, elle n'alimenterait que ces établissements prioritaires", explique Christophe Carrère. Ces structures disposent par ailleurs de groupes électrogènes pour surmonter toute panne. Par extension, les foyers se situant autour de ces zones sensibles sont également protégées et ne subissent pas ces coupures.

Le Sud de l'île est le plus mal loti lors de ce genre d'événement. En effet, c'est la zone où la croissance électrique est la plus importante. Or, seule la centrale du Gol alimente le secteur en temps normal. Lorsqu'elle cesse de fonctionner, EDF doit prendre le relais. "Le seul moyen est d'acheminer l'électricité via la ligne la Saline - le Gol. Mais cette ligne n'a qu'une capacité de 44 Mégawatt alors qu'il faudrait près de 150 Mégawatt pour alimenter le Sud de l'île", affirme Christophe Carrère. D'où des coupures d'électricité plus fréquentes dans cette zone.

Des projets d'installation de turbines à combustion dans le Sud sont dans les cartons mais rien de concret pour l'heure. "Des raisons politiques freinent le développement du système électrique. On veut de l'électricité dans le Sud mais on ne veut pas les infrastructures qui vont avec", confie un professionnel du secteur.

Plus globalement, cet épisode pose une fois de plus la problématique de l'alimentation électrique sur une île où la demande augmente de 3%, soit 30 mégawatt, par an. Une nouvelle centrale électrique de 160 Mégawatt devrait entrer en fonctionnement en 2012 au Port. Le photovoltaïque est en pleine croissance. Mais cette source d'énergie est considérée comme aléatoire. Pour ne pas déséquilibrer l'alimentation locale en cas de baisse de production du photovoltaïque, EDF a limité son utilisation à 30% du total de l'énergie utilisée.

Solution avancée par des professionnels du secteur, le stockage de l'énergie photovoltaïque. Une batterie de stockage d'un Mégawatt a été installée en 2010 à titre expérimental à Saint-André. "Pour l'instant, cela fonctionne bien. Mais le problème, avec le solaire, c'est qu'il faut une installation de 6 Mégawatt pour produire un Mégawatt d'énergie. Ce n'est pas une énergie constante", signale Christophe Carrère.

Le développement du réseau électrique dans les prochaines années devra également prendre en compte la problématique du foncier à La Réunion et celle du coût des installations. "Si les coûts étaient entièrement répercutés sur les factures, un Réunionnais qui paye une facture de 500 euros devrait régler le double", estime le chargé de communication d'EDF.

Mounice Najafaly pour
guest
0 Commentaires