Agriculture

Cyclone Freddy : peu d'impact sur les prix des fruits et légumes péi

  • Publié le 28 février 2023 à 06:21
  • Actualisé le 28 février 2023 à 06:39
marché forain du Port

Quelques jours se sont écoulés depuis le passage au large de la Réunion du cyclone Freddy. Il est passé au plus proche du département dans la nuit du lundi 20 au mardi 21 février 2023. Contrairement à Batsirai, les cultures agricoles ont mieux résisté au phénomène. Mais une (légère) augmentation des prix des fruits et légumes n'est pas à exclure sur les étals des marchés. (Photo marché forain du Port photo RB imazpress)

Pas mal de vent et un peu de pluie. Voilà comment résumer cet épisode cyclonique, court et intense, qu'a été Freddy. Si son passage a été rapide comme le prévoyait Météo France, il a été moins impactant que l'un de ses prédécesseurs : Batsiraï.

Freddy a été plus clément avec les agriculteurs en ce mois de février. Ou presque.

D'après un rapport de la Chambre d'agriculture sorti le mercredi 22 février 2023, au lendemain du passage du cyclone, sur l’ensemble de l’île des dégâts ont été observés par rapport à la force du vent. Le cyclone n'a quasi pas apporté de pluie, "voire trop peu par rapport aux zones qui étaient en déficit hydrique depuis plusieurs mois". Les dégâts se concentrent principalement sur les productions à cycle très court comme la salade et les brèdes.

Lire aussi - La chambre d’agriculture constate les dégâts

- Un épisode "venteux" -

Dans le cirque de Salazie où le chouchou et les brèdes sont deux cultures bien présentes, les terrains agricoles ont été épargnés. "Il n'y a pas eu de remontée particulière", fait remarquer Anna Leygues, animatrice du Groupement d'intérêt économique et environnementale à Salazie et membre de la Chambre d'agriculture de La Réunion.

"C'était un épisode plutôt venteux. Les rafales de vent n'ont pas été assez violentes. Il y a eu un peu de perte oui, mais différentes des autres cyclones. Il faudra faire un recensement avec un sondage auprès des agriculteurs pour évaluer les pertes par la suite". Selon l'ampleur des dégâts, une aide sera possible de la part du Département ou de la Région, explique Anna Leygues.

Selon Jean-Max Payet, directeur du marché de gros, il ne devrait donc pas y avoir d'impacts importants sur le prix des fruits et des légumes. "On le verra plus tard." Comme il le soutient, les salades et les brèdes ont été les cultures les plus touchées par le phénomène cyclonique. Il faut s'attendre à une "légère hausse du prix sur ces produits ; mais cela serait de l'ordre de quelques centimes sur le marché de gros, par exemple".

Isabelle Grondin, agricultrice, maraîchère à la Petite-Ile, s'est préparée à accueillir Freddy. Les parcelles ont été travaillées en amont, les structures et les abris ont été retirés pour éviter qu'ils ne s'envolent. Si la jeune agricultrice n'avait pas appliqué ces quelques gestes, elle sait qu'elle aurait été "mise en difficulté".

"On a eu de la chance par rapport à Batsirai ; là nous avons dû laver le terrain, enlever les différentes pourritures. À l'époque, nous avions eu une grosse perte de l'ordre de 20 à 25.000 euros pour un hectare de carotte", raconte-t-elle. "Dans le sud tout s'est bien passé. On avait peur vu l'ampleur de ce système cyclonique", livre-t-elle.

- La pluie s'est faite grandement désirée -

Anna Leygues ajoute à nouveau que le mois de février a été "très faible en pluie". "Ça inquiète les agriculteurs, comme les nappes phréatiques ne sont pas encore remontées". Ce constat vient s'ajouter comme un élément supplémentaire dans le dossier constitué par la Chambre d'agriculture pour que les agriculteurs puissent demander l' "état de calamité sécheresse".

Jean-Max Payet regrette également qu'il n'y ait pas eu "assez de pluie".

Ces pluies ont tout de même été intéressantes selon Eric Lucas, responsable de la cellule diversification à la Chambre d'Agriculture de La Réunion. "Même si elles n'étaient pas suffisantes, car nous sommes encore en déficit par exemple dans le sud, Saint-Joseph, Saint-Louis, il y a eu un léger mieux dans l'est. Mais si on attend un cyclone pour la pluie c'est grave" ajoute-t-il.

- Des agriculteurs touchés par Freddy -

D'autres producteurs n'ont pas eu la même chance que Isabelle Grondin. Les cultures de tomates, de salade et de mangue ont été les dommages collatéraux du court passage de Freddy.

"Il y a des parcelles tardives de mangues qui ont été touchées. Les zones impactées sont : Saint-Paul, avec la zone de Cambaie ou encore La Possession . Des pieds y étaient plus ou moins chargés. Des agriculteurs ont perdu jusqu'à 80% de leur récolte", explique Eric Lucas.

Les parcelles tardives s'expliquent par un décalage de la production liée à la floraison tardive, détaille-t-il. Josée, Augus, Eddy, ces variétés ont pu être touchées par le cyclone. "Quand un fruit est gros et mûr, avec un vent de 60 - 70 km/h, elles tombent du pied. Même lorsqu'il n'y a pas de cyclone. Là avec Freddy, c'était un vent du sud vers le nord, qui est arrivé dans l'ouest", précise Eric Lucas.

Cela n'est donc pas sans conséquence pour la trésorerie des agriculteurs. C'est tout un travail autour du traitement de la terre mais aussi de la récolte.

Ce genre de situation met également en exergue deux problématiques auxquelles sont confrontées les agriculteurs. "Souvent ils n'ont pas d'indemnisation car il n'y pas assez d'éléments. Pour les cyclones avec dégâts, les banques sont assez indulgentes pour décaler les échéances de prêt. Les impôts jouent également le jeu et savent que les agriculteurs sont en difficultés", poursuit Eric Lucas. Les agriculteurs doivent aussi rendre des comptes auprès des fournisseurs ; "souvent on dit qu'ils sont les premiers à crier mais il faut aussi montrer les problèmes auxquels ils sont confrontés ; ils n'ont pas forcément d'indemnisation".

- (Peut-être) une augmentation des prix -

Pour Eric Lucas, l'augmentation des fruits et légumes ne serait pas uniquement lié au cyclone ; il faut ajouter à cela le problème de sécheresse et d'inflation, qui persiste.

Comme il le relate, le prix de la tomate pourrait augmenter. "Certains agriculteurs ont débâché leur exploitation et avec le peu de vent, cela a pu malgré tout entraîné la perte de "bouquet floraux de tomates". "Dans une dizaine de jours il est possible qu'il y ait une augmentation du prix de la tomate. Il ne sera pas à 9 -10 euros le kilo comme l'année dernière. Il faut s'attendre à 2 voir 3 euros", relativise Eric Lucas.

Selon lui, pour préserver sa culture, il faut enlever la bache, coucher ses plants et protéger ses cultures. "Certains peuvent ne pas débâcher mais ce n'est pas prudent. C'est quand même 10 ans de travail", souligne-t-il.

Que les consommateurs se rassurent par ailleurs ; les brèdes et les salades ne devraient pas être impactés au niveau de leur prix. "Ils seront moins jolis sur les étales, mais il n'y a pas eu de grosse perte". Un constat également appuyé par la chambre d'agriculture dans son bilan. Des déchirures sont constatées au niveau des feuilles ce qui les rendent impropres à la commercialisation, affirmait la chambre verte.

Il ne faut uniquement tenir compte de l'épisode cyclonique Freddy, en cas d'augmentation. "On a eu un mois de janvier assez sec. C'est de la sécheresse qui dure depuis 5-6 mois. C'est inquiétant même avec un cyclone normalement on a de la pluie mais là, il n'y a pas eu grand chose. Les personnes doivent comprendre qu'il faut de la pluie", rappelle le responsable de la cellule diversification.

Dominique Clain, président du syndicat Unis pour nos agriculteurs (UPNA) soutient à son tour que les dégâts ont été moindre pour l'agriculture. "Seule la prodution de mangue a été mise à mal avec le cyclone", constate-t-il.

"La hausse des prix ? On n'y échappera pas. La salade, les longanis la tomate aussi vont augmenter", renchérit Dominique Clain. "Ce sont des plants très fragiles en plein air. Les brèdes aussi c'est possibles qu'ils augmentent. Cela va être de l'ordre de quelques centimes pour les légumes. Cela ne sera pas dû qu'au mauvais temps ; c'est aussi lié à l'humidité. L'augmentation des prix va se faire d'ici les prochains jours".

Le président du syndicat ajoute par ailleurs que "si on avait pris le cyclone de plein fouet, ça aurait été compliqué de relancer la filière agricole. On était très inquiet car elles sont tellement mises à mal et un phénomène météorologique aurait par exemple fermé la porte à la canne, déjà mal lancée". "C'est le consommateur qui va subir l'augmentation des prix pour s'en sortir. Freddy a emmener avec lui de l'air chaud et de l'humidité. Cela ajoute un stress supplémentaire aux cultures", prévient l'agriculteur.

"En majorité ce sont les cultures maraîchères qui ont été impactées ; les fruits ont été plus touchés. On a eu un phénomène d'affolement avec les prévisions de Météo France. Les pertes se chiffrent à hauteur de 10%", estime Gaël Dijoux, président de OP Ana Fruits, (organisaiton de producteurs de fruits et légumes).

"Les légumes ont effectivement été touchés ; au niveau de la production à cycle court. Mais en quatre semaines, la production peut de nouveau revenir, comme la salade. Il y a des producteurs qui ont du mal à mettre en place une augmentation des prix sur leur marchandise car le consommateur ne peut pas forcément l'accepter. C'est la loi de l'offre et de la demande".

Il nuance également qu'en tant qu'agriculteur, on est jamais assez préparé à un cyclone. "Cela fait partie des risques du métier. On peut avoir de la sécheresse, des cyclones. Chaque culture a ses avantages et ses inconvénients. Si on aurait été touché durement par Freddy, c'est l'importation alimentaire qui l'aurait emporté, comme à l'époque de Batsirai". Dans tous les cas, "on ne devrait pas manquer de fruit", rassure le président de OP Ana Fruits avant de conclure que "les agriculteurs travaillent pour la souveraineté alimentaire".

ef/www.imazpress.com / redac@ipreunion.com

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1 Commentaires
HULK
HULK
2 ans

6,99 euros le kg de chouchou dans une moyenne surface. Il n'y a pas de problème?