Sous l’impulsion des aides publiques, l’apprentissage s'est fortement développé en France depuis la crise sanitaire. La progression de l’apprentissage est plus marquée encore à La Réunion qu’au niveau national : entre 2018 et 2024, le nombre de contrats d’apprentissage signés est multiplié par cinq, une croissance deux fois plus élevée qu’en moyenne nationale. (Photo photo rb/www.imazpress.com)
Cette diffusion de l’apprentissage s’accompagne d’une élévation du niveau de diplôme préparé. En 2023, quasiment un apprenti sur deux prépare un diplôme de niveau supérieur au baccalauréat alors qu’en 2018, un apprenti sur deux préparait un diplôme de niveau CAP. Parallèlement à la hausse du niveau de diplôme, l’apprentissage se féminise.
Sur l’île, les secteurs du commerce, de fabrication de denrées alimentaires, des services des associations et de l’hébergement et restauration concentrent la majorité des apprentis.
L’insertion professionnelle des apprentis dépend fortement du niveau de diplôme préparé. Alors que moins de 50 % des anciens apprentis en CAP sont en emploi six mois après la fin de leur formation, c’est le cas de 80 % de ceux issus d’une licence ou d’un master professionnel. Quel que soit le niveau de diplôme, les femmes sont moins souvent en emploi que les hommes après la fin de leur apprentissage. La spécialité du domaine de formation influe également sur l’insertion professionnelle des apprentis. Elle est meilleure pour ceux ayant préparé un diplôme dans les spécialités de production, techniques, industrielles et logistiques. Les femmes se tournent moins souvent vers ces domaines de formation mais davantage vers les spécialités de services.
En 2024, 15 300 contrats d’apprentissage débutent à La Réunion. Le recours des entreprises à l’apprentissage est plus intense sur l’île qu’en moyenne nationale : 6,2 % de l’ensemble des salariés du secteur privé sont apprentis contre 5,0 % en France.
Le recours à l’apprentissage croît fortement sur l’ensemble de la France, notamment sous l’impulsion de la réforme de 2018. À La Réunion, la progression de l’apprentissage est particulièrement marquée : le nombre de contrats signés est multiplié par 5 entre 2018 et 2024, contre 2,5 en moyenne nationale.
Cette augmentation situe La Réunion au deuxième rang des régions françaises après Mayotte. La hausse débutée en 2020 atteint un pic en 2022 avec près de 15 000 nouveaux contrats d’apprentissages signés. Depuis, le nombre d’entrées en apprentissage est relativement stable à un niveau élevé.
- La hausse du nombre d’apprentis s’accompagne d’une élévation du niveau des diplômes préparés -
La forte progression de l’apprentissage s’accompagne d’une élévation notable du niveau des diplômes préparés. Parmi les personnes entrées en apprentissage en 2023, 45 % préparent un diplôme supérieur au bac contre 28 % en 2018. Toutefois, cette part reste nettement inférieure au niveau national où 62 % des apprentis sont dans ce cas en 2023.
Ce constat reflète l’élévation du niveau général de formation des jeunes sur l’île, qui reste cependant en retrait comparé à celui des jeunes en France. Ainsi, à La Réunion en 2022, 24 % des jeunes entre 15 et 29 ans ayant terminé leurs études sont titulaires d’un diplôme du supérieur, contre 40 % dans l’Hexagone.
Ce sont les entrées en apprentissage dans les formations de niveau bac +2 ou équivalent (BTS essentiellement) qui croissent le plus
à La Réunion : elles représentent 29 % des contrats d’apprentissage signés en 2023, soit 12 points de plus qu’en 2018.
En France, la hausse est la plus importante pour les formations universitaires, de niveau bac +3 ou plus (+19 points contre +5 points
à La Réunion).
À l’inverse, entre 2018 et 2023, le recul est particulièrement marqué pour les contrats de niveau CAP. Alors qu’ils étaient majoritaires en 2018 à La Réunion où ils représentaient 52 % des contrats d’apprentissage signés dans l’année, ils n’en constituent plus que 28 % en 2023. La baisse est plus marquée qu’au niveau national (-23 points contre -17 points) mais la part des apprentis préparant un diplôme de niveau CAP reste encore supérieure sur l’île (23 % en France).
- L’apprentissage se féminise, en lien avec la hausse du niveau de diplôme préparé -
L’élévation du niveau de diplôme préparé s’accompagne d’une féminisation marquée des effectifs d’apprentis. En 2023, 47 % des personnes entrées en apprentissage dans l’année sont des femmes, contre 33 % en 2018 (+14 points). Cette hausse est légèrement plus forte qu’au niveau national (+11 points) où la part des femmes atteint 45 % en 2023.
La majorité des femmes apprenties préparent un diplôme de niveau supérieur au baccalauréat (55 %), à savoir un BTS, une licence professionnelle, voire un master.
Pour les hommes, cette part est nettement moindre (37 %). Il ne s’agit pas d’une spécificité liée à l’apprentissage : globalement, le niveau de formation initial des jeunes femmes réunionnaises est plus élevé que celui des jeunes hommes. Elles sont plus nombreuses à poursuivre leurs études après le bac.
L’élévation du niveau des diplômes préparés implique également une augmentation notable de l’âge des apprentis, et en particulier des femmes, sur-représentées dans l’enseignement supérieur. En 2023, 67 % des femmes entrées en apprentissage ont 20 ans ou plus contre 53 % en 2018.
Les petites entreprises jouent un rôle central dans le recours à l’apprentissage : la part des apprentis parmi les salariés des entreprises de 10 salariés ou moins s’élève à 11 %, contre 3 % dans les grandes entreprises de 250 salariés ou plus. Ainsi, les petites entreprises, majoritaires dans le tissu économique réunionnais, concentrent la majorité des apprentis (59 %).
En particulier les micro-entreprises de moins de 5 salariés regroupent 40 % d’entre eux. Malgré la forte progression du recours à l’apprentissage sur l’île, la concentration des apprentis dans les petites entreprises reste stable depuis 2018.
Quatre secteurs ont un fort recours à l’apprentissage à La Réunion. Fin 2023, les apprentis représentent ainsi plus de 10 % des salariés dans les services proposés dans les associations, la fabrication de denrées alimentaires, le commerce et l’hébergement et restauration figure 3, une part bien supérieure à la moyenne nationale.
Dans ces secteurs, les entreprises de grande taille sont très peu présentes, elles représentent 9 % des salariés contre 18 % en moyenne dans l’économie réunionnaise. Dans le secteur de l’hébergement et restauration, le recours à l’apprentissage est deux fois plus fréquent sur l’île que dans l’Hexagone (10,5 % contre 5 %). Globalement, tous les secteurs de l’économie réunionnaise ont davantage recours à l’apprentissage, à l’exception de trois secteurs : la construction, les activités immobilières, et la fabrication de matériels de transport. En particulier, dans le secteur de
la construction, 5,2 % des salariés sont sous contrat d’apprentissage à La Réunion, contre 7,5 % dans l’Hexagone.
Le secteur du commerce, premier pourvoyeur d’emplois salariés sur l’île, regroupe à lui seul 31 % des apprentis. Cette prédominance se reflète également dans les spécialités préparées par les apprentis. Dans l’Hexagone, le commerce regroupe également le plus d’apprentis mais dans une proportion bien plus faible (22 %).
- Les salaires des apprentis relativement plus faibles qu’en province -
En 2023, le salaire mensuel net d’un apprenti pendant la durée de son contrat en entreprise s’élève en moyenne à 1 110 euros à La Réunion, soit 5,9 % de moins qu’en France de province (Hexagone hors Île-de-France). Cet écart est plus faible que pour les autres salariés du privé, dont le salaire moyen est inférieur de 8,6 % à celui de leurs homologues de province.
Pour les apprentis, la différence de salaire avec la province s’explique en grande partie par le niveau de la formation préparée, en moyenne moins élevé à La Réunion. En effet, la rémunération des apprentis est encadrée ; elle est indexée sur l’âge de l’apprenti et le nombre d’années de la formation suivie, donc sur le niveau de formation. Ainsi, plus le niveau de la formation est élevé, plus l’apprenti est âgé et par conséquent sa rémunération meilleure. À La Réunion, la rémunération des femmes en apprentissage est en moyenne supérieure de 5,6 % à celle des hommes car elles suivent des formations d’un niveau plus élevé en moyenne.
La poursuite d’études après un contrat d’apprentissage augmente avec le niveau de diplôme préparé
À La Réunion, le taux de poursuite d’études des apprentis à la rentrée suivante, que ce soit en apprentissage ou non, varie selon le niveau de diplôme préparé. Ainsi, 31 % des apprentis inscrits en lycée en 2022-2023 poursuivent leurs études, une part plus faible qu’au niveau national (38 %).
Après un CAP ou un baccalauréat, le taux de poursuite d’études est comparable (27 %). La poursuite d’études est plus fréquente pour les diplômes du supérieur. Elle concerne 37 % des apprentis diplômés de niveau BTS. Les apprentis de licence professionnelle, inscrits dans l’enseignement supérieur, poursuivent même plus souvent leurs études qu’au niveau national : à La Réunion, 48 % d’entre eux sont inscrits à l’université à la rentrée suivante contre 42 % en moyenne dans l’ensemble de la France.
La réussite au diplôme est relativement élevée en apprentissage. Les taux de réussite oscillent selon les années, entre 70 % pour les BTS et 90 % pour les licences professionnelles. Ces taux sont proches de ceux en France. L’obtention du diplôme favorise également la poursuite d’études des apprentis : 32 % de ceux ayant obtenu leur diplôme poursuivent leurs études à la rentrée suivante contre 24 % de ceux qui ne l’ont pas obtenu. Dans ce cas, il s’agit d’un redoublement ou d’une inscription dans une autre formation de l’enseignement général.
- L’insertion professionnelle augmente fortement avec le niveau de formation préparée -
L’insertion professionnelle des apprentis réunionnais demeure contrastée. Parmi les apprentis qui ont arrêté leurs études et qui étaient inscrits au lycée, c’est-à-dire en CAP, en bac professionnel ou en BTS, seulement 45 % ont un emploi salarié 6 mois après la fin de leur contrat d’apprentissage. Cette part est nettement inférieure à la moyenne nationale (66 %).
Le taux d’insertion professionnelle augmente avec le niveau de diplôme préparé : de 43 % pour le niveau CAP à 52 % pour le niveau BTS figure 4. Il est le plus élevé pour les apprentis de l’université et atteint 79 % pour les licences professionnelles et 82 % pour les masters. Pour ces formations universitaires, ces taux sont comparables au niveau national.
Par ailleurs, l’insertion professionnelle varie également selon l’obtention ou non du diplôme préparé. En 2023, les apprentis diplômés sont plus fréquemment en emploi que les non-diplômés, avec des écarts marqués selon le niveau de formation. Ainsi, pour le CAP, 56 % des diplômés sont en emploi contre 44 % des non-diplômés. L’écart se creuse davantage pour le brevet professionnel : 74 % des diplômés ont un emploi contre 51 % des non-diplômés.
L’insertion dans l’emploi est plus élevée 12 mois après la fin du contrat d’apprentissage, l’augmentation la plus sensible concernant les niveaux de diplômes les moins élevés. Ainsi, pour les apprentis ayant préparé un diplôme de niveau baccalauréat, le taux d’insertion professionnelle 12 mois après la fin de la formation atteint 56 %, soit 8 points de plus que 6 mois après. Pour les sortants de master, l’écart est un peu moindre (+5 points).
- L’insertion dans l’emploi est meilleure pour les spécialités techniques et logistiques et pour les hommes -
Pour les apprentis sortant d’une formation de niveau CAP à Bac + 2, le taux d’insertion à6moisestenmoyennede45%maisil varie fortement selon la spécialité suivie. Dans les domaines techniques, industriels et logistiques, l’insertion est généralement meilleure : plus de 50 % des apprentis concernés sont en emploi 6 mois après la fin de leur formation figure 5. Ces métiers, souvent en tension, nécessitent des qualifications et certificats spécifiques que l’apprentissage permet d’acquérir.
A contrario, dans les spécialités des services à la collectivité, ou encore l’agriculture, les taux d’insertion sont les plus faibles, proches de 30 %. Pour les spécialités rassemblant le plus d’apprentis, dans le commerce et la vente, le taux d’insertion à 6 mois s’élève à 42 %, inférieur à la moyenne.
Après l’apprentissage, les jeunes femmes sont moins souvent en emploi. Ce constat résulte du choix des spécialités, elles se tournent moins vers les domaines techniques qui offrent une meilleure insertion dans l’emploi. Toutefois, quelle que soit la spécialité choisie et mises à part quelques exceptions, le taux d’insertion à 6 mois après la fin de l’apprentissage est plus faible pour les femmes. Par exemple, dans le commerce et la vente, il s’élève à 39 % pour les femmes contre 46 % pour les hommes.
Dans l’hôtellerie et la restauration, le constat est identique : 46 % pour les femmes contre 52 % pour les hommes. L’insertion dans l’emploi des femmes anciennement apprenties est meilleure dans trois spécialités uniquement : le transport et la logistique, la comptabilité et les services à la personne.
En outre, l’écart dans les taux d’insertion des hommes et des femmes augmente avec le niveau de la formation préparée. Au niveau CAP, 43 % des femmes comme des hommes sont en emploi 6 mois après la fin de leur formation. Le taux d’insertion professionnelle devient supérieur de 2 points pour les hommes pour le niveau bac, de 7 points pour le niveau BTS et de 8 points pour les licences professionnelles.
Dans l’Hexagone, les femmes sortant de l’apprentissage sont également moins souvent en emploi que les hommes. Cependant, contrairement à La Réunion, le taux d’insertion professionnelle des jeunes femmes converge vers celui des hommes à mesure que le niveau de la formation augmente.
En 2023, la moitié des salariés qui étaient en apprentissage l’année précédente sont insérés durablement en emploi, disposant d’un contrat à durée indéterminée. Cette part est équivalente pour les hommes et femmes mais augmente avec le niveau de formation, atteignant jusqu’à 69 % pour les anciens apprentis en licence professionnelle. La grande majorité des salariés formés en apprentissage travaillent à temps plein (83 %). Leur rémunération mensuelle nette moyenne s’élève à 1 610 euros en équivalent temps plein (EQTP), soit environ 1,2 Smic.
